« Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu'à la mort pour que vous ayez le droit de le dire » Voltaire
Nous pouvons ne pas être d'accord avec tout ce qu'un journaliste pense ou dit, mais nul n'a le droit de le museler pour ce qu'il dit. Considérée au XXIe siècle comme un des droits inaliénables de l'homme, la liberté d'expression est retenue comme indicateur de démocratie dans le calcul du niveau de développement d'un pays et de son peuple. Ce qui caractérise un État de droit d'un État de non-droit, c'est justement le respect des libertés publiques et des droits de l'homme. Cela est censé normalement immuniser les journalistes de tous bords, qui pourront ainsi saluer, critiquer, dénoncer ou remettre en question librement la performance des personnes au pouvoir. Il est évident que tout principe de liberté a des limites dans son exécution. Et c'est à ce niveau qu'intervient la loi qui définit clairement, dans l'intérêt public, quels sont les cas où la mise en application d'une liberté devient plus ou moins menace, et nécessite une intervention policière et judiciaire. Tant que le principe de l'égalité des citoyens devant la loi est respecté, et que la loi est claire, avec une élasticité modérée et sans ambiguïté, son application ne provoque aucun malentendu. Et tant que la violation d'une loi est jaugée par une institution autonome, libre de toute pression politique, les jugements sont bien mieux tolérés par les principaux concernés. C'est dans le cas contraire que nous sommes forcés de tirer la sonnette d'alarme.
Ancré dans le flanc de pays arabes où la liberté d'expression, la démocratie et les droits de l'homme sont dans un piteux état, l'État libanais peine actuellement à maintenir une image de havre de liberté, de centre névralgique de tolérance, malgré son ouverture sur la Méditerranée et sa proximité socioculturelle avec le monde occidental. Un Occident qui a vu en tout cas sa liberté d'expression presque illimitée se faire dynamiter avec les événements tragiques de Charlie Hebdo.
Les médias, et notamment les télévisions, bénéficient d'une visibilité exceptionnelle, et leur influence sur l'opinion publique ne laisse aucune place à la discussion. C'est donc cette visibilité et ce pouvoir qui donnent l'impression au téléspectateur que les figures journalistiques et principaux modérateurs et mentors des émissions politiques sur petit écran sont intouchables et au-dessus d'une menace de poursuites judiciaires. Cela pourrait s'appliquer pour une des stars libanaises de la télé, Marcel Ghanem, qui se permettait en présence de ses invités des libertés et des insinuations qui lui auraient valu la prison chez nos voisins de palier proche-orientaux.
À la suite de son émission politique Kalam el-Nass diffusée sur la LBCI, et durant laquelle il avait reçu deux journalistes saoudiens, Ibrahim el-Merhi et Adwan el-Ahmari, qui se sont livrés en direct à une critique virulente des plus hautes autorités libanaises, M. Ghanem s'est vu attirer les foudres du ministre de la Justice, Salim Jreissati. Au lendemain de cet épisode télévisé, le ministre de la Justice, par ailleurs membre du Courant patriotique libre (CPL), a saisi le parquet, lui demandant d'enquêter sur ce qui s'était passé durant l'émission. Le 24 novembre, la procureure générale près la cour d'appel du Mont-Liban avait engagé des poursuites contre Marcel Ghanem, après des mesures d'enquête. Le journaliste vedette sera donc interrogé le 18 décembre dans le cadre des poursuites engagées par le parquet contre lui pour actes commis en violation de la loi sur les imprimés et pour diffamation à l'égard du président de la République, Michel Aoun.
La limite entre liberté d'expression et diffamation, expression très large et à l'interprétation recyclable et indémodable, s'amenuise de plus en plus au risque de disparaître. Dans un pays où les journalistes ne cessent de payer le prix le plus élevé, depuis les potences accrochées par les Ottomans place des Martyrs jusqu'à l'assassinat de Gebran Tuéni et Samir Kassir, en passant par la série d'emprisonnements arbitraires (qui ont, entre autres, touché des partisans enthousiastes du CPL) commanditée par les organes de la tutelle syrienne, il est urgent de garder un œil et une plume vigilants face à ce qui se passe. Une liberté payée tellement cher n'est pas un sujet de négociation et ne peut être étouffée, indépendamment de l'identité de celui qui l'exerce. Surtout pas dans les médias, journaux, radios et, bien sûr, télévisions.
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commentaires (8)
il y a plusieurs courants sur se sujet certain effectivement ne sont pas d'accords, concernant la baumelle je suis d'accords aussi.. oui il etait d'apres certain un peu narcissique aussi lol mais a lire certain livres de voltaire .. le traite de tolérance etc peuvent avoir aussi une certaine idee mais de la a dire la verite personne ne peut se targuer de la détenir
Bery tus
01 h 04, le 11 décembre 2017