En cette période festive, et après avoir survécu au Black Friday, personne ne craint le ridicule ni le mauvais goût. Aux USA, on est plutôt fier de ressembler à un sapin de Noël. Petits et grands arborent fièrement des pulls décorés aux couleurs et aux motifs de la fête, même si cet accessoire, devenu traditionnel, s'est vu attribuer le nom d'ugly Christmas sweater en raison de son design devenu de plus en plus clinquant, anecdotique et débridé. Qu'importe le flacon, pourvu qu'il y ait l'ivresse de la célébration.
Cette mode ponctuelle a pris son essor dans les années 80, par le biais d'une star du petit écran de l'époque, Bill Cosby (alors loin des scandales qui ont fini par le rattraper), incarnant le personnage du bon père de famille, le Dr Huxtable. Il est apparu dans l'un des épisodes du célèbre show éponyme vêtu d'un pull des plus noëlisés. Idem pour l'acteur Chevy Chase, héros du film National Lampoon's Christmas Vacation. Le ton était donné, les gens ont aimé et ont suivi. Les amateurs des tricots faits main y sont allés de leur créativité et, bien sûr, l'industrie du textile a saisi le train en marche. Ces pulls bariolés à souhait ont notamment été fabriqués par une firme annonçant bien ses couleurs, baptisée (évidemment) Jingle Bell Sweaters.
Des ugly Christmas sweaters parties ont été lancées. Les invités y rivalisent d'ingénuité et de fantaisie. La vague s'est propagée jusqu'au Canada. La ville de Vancouver se vante d'être la première à avoir organisé, en 2002, une ugly Christmas sweater party, devenue depuis une tradition. Le comédien Jimmy Falon a introduit dans son célèbre night show un segment intitulé The 12 days of Christmas sweaters. Même l'acteur britannique Colin Firth s'y est mis, en arborant un pull du genre, cadeau de sa bienveillante mère, dans le film Bridget Jones' s Diary.
Culture pop
Ce pull particulièrement bariolé, qui accompagne les festivités de fin d'année, exprime à la base un sentiment de nostalgie, à présent remis au goût du jour et de la mode. Il porte toute la symbolique des Noëls de l'enfance, notamment lorsque le 24 décembre au soir, les enfants allaient se coucher pour permettre au mythique bonhomme rouge de déposer les cadeaux attendus au pied du sapin. Sa conception permet des extravagances, mais très limitées dans le temps. Au lendemain du 1er janvier, il est rangé, oublié jusqu'à l'année suivante. Néanmoins, devenu partie de la culture pop, il a pu accéder aux podiums de mode, avec des créations plus recherchées. La palette dominante reste le vert, le rouge et le blanc, mais chaque année, la couleur in de la saison s'invite dans la composition de cet ugly Christmas sweater, qui le devient un peu moins.
Les magasins huppés proposent également leurs propres modèles conçus avec raffinement et sophistication, et adressés à des réveillons familiaux plus élégants. L'ugly Christmas sweater, enfilé uniquement durant le mois de décembre, s'est enfin trouvé d'autres fonctions que celle d'accompagner une soirée au coin du feu ou d'évoquer le cocon de l'enfance. Récemment, la randonnée des cyclistes canadiens de la ville de Fredericton a eu lieu sous le signe des ugly Christmas sweaters. Du côté des célébrités, c'est devenu un must de flirter avec la pacotille et le goût douteux de ces pulls hors norme : de Beyoncé et des top models, les sœurs Gigi et Bella Hadid, à l'habituellement sage Sofia Coppola, en passant par Miley Cyrus, Kanye West, Kate Hudson, Matt Damon et Pharrell Williams, tout ce beau monde a joué le jeu.
Coïncidence ou pas, ce pull s'est imposé durant la fête de la Nativité tout en rappelant un conte intitulé The Christmas Sweater de l'écrivain Glenn Beck. L'histoire d'un petit garçon dont la famille a des problèmes d'argent et qui rêve d'une belle bicyclette. Le 25 décembre, à sa grande déception, il ne trouvera au pied de l'arbre que ce que sa mère a pu déposer et qu'il décrira comme un « stupid and ugly handmade sweater » (un pull stupide et laid fait main). Ce n'est que plus tard qu'il réalisera la valeur de ce cadeau précieux car venant du cœur.
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