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Liban - Commémoration

Un an après, la disparition de Ghazi Aad reste douloureuse

La famille de l'ancien porte-parole de Solide et ses amis renouvellent leur engagement à poursuivre le combat.

Une messe a été célébrée samedi soir, en l’église de l’Immaculée Conception à Dlaybé, dans le Metn, à la mémoire de Ghazi Aad. Photo Richard Meheb

Un an après le décès de Ghazi Aad, porte-parole de Solide (Soutien aux Libanais en détention et en exil), le 16 novembre 2016, la plaie est tout aussi vive pour sa famille et ses amis. Et le vide qu'il a laissé, tout aussi immense.

Samedi soir, ils se sont réunis en l'église de l'Immaculée Conception, à Dlaybé (dans le Metn), village natal de Ghazi, où une messe a été célébrée en sa mémoire, en présence notamment du député Hikmat Dib, représentant le chef du Courant patriotique libre, et des députés Ghassan Moukheiber, Alain Aoun, Nagi Gharios et Fadi el-Aouar. Un immense portrait du défunt, au regard pénétrant et au sourire chaleureux, décore l'église. On peut y lire : « Le militant est parti, mais le combat se poursuit. »

« Ghazi militait pour une cause juste », affirme le père Joseph Abdel Sater, de l'ordre antonin, qui avait présidé l'office divin. Soulignant qu'il ne l'a pas personnellement connu, il note que « son combat était aussi pour dévoiler le sort des pères Albert Cherfane et Sleiman Abi Khalil », de l'ordre antonin, disparus à Deir el-Kalaa, le 13 octobre 1990.

Après la messe, la famille et les amis se sont rendus dans le salon de l'église, où une icône en fer à l'effigie de Ghazi Aad, réalisée en sa mémoire par Solide, trône dans le centre de la pièce. Le drapeau libanais est hissé à gauche et une gerbe de fleurs posée sur le sol. Un texte met en évidence son parcours, celui « d'un homme qui résume une nation ». « Pendant trente-trois ans, Ghazi a mené le combat sur sa chaise roulante », se rappelle son ami Fadel Tayyar. « La décoration que le président de la République, Michel Aoun, lui avait remise à titre posthume (insignes de la médaille d'argent du Mérite) est une reconnaissance de cette cause juste », insiste-t-il.

Les témoignages se succèdent. Se prononçant au nom de Sonia Eid, présidente du Comité des familles des Libanais détenus dans les prisons syriennes, Nathalie Lichaa Khoury affirme qu'avec sa disparition, « la voix des familles n'est plus entendue ». « Avec ta mort, les détenus ont perdu un militant, un héros, un homme tenace qui ne cessait de réclamer leur libération, ajoute-t-elle. Les familles ont perdu un ami honnête, un frère fidèle et aimant qui a porté leur cause. »

La loi en passe d'être votée ?

« On ne peut compenser la perte de Ghazi qu'en poursuivant son combat, insiste de son côté Hikmat Dib. Le cadeau qu'on peut lui faire, c'est d'œuvrer à faire voter la loi pour la formation d'une commission nationale pour les victimes de disparition forcée en Syrie et les disparus au Liban. » Il précise dans ce cadre que ledit projet de loi « a déjà été approuvé par la commission parlementaire des Droits de l'homme et celle de l'Administration et de la Justice ». Il doit encore être voté en séance plénière.

May Abi Akl, ancienne journaliste à an-Nahar, est l'une des rares professionnels du milieu qui ont accompagné Ghazi Aad depuis le début de son combat. « C'était dans le milieu des années 1990, lorsqu'il avait appelé à une conférence de presse pour lancer un rapport sur la torture et la réclamation de la libération des détenus libanais dans les prisons syriennes, se souvient-elle. Habib Younès et moi étions les seuls journalistes à répondre présent à l'appel. » S'attardant sur les principales phases de ce combat mené pendant plus de vingt ans, elle confie que Ghazi Aad lui a appris « la patience et la persévérance ».

Gaby Mrad est l'un de ces jeunes qui ont connu Ghazi Aad alors qu'ils étaient encore sur les bancs universitaires et décidé de mener le combat à ses côtés. C'est sur ces moments qu'il s'est penché. Quant à Samir Nasr, il s'est attardé sur les combats menés dans les rangs du Tanzim.

Pour Ghassan Moukheiber, Ghazi Aad « était l'image de la cause qu'il portait ». « Notre devoir envers les générations nouvelles, c'est de leur apprendre qui était cet homme, avance-t-il. C'était un symbole de courage qui n'avait pas peur d'aborder des sujets tabous, qui a porté l'étendard d'une cause noble, sans qu'il n'ait un proche détenu en Syrie. (...) Il a eu le courage de mettre sa main dans celle de Wadad Halaouani pour transposer la cause à celle des tous les disparus du Liban. » Et de marteler : « La mort de Ghazi ne va pas nous arrêter. Nous poursuivrons son combat jusqu'à ce que le sort de toutes les personnes victimes de disparition forcée soit dévoilé. »

Jihad Aad a conclu la rencontre en évoquant un frère qui était à la fois « un père et un ami », un homme qui, « vingt-six ans durant, s'est sacrifié pour la cause » et qui « m'a appris à être courageux et à militer en faveur de la vérité ».

Devant la tente du « sit-in »

Parallèlement à la messe, dans le jardin Gibran Khalil Gibran, au centre-ville de Beyrouth, le Comité des familles des disparus et kidnappés au Liban a organisé un rassemblement devant la tente du sit-in, symbole de la résistance des familles. Au coucher du soleil, plusieurs dizaines de bougies ont été allumées en hommage à celui qui ne les a jamais lâchés, jusqu'à son dernier souffle.

Les familles lui ont fait part des avancées notées dans le dossier (signature de la pétition pour la formation de la commission nationale et la banque d'ADN) et lui ont dédié la chanson La dalayt wla falayt (Tu n'es ni resté ni parti), lancée à l'occasion de la Journée mondiale des disparus.

Dans une allocution, Wadad Halaouani, présidente du Comité des familles des disparus et kidnappés au Liban, a rendu hommage à un homme « courageux » qui, malgré son handicap, a fait parvenir la cause des disparus devant les instances internationales. « Nous sommes venus te dire que la vraie décoration qui couronnera ton combat sera le jour où l'engagement fait par le chef de l'État de résoudre le dossier des victimes de disparition forcée sera concrétisé », insiste-t-elle.

Près d'une heure plus tard, les familles se sont dispersées, en renouvelant leur engagement à poursuivre le combat jusqu'à ce que la lumière soit faite sur le sort des disparus...

 

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