Après l'annonce surprise, samedi midi depuis Riyad, par le Premier ministre libanais, Saad Hariri, de sa démission, plusieurs représentants de la scène politique libanaise ont réagi, entre dénonciation et compréhension.
Dans une première réaction de Baabda, la présidence de la République a annoncé que le chef de l'Etat, Michel Aoun, a reçu un appel téléphonique de la part de M. Hariri qui l'a informé de sa démission. M. Aoun attend le retour de M. Hariri au Liban afin d'évoquer avec lui les circonstances de sa démission pour en tirer les conséquences, ajoute le communiqué de la présidence.
Il n'était toujours pas clair, hier, si Saad Hariri compte rentrer au Liban.
Dans un commentaire à chaud à L'Orient-Le Jour, le chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, a, lui, jugé que "ce n'est pas le moment pour Saad Hariri de démissionner, cela va avoir des répercussions graves sur l'économie libanaise et sur le Liban. Saad Hariri avait dit que l'objectif de son gouvernement était d'assurer la stabilité du pays, et aujourd'hui, c'est cette stabilité qui doit primer".
"C'est honteux. Saad Hariri doit se respecter et respecter le Liban. C'est honteux qu'il ait présenté sa démission à Riyad et pas à Beyrouth." C'est en ces termes virulents qu'une source proche du 8 Mars a, de son côté, commenté à chaud la démission du Premier ministre. "Nous sommes patients et raisonnables, mais il y a des limites. Ils nous accusent d'être liés à l'Iran, mais l'Iran n'a jamais dicté au Liban ce qu'il doit faire ou pas", a tonné cette source qui a requis l'anonymat.
Un cadre des Forces libanaises a indiqué à L'Orient-Le Jour que la décision prise par le Premier ministre n'est que "le résultat normal de l'abandon de la politique de distanciation du Liban par rapport aux conflits des axes". "C'est pour cela que nous voulions sortir du gouvernement dans une phase précédente", rappelle-t-il. Selon lui, une chose est sûre : "la cohabitation avec le Hezbollah est désormais impossible".
Pour sa part, le chef du Courant patriotique libre, également ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, a affirmé samedi soir, lors d'un dîner du CPL à Koura, que le Liban "surmontera cette crise". "Tous les Libanais ont été surpris par ce qui s'est passé, a déclaré M. Bassil. Au niveau personnel et national, il y a de la tristesse par rapport à cette démission qui intervient au moment où le gouvernement est à son apogée". "Mais comme nous l'avons dit par le passé, certains sont dérangés par l'accord entre le président Michel Aoun et le Premier ministre, a-t-il ajouté. Nous ne savons pas ce qui s'est passé, mais nous avons l'impression qu'à chaque fois que Daech recule il y a une tentative de recréer un équilibre". "Le Liban surmontera cette crise comme il en a surmonté d'autres", a-t-il néanmoins assuré.
"Nous dépasserons la crise avec la sagesse nécessaire afin de répondre aux préoccupations de tous, a-t-il encore dit. Nous devons savoir que le pays est fort par son président et ses institutions, son armée et sa livre".
Le député Boutros Harb a, pour sa part, déclaré que la démission du Premier ministre est "une surprise pour les Libanais et le monde par son timing et par le lieu d'où elle a été annoncée". Selon M. Harb, cette démission "va créer une tension politique en raison de la rupture de l'accord qui a permis la formation du gouvernement fin 2016". "Il ne nous reste plus qu'à travailler ensemble pour éviter l'impact dangereux que (la démission) peut avoir sur le Liban", a ajouté M. Harb.
Le ministre sortant de l'Education, Marwan Hamadé, a pour sa part affirmé qu'il s'attendait "à cette issue en raison des pressions qu'a subies M. Hariri depuis la conclusion de l'accord".
Le chef chrétien du Liban-Nord, Sleiman Frangié, a indiqué, pour sa part, ne pas connaître les raisons qui ont poussé Saad Hariri à la démission. "Nous n'accepterons pas cependant un Premier ministre qui défierait la composante sunnite et ne bénéficierait pas d'un consentement national", a-t-il averti.
L'ancien Premier ministre, Nagib Mikati, a, lui, souhaité que la "crise passe" et que "le Liban renforce son unité et son arabité".
Le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, a de son côté assuré que "l'économie libanaise et la livre ne sont pas en danger" après la démission de M. Hariri.
En Iran, le ministère iranien des Affaires étrangères a affirmé "regretter" la démission de Saad Hariri, tout en rejetant ses "accusations sans fondement" contre l'Iran. (Lire ici)
Vendredi, Ali Akbar Wilayati, conseiller diplomatique du guide suprême iranien, Ali Khamenei, était en déplacement à Beyrouth. A l'issue d'un entretien avec Saad Hariri, le responsable iranien avait rendu un vibrant hommage à ce dernier et avait loué le gouvernement libanais car regroupant les coalitions adverses du 8 et du 14 Mars.
Depuis plusieurs jours, le ministre d'État saoudien pour les Affaires du Golfe, Thamer el-Sabhane, tenait des propos virulents à l'encontre de l'Iran et du Hezbollah. Il avait ainsi appelé le gouvernement libanais à exercer sa pression sur le parti chiite. Thamer el-Sabhane avait également lancé : "Ceux qui croient que mes tweets représentent mon propre point de vue se font des illusions. Ils verront dans les prochains jours ce qui va se passer. Quelque chose d'extraordinaire va se produire."
En annonçant sa démission, samedi, Saad Hariri a dit redouter que l'on attente à sa vie et a accusé l'Iran et le Hezbollah de semer la discorde dans le monde arabe.
Saad Hariri avait rencontré lundi à Riyad le prince héritier d'Arabie, Mohammad Ben Salmane, et avait affirmé être totalement en phase avec Riyad pour ce qui a trait à la stabilité du Liban. Saad Hariri avait également été reçu le lendemain par Thamer el-Sabhane.
Dans une première réaction de Baabda, la présidence de la République a annoncé que le chef de l'Etat, Michel Aoun, a reçu un appel téléphonique de la part de...
commentaires (5)
Monsieur Walid Joumblatt, actuellement l'économie libanaise est des plus florissantes...n'est-ce pas ! Alors...de quoi avez-vous peur ? Irène Saïd
Irene Said
10 h 05, le 05 novembre 2017