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L'exode des Rohingyas de Birmanie : une tragédie qui se répète

Retour à deux drames qui ont touché cette minorité musulmane en 1978 et 1991 : des persécutions sanglantes, une fuite massive, un exil dramatique avant un retour compliqué.

Des réfugiés rohingyas se rendant, le 15 septembre 2017, vers un poste-frontière entre la Birmanie et le Bangladesh où ils fuient l'armée birmane. REUTERS/Danish Siddiqui

La fuite d'un demi-million de Rohingyas vers le Bangladesh, chassés par les violences de l'armée birmane, rappelle les deux précédents exodes de cette minorité musulmane, en 1978 et 1991, mais les dépasse par son ampleur. Ces deux drames, selon les dépêches de l'AFP de l'époque, se sont déroulés selon un scénario similaire : des persécutions sanglantes, une fuite massive, un exil dramatique avant un retour compliqué.

 

Campagne de répression en 1978

 

Au printemps, quelque 200 000 Rohingyas, en majorité des femmes, vieillards et enfants trouvent refuge au Bangladesh. Ils fuient le nord de la province d'Arakan (actuel Etat Rakhine) dans l'ouest birman où ils sont établis, certains depuis plusieurs générations.

Une vaste opération de contrôle d'identité des musulmans, lancée quelques semaines plus tôt par le pouvoir militaire birman, avait tourné à la campagne de répression.
Les Rohingyas sont considérés comme des immigrants illégaux en Birmanie à majorité bouddhiste où ils sont dénommés "Bengalis".

Le drame se noue à l'abri des caméras dans ce qui est alors l'un des pays les plus fermés au monde.
L'AFP rapporte des témoignages recueillis par les autorités du Bangladesh faisant état de viols et de tortures.

 

(Lire aussi : Dans les camps rohingyas, la quête de familles d'enfants perdus)



Le 6 mai 1978, le ministre des Affaires étrangères de ce pays "a précisé que plus de 70 000 ressortissants birmans avaient été expulsés de leur pays et s'étaient réfugiés au Bangladesh pour échapper aux +atrocités+ commises contre cette minorité ethnique".

Pour les autorités birmanes, ces départs massifs sont à mettre sur le compte de "la peur et l'ignorance" entretenues par des leaders religieux auprès de la population.

Les treize camps de fortune installés près de la ville portuaire de Cox's Bazar, dans le sud-est du Bangladesh, sont vite débordés.

En juillet, à l'issue de difficiles négociations, un accord est trouvé entre Dacca et Rangoun sur le rapatriement des réfugiés. Mais sa mise en œuvre est ralentie par les stricts critères imposés par la Birmanie qui ont pour conséquence de séparer les familles. Effectué sous la supervision du Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR), le retour des Rohingyas ne s'achèvera qu'en décembre 1979.

Selon le HCR, plus de 10 000 réfugiés Rohingyas dont près de 6 750 enfants sont morts durant leur exode. L'agence de l'ONU mettra en cause le gouvernement du Bangladesh, accusé d'avoir "créé une famine artificiellement". La malnutrition aggravée par une épidémie de rougeole a fait des ravages.

 

(Lire aussi : Risques sanitaires : « Le temps presse »)

 

 

Nouvelles persécutions en 1991 


La situation des Rohingyas n'a cessé de se dégrader. En 1982, la promulgation d'une loi sur la nationalité les a laissés apatrides.

Au printemps 1991, une nouvelle campagne de répression à l'encontre des musulmans est lancée alors que la junte au pouvoir est aux prises avec des manifestations violentes notamment de moines et d'étudiants. De leur côté, les Rohingyas ont engagé une épreuve de force avec Rangoun pour obtenir leur autonomie au sein de la fédération birmane.

Dans une dépêche de l'AFP datée de décembre 1991, le chef des réfugiés musulmans au Bangladesh Mohammad Yunus dénonce des cas de "torture, de viol, d'assassinat, de pillage et de destruction de villages" dans la province d'Arakan.

 

(Pour mémoire : Les Rohingyas plus que jamais menacés)

 

Fuyant les persécutions de la junte militaire, des dizaines de milliers de musulmans vont affluer durant des mois dans la région de Cox's Bazar.

Dans les camps ouverts par les autorités de Rangoun à la frontière avec le Bangladesh, la situation est tout aussi dramatique. En janvier 1992, plusieurs centaines -de 500 à 700 selon les témoignages- de Rohingyas meurent asphyxiés tant les camps sont surpeuplés.

En avril 1992, relate l'AFP, dans une lettre transmise en secret à des diplomates en visite en Arakan, des Rohingyas racontent être forcés à travailler comme porteurs sous peine d'être exécutés par les soldats birmans. Les musulmans sont "traités comme des animaux par les soldats", sont systématiquement chassés de leurs terres qui sont ensuite confiées à des bouddhistes.

Cette visite en Arakan, organisée par la junte, a tourné au fiasco lorsque des officiers des renseignements militaires birmans, habillés en civil, ont entrepris de tabasser des villageois qui tentaient de parler aux visiteurs.

Alors que les conditions de leur rapatriement font l'objet d'âpres discussions entre Dacca et Rangoun, des manifestations de Rohingyas opposés à leur rapatriement éclatent.

En 1991-1992, entre 250 000 et 280 000 Rohingyas ont connu l'exode. Certains sont ensuite rentrés en Birmanie, poussés dehors par Dacca. Le HCR doute du "caractère volontaire" de ces retours.

 

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