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Moyen Orient et Monde - Proche-Orient

Kushner rencontre Netanyahu puis Abbas sur fond de pessimisme accru

Un nouveau coup d'épée dans l'eau ? Des émissaires américains conduits par le gendre de Donald Trump ont rencontré hier les dirigeants israéliens et palestiniens, tentant de sortir le processus de paix de l'ornière. Après une première visite officielle auprès de Benjamin Netanyahu et Mahmoud Abbas le 21 juin dernier, le proche conseiller du président américain sur le dossier du conflit israélo-palestinien, Jared Kushner, s'est rendu à Tel-Aviv puis à Ramallah, accompagné par Jason Greenblatt, représentant spécial pour les négociations internationales, et Dina Powell, conseillère adjointe à la Sécurité nationale américaine. Donald Trump « est déterminé à parvenir à une solution qui apportera la prospérité et la paix à tout le monde dans cette zone », a dit Jared Kushner au début de ses entretiens avec le Premier ministre israélien à Tel-Aviv, selon une vidéo diffusée par l'ambassade des États-Unis. Au-delà des déclarations d'intention, M. Kushner et sa délégation sont très loin de mettre des mots sur l'accord « ultime » promis par le président américain. Les discussions étant suspendues depuis 2014, la tâche paraît extrêmement ardue pour la délégation américaine. À l'issue de l'entretien, le bureau de Benjamin Netanyahu a qualifié les discussions de « constructives et substantielles » sans autre détail, indiquant qu'elles allaient se poursuivre « dans les prochaines semaines » et remerciant le président Trump « pour son ferme soutien à Israël ».

À plusieurs reprises, le président américain a laissé entendre que son gendre, qui n'a aucune expérience diplomatique, était le mieux placé pour trouver une issue au conflit israélo-palestinien. « Toute ma vie, j'ai entendu dire que c'était l'accord le plus difficile du monde à obtenir. Mais j'ai le sentiment que Jared va faire un travail fantastique », affirmait-il en janvier. Mais la publication, en début du mois, d'un enregistrement explicite, a « disqualifié » le gendre de Donald Trump auprès de certains dirigeants palestiniens. Ce dernier estimait qu'il n'y a « peut-être pas de solution » au conflit. Même si cela prendra du temps ainsi que « des hauts et des bas », œuvrer à un accord demeure « une des premières priorités » de M. Trump, qui reste « optimiste », a indiqué à l'AFP un responsable de la Maison-Blanche sous le couvert de l'anonymat.

 

(Lire aussi : Proche-Orient : Erdogan et le roi de Jordanie veulent des négociations "sérieuses")

 

 

« Décisions difficiles »
La première rencontre en juin dernier avait permis de conforter les positions de Washington auprès de son allié israélien, mais n'avait, en revanche, pas fait bouger d'un pouce les discussions auprès de leurs interlocuteurs palestiniens. Donald Trump avait alors appelé Israéliens et Palestiniens à prendre des « décisions difficiles » pour la paix, sans pour autant expliciter la façon dont il entendait s'y prendre pour obtenir ce qu'il avait alors appelé l'accord « ultime ». « Je ne vois pas bien ce que l'administration américaine en l'état va sauver ou régler », s'interroge Sébastien Boussois, chercheur spécialiste du Moyen-Orient associé à l'ULB (Bruxelles) et l'OMAN (Montréal). Le gouvernement israélien de droite et d'extrême droite, selon l'expert, n'est prêt à aucune concession. « Même si Netanyahu est fragilisé notamment par de grands changements à la tête du Parti travailliste avec l'arrivée d'Avi Gabbay (élu le 10 juillet dernier), il a le soutien tacite des États-Unis depuis l'arrivée de Trump », rappelle le chercheur.

Les dirigeants palestiniens, qui voient chaque jour s'éloigner davantage la perspective d'un État indépendant, cachent de moins en moins leur frustration vis-à-vis de l'administration Trump. Certains responsables avaient notamment laissé entendre que les émissaires américains avaient davantage l'air « de conseillers de Netanyahu » que « d'arbitres justes ».

Accusé de rester inactif face à la politique de colonisation israélienne en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, menée par le gouvernement Netanyahu, Washington devra notamment démontrer un engagement clair en faveur de la création d'un État palestinien. « Le processus de paix n'avancera pas sans engagement américain à soutenir une solution à la question palestinienne », avait affirmé le roi Abdallah II de Jordanie lors de sa visite le 7 août dernier en Cisjordanie occupée auprès du chef de l'Autorité palestinienne.

L'administration s'est gardée jusqu'alors de soutenir la solution à deux États, c'est-à-dire la création d'un État palestinien coexistant avec Israël. M. Trump a même semblé prendre ses distances avec ce principe de référence de la communauté internationale. Quant à la colonisation, pourtant considérée par la communauté internationale comme illégale et faisant obstacle à la paix, M. Trump s'est contenté d'un succinct appel à « la retenue ». Sans « une réponse franche et claire » sur ces questions, les Palestiniens n'attendent « pas grand-chose de cette administration », a dit à l'AFP Ahmad Majdalani, un proche de Mahmoud Abbas.

 

(Lire aussi : Des ministres arabes appellent Washington à intensifier ses efforts pour la paix au Proche-Orient)

 

 

Dissolution de l'Autorité palestinienne ?
« Trump parle de moins en moins d'État palestinien. Il est clair que le processus est à l'arrêt et que le contexte de statu quo est parfait pour Israël, et indirectement pour l'Autorité palestinienne », estime Sébastien Boussois. « Cela évite à Abbas de précipiter d'éventuelles élections, donnant l'impression de contrôler la situation », poursuit le chercheur. La direction palestinienne a une nouvelle fois brandi le spectre de la dissolution de l'Autorité, censé préfigurer un État indépendant. « En réalité, pour de plus en plus de Palestiniens, l'Autorité est le symbole de la défaite, de l'impossibilité de la paix, avec notamment sa collaboration avec Israël en matière de sécurité depuis les accords d'Oslo », affirme M. Boussois. Dans l'esprit des Palestiniens, en cas de dissolution de l'Autorité, il reviendrait à Israël en tant que force occupante de prendre en charge les services aux Palestiniens, comme l'éducation ou la santé. « Dissoudre l'Autorité palestinienne ? C'est brandir une menace qui ne provoquerait que l'occasion pour le Hamas de ressurgir plus ouvertement en Cisjordanie, en accusant Ramallah de tous les maux et notamment d'avoir mené à cette impasse », conclut le chercheur.

Après avoir rencontré des responsables saoudiens, émiratis, qataris, jordaniens et égyptiens, puis israéliens, la délégation américaine a été reçue hier soir par le chef de l'Autorité palestinienne à Ramallah. « Les Palestiniens apprécient les efforts diplomatiques de Donald Trump », a déclaré Mahmoud Abbas à l'issue de la rencontre. « Nous confirmons que cette délégation travaille pour la paix et nous sommes avec elle pour parvenir à ce que le président Trump appelle "un accord de paix". Nous savons que les choses sont difficiles, mais il n'y a rien d'impossible », a-t-il affirmé.

 

 

 

Pour mémoire

 

Abdallah à la rescousse de Abbas à Ramallah

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