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Moyen Orient et Monde - Décryptage

Au Yémen, les belligérants jettent l’ancre en mer Rouge

La présence de mines à proximité du détroit de Bab el-Mandeb menace directement la sécurité des navires commerciaux et militaires.

L’USS Mason, l’un des navires visés par des tirs de missiles le long des côtes du Yémen (photographié en septembre). Photo AFP

« Contrôler Mokha ou les détroits ne va pas résoudre cette guerre d'usure », prévient d'entrée de jeu Popp Roland, chercheur au Center for Security Studies de Zurich, interrogé par L'Orient-Le Jour. Depuis le début de la bataille pour le contrôle des ports du littoral ouest du Yémen, amorcée par les forces gouvernementales fin décembre 2016, le théâtre des affrontements se dirige dangereusement vers les eaux de la mer Rouge, et plus particulièrement vers le détroit de Bab el-Mandeb. Afin de reprendre les ports de Mokha, Hodeida et Midi situés sur la bande côtière, la coalition arabe, menée par l'Arabie saoudite, a lancé une offensive sur l'ouest du Yémen le 7 janvier. Jusqu'ici, seul le port de Mokha a été entièrement repris aux rebelles par les forces loyales au président Hadi, le 10 février.

 

(Pour mémoire : Les Comités de la résistance populaire à la rescousse de l'État yéménite)

 

La bataille pour la ville portuaire de Mokha a laissé planer des menaces dans les eaux très fréquentées de la mer Rouge et du détroit de Bab el-Mandeb. L'Office of Naval Intelligence a tiré la sonnette d'alarme le 6 mars au sujet de la présence de mines marines « à l'entrée du port Mokha » (situé à 70 kilomètres au nord du détroit qui sépare le Yémen de Djibouti), dans une information rapportée par Reuters. Les inquiétudes se sont confirmées vendredi. Selon une source militaire yéménite, un navire militaire a été frappé par une mine navale, tuant deux gardes-côtes yéménites et faisant 8 blessés. « Il semble que le mouillage des mines faisait partie de la bataille de Mokha, en février », conclut Popp Roland.

Assumant son rôle de gardien des mers dans un contexte de haute tension, l'US Navy avait assuré déployer les efforts nécessaires pour protéger le détroit et les navires qui y transitent de ces mines avant l'incident. Sans succès. L'administration maritime américaine avait pointé du doigt la responsabilité des rebelles houthis, alliés aux partisans de l'ancien président Ali Abdallah Saleh et supposément appuyés par le grand rival chiite de l'Arabie saoudite, l'Iran.
Ce point névralgique du commerce mondial assure l'approvisionnement énergétique de l'Europe et des États-Unis notamment. Selon les données de l'Energy Information Administration américaine, 3,8 millions de barils de pétrole brut et raffiné ont transité par ce détroit chaque jour, en 2013. Une collision avec l'un des soixante navires commerciaux qui traversent quotidiennement le détroit risquerait de provoquer une nouvelle escalade dans le conflit.

 

(Lire aussi : "La pire crise humanitaire depuis la fin de la Seconde guerre mondiale")

 

« Faire payer à l'Arabie saoudite son intervention militaire »
Les tensions en mer entre la coalition arabe, appuyée par les États-Unis, et les rebelles sont montées d'un cran depuis les attaques perpétrées contre des navires de la coalition arabe et l'US Navy. Un navire de guerre émirati a été attaqué en octobre 2016 par les rebelles, au moyen d'un missile antinavire, selon des experts. Des navires américain et saoudien ont par la suite été pris pour cible, les rebelles houthis niant toute implication dans ces provocations. « La guerre s'est poursuivie dans l'environnement maritime depuis octobre 2016 », souligne à L'OLJ Alexander Farrow de la Maritime Asset Security and Training. Cette riposte aux allures de bataille navale cherche à « faire payer à l'Arabie saoudite son intervention militaire au Yémen et à la contraindre de négocier une solution au conflit », analyse Popp Roland.

En attirant l'attention sur le détroit, passage obligé pour acheminer l'aide humanitaire, les rebelles dénoncent les raids aériens dévastateurs et « les conséquences humanitaires sévères du blocus », a-t-il ajouté. Depuis mars 2015, la coalition dirigée par l'Arabie saoudite a imposé un blocus aux zones sous le contrôle des rebelles houthis et des forces loyales à l'ancien président Ali Abdallah Saleh. Cette zone s'étend aujourd'hui de la capitale Sanaa au secteur nord de la mer Rouge. L'acheminement de cette aide est devenu primordial pour une population touchée à 80 % par la malnutrition. « Cela exige que toutes les parties cessent de créer des obstacles afin que les livraisons puissent reprendre », a prévenu le 1er mars Stephen O'Brien, secrétaire général adjoint des Nations unies aux Affaires humanitaires. La demande de Stephen O'Brien est indubitablement restée lettre morte.

 

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