« C'est de la merde, cette campagne ! » Ce dimanche matin sur le marché, les passants, le regard oblique et la bouche torve, commentaient la campagne. Tel le célèbre chroniqueur gastronomique Jean-Pierre Coffe, ils cambronisaient.
À quelques semaines du premier tour, on aurait pu enfin espérer aborder l'essentiel: le programme des candidats. Je rêvais d'être votre « stabilosophe » du lundi surlignant le quotidien passé... Et patatras, hier matin, les lecteurs de la presse dominicale ont juste pu apprécier que la campagne avait atteint son meilleur niveau. Le célèbre caniveau. Le Journal du dimanche titrait: « Qui a payé les costumes de François Fillon ? »
Depuis son ascension à la primaire, François Fillon vit une véritable descente aux enfers. Pour ceux qui viennent tout juste de revenir de Mars, on peut rappeler que le candidat de la droite et du centre est empêtré dans l'affaire des emplois de collaboratrice de son épouse, sous la menace d'une mise en examen pour détournement de fonds publics et recel d'abus de biens sociaux, ainsi que manquement à l'obligation de déclaration à la haute autorité pour la transparence de la vie publique – pour un prêt de 50 000 euros non déclaré obtenu de son ami Marc Ladreit de Lacharrière. Et maintenant les mystérieux paiements de ses costumes...
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Alors, qu'écrire dans ces colonnes ? Fallait-il adopter, comme certains, le point de vue de la mouche pour laquelle l'étron est la promesse d'un somptueux festin ou, comme d'autres, prendre un ton moralisateur et frôler la crise de nerfs ? Je sentais bien cette chronique sur le fil du dérisoire... Elle ne devait être Nylon. Ni court. Juste synthétique. Voire dorée sur Trench. Avoir de la tenue. De bonne facture. Ne pas être complétement cintrée même si cette campagne est folle. Aussi, avant de descendre à la mine, j'ai vérifié ma trousse: une pince à épilogue, un marteau-rieur et un fer à ressasser.
À la réflexion, même si 2017 n'est pas une année bitextiles, que l'on évoque les costumes de François Fillon n'est pas si idiot. Force est de reconnaître qu'il sait accommoder les vestes... Avec les apparatchiks du parti qui, eux, tournent les leurs plus vite qu'un battement de cils, Fillon propose du sur-mesure. Il se courbe, joue des arrondis et du qu'en-dira-t-on... Acculé, bon pied bon œil, il crie aux sandales, place du Trocadéro, un galuchat dans la gorge. Fillon se drape. Plisse. Et, en bon catholique... il sait aussi faire du prêtre à porter.
Tout cela pourrait être drôle s'il ne s'agissait pas de l'avenir de la France... En attendant, sans faire de plan sur la collerette, le 15 mars, face au juge Tournaire, François Fillon sera aux premières loges pour voir défiler son histoire et soigner sa ligne... de défense.
À l'approche du point final, j'ai aussi pensé que je risquais d'en froisser certains et de me faire tailler un costard avec cette chronique. C'est alors que Victor Hugo est venu frapper à mon écran pour me rappeler que même si « le calembour est la fiente de l'esprit qui vole bas (...), je l'honore toujours dans la proportion de ses mérites ».
* Frédéric Picard est rédacteur en chef du Figaro.fr
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commentaires (5)
MEME SI C,EST DU COMPLOT AVEC CETTE HISTOIRE EN PLUS LES CHANCES SONT TRES TRES MAIGRES !
LA LIBRE EXPRESSION
10 h 06, le 13 mars 2017