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Moyen Orient et Monde - Chronique / Sur un air de campagne

Colères françaises

Marine Le Pen lors d’un meeting hier à Lyon. Jess Pachoud/AFP

Chez ces gens-là, on ne pense pas, Monsieur... On ne pense pas, on prie. 1966, Jacques Brel interprète une chanson dont le thème est le désespoir d'un amour impossible. Entre le peuple et les politiques ? Pas vraiment. Mais, en 2017, ces mots pourraient être le refrain des électeurs français déçus. Faut-il, en effet, que nous ayons la « droite et la gauche les plus bêtes du monde », comme aurait pu le dire Guy Mollet, pour en arriver là ! Évidemment, après que Hollande eut fait descendre le cirque dans la rue, tout était possible. Tout devint donc possible.

François Fillon, l'Ulysse de la droite, ne tient plus qu'à un fil. Benoît Hamon, le magicien, fait apparaître le revenu universel et, dans le même temps, disparaître les éléphants du PS. Jean-Luc Mélenchon, le tribun virtuel, enflamme la Toile et s'hologrammise « dans un remake de Vas voir ailleurs si j'y suis. Emmanuel Macron, l'homme de drauche, fait miroiter un programme de goite pour tenter de ne pas trop être identifié à la politique impopulaire de Hollande, dont il a été un des ministres.

Bref, le spectacle offert de droite à gauche ne peut que dégoûter encore un peu plus des bataillons d'électeurs et les pousser dans les bras de... Marine Le Pen. Et ce, même si la patronne du Front national a aussi de bons gros ennuis judiciaires. L'affaire des emplois fictifs du Parlement européen, par exemple, aurait dû déclencher un Marinegate. Pfft... Rien qu'une légère brise. L'ouragan Penelope a éparpillé, façon puzzle, tout sur son passage.

Pire, quand les dirigeants du FN, pourtant emmêlés dans d'obscures affaires, crient "Tous pourris", on demeure bouche bée de voir les électeurs déboussolés applaudir, abandonner repères et convictions, et rejoindre les rangs frontistes. Ces électeurs désillusionnés par leur héros d'hier deviennent, comme par mithridatisation, insensibles aux polémiques et autres affaires qui touchent leur championne... C'est la grande transhumance. Le panurgisme. Le népotisme à l'extrême droite n'a, ainsi, plus la même définition. Le FN n'est plus le grand méchant loup. C'est absurde. Aberrant. Fou... Mais c'est ainsi. Au fil des décennies, le FN a réussi à s'imposer comme le réceptacle des colères françaises et se dirige, à pas de loup, vers la grille du 55, Faubourg Saint-Honoré, pour tirer la chevillette...

Nos politiques devraient relire Le petit chaperon rouge et plus prosaïquement analyser les sondages qui créditaient, la semaine dernière encore, la candidate FN d'une confortable avance sur Emmanuel Macron. En mai, l'éventuel choc Le Pen-Macron ne relève évidemment plus d'un simple constat arithmétique. Il traduit l'explosion du clivage politique français. Chez ces gens-là, on ne pense pas, Monsieur... que Marine Le Pen pourrait être présidente de la République. Mais à ce rythme, un jour, il sera trop tard pour penser. Il ne restera plus qu'à panser.

*Frédéric Picard est rédacteur en chef du Figaro.fr

 

 

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