Hello, y a quelqu’un ?

Est-ce que vous nous entendez? Hey, là-haut, toi, papa Noël, est-ce que tu m'entends ?
T'es censé venir ce soir, avec tes jouets par milliers. Est-ce que tu auras autre chose dans ta hotte ? Une surprise ? Des surprises ? Est-ce que tu entends mes/nos demandes ? Est-ce que tu pourrais faire quelque chose pour nous ici-bas ? Genre, nous apporter la paix ? Oui, on aimerait bien que tu nous inondes de bonheur, de calme, de prospérité.

Je te l'ai envoyée, pourtant, cette lettre. Il y a quelque temps déjà. Ma wishlist quoi, où je me prends pour Miss Liban. J'ai bien écrit en vrac : j'aimerais la paix dans le monde, la fin des souffrances, la sauvegarde de la planète, la relance économique, l'anéantissement de tous les intégrismes, la joie et le sourire des enfants, le retour chez eux de tous les exilés, la résolution de la crise des poubelles, la mort de la corruption... Et j'aimerais bien que ce soir tu ne fasses pas la sourde oreille.

J'aimerais aussi que tu dises à tous ceux que tu côtoies dans le ciel (tu sais, ces hommes à la barbe blanche) de se bouger un peu. Quels qu'ils soient. Dieux, prophètes, messies, archanges, saints : il est grand temps qu'ils s'activent. Peu importe la technique : un déluge, un tremblement de terre, une comète, le jugement avant-dernier (pour les salauds seulement), l'assèchement des puits de pétrole, le tonnerre et la foudre, l'invasion de sauterelles, la nuit qui s'abat, la potence, une épidémie de choléra, une bombe atomique là où il faut ; peu importe la politique tant qu'on a les moyens de rectifier le tir.

On aurait bien aimé quand même durant cette année qui vient de s'écouler avoir un peu plus de bonnes nouvelles. Juste un peu. Déjà vous avez commencé avec la mort de Bowie. Puis ceux qui ont suivi : Prince, Cohen, Alan Rickman, la Morgan et tous les autres. Ensuite, de faux espoirs en faux espoirs, vous nous avez bien trimballés : la fin du conflit syrien, la renaissance de la démocratie, des élections libres, un nouveau président, un climat plus sain, l'empathie des pays riches... Dans le genre désenchantement, on ne pouvait pas faire mieux.

Au lieu de ça, vous nous avez abreuvé d'horreurs, d'attentats, de folie, de massacres, de crimes contre l'humanité ; vous nous avez augmenté les températures, fait fondre la banquise, provoqué des ouragans, des tempêtes, des tremblements de terre, fait disparaître certains patrimoines de l'humanité, permis aux braconniers de mettre les girafes dans la (trop) longue liste des espèces en voie d'extinction ; vous nous avez fait marcher à reculons, laissé parvenir des tarés à la tête des grandes puissances, laissé des monstres gouverner, laissé un bourreau achever des enfants, laissé les riches s'enrichir, les pauvres s'appauvrir, laissé le monde partir en c***.

Au lieu de ça, vous vous la coulez douce. Et on se demande quand tout ça va s'arrêter. Pour moins que ça, vous avez fait embarquer Noé dans son arche, imposé les 7 plaies à l'Égypte. Pour moins que ça, vous avez détruit Sodome et Gomorrhe. Pour moins que ça... Vous laissez les uns tuer en vos noms et les autres déserter vos temples. Faut pas s'étonner ensuite que les gens n'y/ne croient plus.

Ni en vous ni au père Noël. Donc, ce soir, ce serait bien qu'il y ait un miracle. Un truc énorme. On se réveillerait demain matin avec un nouveau genre de cadeaux sous le sapin. Et on retrouverait foi – pas forcément en vous – mais en l'humanité. C'est naïf de croire que c'est possible. Ça fait bimbo écervelée qui se présente au concours de Miss California (au moins, elle, elle y croit) ; ça fait Petite fille aux allumettes qui parle aux étoiles ; ça fait romantic comedy mielleuse de séries B, chanson guimauve à la Jeane Manson, citation de Paulo Coelho sur Facebook... Et alors ? Ne dit-on pas que l'espoir fait vivre. Comme dirait Coluche, on compte sur vous. Sinon, laissez la place aux autres.