Russie: le pétrolier Rosneft fait condamner un média indépendant en justice

La justice russe a condamné lundi la holding RBK, l'un des rares médias réputés indépendants en Russie, à payer des dommages symboliques au pétrolier Rosneft pour atteinte à sa réputation, dernière procédure gagnée par le groupe ou son influent patron Igor Setchine.

Le géant semi-public des hydrocarbures reprochait à la holding un article publié en avril par son quotidien papier et cité ensuite sur sa chaîne de télévision. Les journalistes indiquaient que M. Setchine avait demandé au gouvernement de protéger Rosneft d'une éventuelle augmentation du capital du britannique BP dans son capital dans le cadre de sa privatisation partielle.

Reconnu coupable, RBK devra régler 390.000 roubles (6.000 euros au taux de lundi), une somme symbolique comparé aux 3,2 milliards de roubles (50 millions d'euros) réclamés et qui auraient pu causer sa fermeture. Il doit effacer de ses archives l'article incriminé et publier un démenti, ont rapporté les agences russes.
"Nous ne sommes pas satisfaits de cette décision, nous nous prononcerons sur un éventuel appel au vu du texte complet de la décision", a déclaré le directeur juridique de RBK Timofeï Chtcherbakov, cité par l'agence Interfax.
M. Setchine, l'un des proches les plus influents du président Vladimir Poutine, a attaqué de manière répétée ces derniers mois les médias.

En novembre, le quotidien financier libéral Vedomosti avait été condamné en appel à supprimer de ses archives un article affirmant qu'il faisait construire une maison estimée à plusieurs dizaines de millions de dollars dans un quartier cossu de Moscou.

En octobre, la justice a contraint le journal indépendant Novaïa Gazeta à effacer et démentir un article consacré à un yacht de luxe qu'aurait fréquenté de manière répétée la femme de M. Setchine.
Ce dernier, l'un des chefs de file du clan des "silovikis" composé d'anciens membres des services de sécurité au sein du pouvoir, s'est souvent opposé au gouvernement sur plusieurs dossiers, dont la privatisation du pétrolier Bachneft, vendu finalement à Rosneft malgré le désaccord initial de plusieurs responsables ministériels.

Ce dossier a été marqué par l'inculpation pour corruption du ministre de l'Economie d'alors Alexeï Oulioukaïev, interpellé dans les locaux de Rosneft pour avoir tenté d'extorquer des fonds au groupe en échange de son feu vert final.