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Culture - Planches

Le théâtre de l’espace

Hagop Der-Ghougassian propose une manière très personnelle de réinterpréter Claire et Solange Lemercier au Monnot*.

Léna Osseyran, Yara Zakhour et Tony Farah intérprétant «Les Autres bonnes», adaptation et mise en scène par Hagop Der Ghougassian.

Trois comédiens, trois personnages. Madame et ses deux bonnes, Claire et Solange Lemercier. Entre les trois s'installe un drame. D'amour, de haine, d'envie et de répulsion, de fidélité, de délation. Qui sont ces bonnes? Celles immortalisées par Jean Genet? Presque, pas loin. Elles sont Les Autres bonnes, nées de l'imagination de l'écrivain, poète et dramaturge français, mais adoptées par Hagop Der-Ghougassian. Le metteur en scène libanais s'est réapproprié le texte, l'a découpé, transformé, réécrit en arabe et en français en collaboration avec ses acteurs, pour proposer une manière d'interpréter les bonnes de la pièce de Genet. Une façon de jouer les personnages – par Léna Osseyran, Yara Zakhour et Tony Farah – plus qu'une adaptation de la pièce.

L'espace de la scène
Il y a donc trois comédiens, un homme et deux femmes, déjà sur scène lorsque le public entre dans la salle. Ils attendent, s'étirent, s'échauffent, se préparent. Le public est ainsi confronté d'emblée à la préparation et aux rituels des comédiens. Ces derniers changent de costumes et de rôles directement sous les yeux des spectateurs. De plus, comme un théâtre dans le théâtre, les personnages changent de rôles au cours de la pièce, amenant le comédien à jouer un personnage qui joue un autre personnage préexistant dans la pièce, une mise en abîme du comédien. Et comme «un comédien doit savoir tout jouer», y compris une femme pour un homme, c'est un homme qui joue madame, quand ce ne sont pas les bonnes... Pour aider le spectateur à suivre dans cet imbroglio, la musique (de Hrayr Kalemkerian) et les costumes (de Sarkis Assadourian) jouent un rôle important. Plus que pour accompagner ou participer à l'apparat, les deux viennent ici apporter de la structure et du sens à la pièce, en matérialisant ces changements par des transitions musicales
ou visuelles.
La pièce répond à un savant découpage de l'espace de la scène. Au centre, un grand carré tracé au sol symbolise la scène. Les costumes sont rangés sur le côté, légèrement en dehors de cet espace symbolique, comme des coulisses visibles. Pareil pour les miroirs situés au fond de la salle, plaçant les reflets des personnages en dehors de la scène. Devant, sur la droite, un petit carré à cheval avec la scène vient symboliser l'espace dédié aux castings et, sur la gauche, séparée de l'espace principal, mais reliée à lui par un trait, la didascalie, que le spectateur peut entendre comme un lecteur peut lire dans un livre. De formation cinématographique, Hagop Der-Ghougassian attache une grande importance au travail de l'espace. Par ce découpage, il met en scène le théâtre dans son intégralité. Même et surtout ce qui est habituellement caché au spectateur.
C'est la troisième interprétation issue des Bonnes de Genet pour celui qui travaille au théâtre Monnot depuis 1997, soit depuis son ouverture. Si elle lui apporte certaines satisfactions, il regrettera tout de même l'absence, pour des raisons de budget, du quatrième personnage, du quatrième comédien. Un personnage digital. Car pour nous donner cette vision globale du théâtre, des projections muettes, simultanées à la pièce, étaient prévues. Des projections des castings et des interviews des comédiens, et surtout une vue aérienne de la scène pour donner au spectateur une vision très concrète de ce découpage de l'espace si particulier.
Peut-être une prochaine fois, sûrement une prochaine fois, car il est fort à parier que d'autres projets de Hagop Der-Ghougassian verront le jour dans le futur, au théâtre Monnot ou ailleurs. En attendant, il reste aux curieux jusqu'au 14 novembre pour assister au spectacle de ces bonnes.

*Jusqu'au 14 novembre, à 19h30, du jeudi au dimanche, théâtre Monnot, Achrafieh.

Trois comédiens, trois personnages. Madame et ses deux bonnes, Claire et Solange Lemercier. Entre les trois s'installe un drame. D'amour, de haine, d'envie et de répulsion, de fidélité, de délation. Qui sont ces bonnes? Celles immortalisées par Jean Genet? Presque, pas loin. Elles sont Les Autres bonnes, nées de l'imagination de l'écrivain, poète et dramaturge français, mais adoptées...

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