L’aube doit être proche

Un hommage que l'on reçoit, c'est une occasion joyeuse, mais c'est aussi, par certains côtés, une occasion triste. Parce qu'on se souvient des rêves que l'on a eus : un pays libre, souverain et prospère ; une société juste, moderne et conquérante ; une civilisation qui renoue avec sa grandeur passée...
Au soir de notre vie, nous promenons notre regard autour de nous, et nous ne voyons rien qui ressemble à ce dont nous avions rêvé. Ni au Liban, ni dans le monde arabe, ni dans le reste de la planète. Pour ma part, je me sens chaque jour un peu plus éloigné des doctrines qui prévalent, et des querelles qu'elles suscitent.
C'est comme si je voyais deux ivrognes se disputer devant la porte de ma maison. Mon premier réflexe, c'est de les écarter l'un et l'autre pour pouvoir rentrer chez moi. Ensuite, je me ravise, je me dis que la rue est à eux, que la ville est à eux, et que c'est moi qui devrais partir.
Alors je m'en vais. Et je me console en me disant que si les ténèbres s'accumulent ainsi, c'est que l'aube doit être proche.