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Culture - Théâtre

Dans une cage, cinq folles (se) racontent

Cinq femmes, cinq destins et autant, sinon plus, de crises de nerfs. Normal, nous sommes chez le gynécologue ou plutôt au Metro Madina, enfermés dans le « Kafass » * de Joumana Haddad, pièce adaptée et mise en scène par Lina Abyad et produite par Nour Maatouk.

Joumana Haddad.

Le pitch ne brille pas par sa nouveauté, mais reste simple, affriolant et prometteur. Dans un cabinet de gynécologie, cinq femmes vident leur sac, en toute liberté. Partition usée pour propos désabusés ? Pas si sûr. Attendons de voir la pièce Kafass, écrite en 2014 par Joumana Haddad, adaptée et mise en scène par Lina Abyad et produite par Nour Maatouk au Metro Madina à partir du dimanche 4 septembre. Attendons d'écouter ce que ces femmes en pleine crise de nerfs ont à raconter. « Leurs histoires sortent tout droit de leur utérus », dit le communiqué. Elles les enfantent dans la douleur de vivre ? « Elles parlent, elles crient, elles rient, elles gémissent. Les récits se mêlent et l'on ne sait plus qui dit quoi. Laquelle d'entre elles regrette la perte de Naïm, un "bon parti" ? Laquelle s'est découvert un talent qu'elle fructifie depuis ses 16 printemps ? Qui se sent invisible? »

« Si cette pièce a vu le jour, c'est grâce à un effort conjugué de personnes formidables, affirme Joumana Haddad. Après que l'ONG March eut obtenu le feu vert de la Sûreté générale, j'ai rencontré la productrice Nour Maatouk qui m'a encouragée à poursuivre mon projet. J'ai alors envoyé le script, par mail, à Lina Abyad en lui demandant si elle aimerait le mettre en scène. J'ai toujours été une grande admiratrice de sa direction scénique mais aussi de sa personne en tant qu'intellectuelle engagée. Je croisais donc les doigts. La réponse ne s'est pas trop fait attendre. Deux jours et je recevais un oui ! »

 

(Pour mémoire : Ni sainte ni pute, juste une femme libre)

 

Quelques mois plus tard, le résultat est là, prêt à meubler les planches de l'intimiste salle du Metro. « Lina a réveillé les personnages et leur a insufflé la vie, indique l'auteure. Avec sa vision artistique unique, elle a ajouté une nouvelle dimension, nécessaire, au texte. La voir travailler avec les actrices et les acteurs était hypnotisant. Elle a également transformé la pièce en une comédie noire. Le public aura autant de moments de rires que d'émotion. S'il fallait changer quelque chose dans les propositions de Lina ? Rien, vraiment rien. »
La pièce parle, en partie, d'enfermement et de mise en cage. Si l'auteure – militante féministe, briseuse de tabous, infatigable propagandiste de la liberté sexuelle – devait mettre quelqu'un en cage, ce serait qui ? « Personne. La vie est une cage pour nous tous et c'est déjà beaucoup », dit-elle.

Le mariage est-il une cage dorée, alors ? « Non, je ne le pense pas. Cela dépend de la relation que le couple entretient. Dans ce sens-là, le célibat peut parfois ressembler à une cage. Et être en couple peut parfaitement nous émanciper en tant qu'êtres humains. Tout dépend des choix que l'on fait », note-t-elle. Mais alors le Kafass dont parle la pièce est une allusion à quoi? « Pas besoin de chercher longtemps pour trouver la cage qui emprisonne la femme arabe. Elle se trouve entre ses jambes. Il s'agit tout simplement de son vagin », rétorque l'auteure.

Ces cinq femmes arabes – Lama la vieille fille, Zeina la femme portant le niqab, Yara la lesbienne et Abir l'obèse –, réduites par la société à un état de femme objet ou d'objet sexuel, brisent les chaînes sur scène et lâchent leurs frustrations, leurs rages et leurs sarcasmes.
Au final, ce quintette à huis clos est-il une cage aux folles ? « La dramaturge et la metteure en scène sont toutes les deux fofolles. À votre avis ? » conclut, du tac au tac, Joumana Haddad.

 

*Au Metro Madina, Hamra, à partir du dimanche 4 septembre et jusqu'au 31 octobre, tous les dimanches et lundis soirs.

 

Fiche technique

Acteurs : Randa Kehdi, Marcel Abou Chakra, Darine Chamseddine, Dima el-Ansari et Mira Sidawi.
Costumes : Charbel Féghali.
Décor : Hana Fakhoury.
Design lumière : Ala' Minawi.
Son : Bassel Jawhari.
Assistants mise en scène : Hiba Sleyman et Mohammad Yassine.
Adaptation et mise en scène : Lina Abyad.

 

 

 

 

Pour mémoire
Liberté et guerre des sexes avec Joumana Haddad

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