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Culture - Scène

« Vitrine », ou le miroir du temps qui passe

« Vitrine » est une création théâtrale collective concoctée par l'auteur et metteur en scène Nehmé Nehmé ainsi que par les deux actrices  Julia Kassar et Aïda Sabra, et qui se poursuit jusqu'au 31 janvier au théâtre al-Madina tous les soirs à 20h30.

Julia Kassar et Aïda Sabra, un duo détonnant.

D'entrée de jeu, un film protecteur, un écran, voire une vitre séparent les spectateurs de la scène. D'entrée de jeu, le public comprend qu'il va assister à un jeu d'ombres, une mixture de réel et d'irréel, une métaphore de la vie, mais une métaphore filée puisqu'elle a lieu dans la rue qu'on devine à travers ses bruits, ses klaxons, son fourmillement et qui se poursuit juste là, dans le regard de ces deux mannequins vieillis et jaunis, enfermés dans cette vitrine.
Le lieu : un quartier, sans localisation précise. Les personnages : deux mannequins abandonnés à leur sort dans une boutique fermée et qui se débattent avec toutes sortes de falbalas tout en vidant leur sac sur une paire de chaussures. Témoins du temps qui passe, de la métamorphose de la cité (« les immeubles qui tombent », martèle  Kassar à plusieurs reprises), ces deux personnages ont aussi participé aux mouvements trépidant de la rue puisqu'ils ont été habillés, grimés et  même caressés, chouchoutés. Comme dans une pantomime, ces mannequins désarticulés, merveilleusement interprétés par Julia Kassar et Aïda Sabra, évoluent à pas saccadés dans cette vitrine qu'ils rêvent de quitter, sans savoir que leur univers s'arrête là.  Sorte de « Gelsominas » robotisées et sans âme, ils  rêvent de départs, de mer, de bruits joyeux du passé. Dans leurs grands yeux souillés par un maquillage outrancier, semblables aux clowns tristes ou à ces femmes felliniennes défraîchies et alourdies par un passé glorieux et moins glorieux, se devinent le désarroi, la tristesse, la mélancolie. Ils le savent bien. Ils n'iront pas loin, même s'ils feignent à tout moment de faire leur valise.

Nostalgie d'une rue
Dans une très bonne mise en scène signée Nehmé Nehmé, où les univers des marionnettes, du cirque et du septième art s'entremêlent, et sous un jeu de lumières habilement orchestré par David Habchi, Élias Maalouf et Mohammad Farhat, et un mixage vocal signé Crystal Franca, les deux actrices donnent le meilleur d'elles-mêmes et se surpassent. Elles sont uniques, doubles et multiples à la fois. Inertes comme des automates et tellement vivantes, elles portent à elles toutes seules une pièce au sujet difficile et à résonance pathétique. Tantôt on évoque la vieillesse, la mort, et tantôt l'enfermement et l'ennui.
Mais ces personnages sont aussi le reflet de tous les passants et de leur vie qu'ils vivront à travers ces saynètes  projetées sur scène. Un visuel  hallucinant qui finit par prendre en otage le public, cloîtré dans cette vitrine, l'air s'y fera néanmoins un peu lourd. Les phrases répétées, rabâchées, synchronisées tel un métronome sont  certes volontaires pour créer cette atmosphère de monde vieillissant, de fin d'époque et de nostalgie, voire d'étouffement. Né des multiples conversations entre le metteur en scène et les deux actrices, le texte finit malheureusement par tourner en rond et le rythme de la pièce par se perdre. Il n'est sauvé occasionnellement que par le jeu de ces deux grandes comédiennes qui offrent une prestation unique, justifiant le déplacement.
D'entrée de jeu, un film protecteur, un écran, voire une vitre séparent les spectateurs de la scène. D'entrée de jeu, le public comprend qu'il va assister à un jeu d'ombres, une mixture de réel et d'irréel, une métaphore de la vie, mais une métaphore filée puisqu'elle a lieu dans la rue qu'on devine à...

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