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Culture - Théâtre

Éric et Elrik sur scène, et le rien devient tout

Nommé 5 fois aux Molières 2004, « Des cailloux plein les poches »*, véritable succès international, est une pièce écrite par Marie Jones en 1996, et adaptée au théâtre en 2003 par Stephen Meldegg. Quand l'imaginaire transporte dans un univers où tragédie et burlesque se côtoient...

Éric Métayer et Elrik Thomas sont deux des enfants de la Lif (la Ligue d’improvisation française). Photo Alizée Chiappini

Dans un petit village, quelque part en Irlande, débarque une superproduction hollywoodienne pour le tournage d'un film à gros budget, un mélodrame folklorique et romantique. Un voyage de l'univers chimérique du cinéma américain à un monde rural aux repères et rêves abandonnés, où tous les habitants décrochent des rôles de figurants et participent à cette aventure rocambolesque. Deux comédiens, Éric Métayer, alias Charlie, et Elrik Thomas, alias Jake, endossent tous les rôles et campent seize caractères différents. Dans un décor minimaliste et des costumes inexistants, les deux acteurs se transforment tour à tour, changent de voix, de sexe, d'âge et de nationalité avec une dextérité, une agilité et une rapidité étonnantes, pour emmener le spectateur sur un terrain où seul l'imaginaire trouve sa place. Une expérience qui oscille entre mimes, sketches, et théâtre, où Charlie et Jake sont le cœur et l'âme d'un spectacle où tout est suggéré, et le rien devient un tout.

Rentabilité vs états d'âme
Dans ce comté irlandais où l'on espère et rêve encore, le mélodrame romantique filmé contraste avec le quotidien des habitants du village. Pour eux, participer à la grandeur hollywoodienne, c'est s'arracher à la misère. Mais le regard porté par Hollywood sur la communauté irlandaise s'oppose à la réalité culturelle de ce petit pays, et les producteurs américains n'ont qu'un seul souci : rentabiliser leur production au détriment des états d'âme des figurants. Les malentendus et les problèmes de communication se multiplient, pour conduire inéluctablement à une tragédie et à un choc de cultures où les valeurs de ces deux mondes vont s'affronter pour poser l'ultime équation : que doit-on abandonner pour vivre son rêve ?

Entrer dans le rêve
Éric Métayer et Elrik Thomas sont deux des enfants de la Lif (la Ligue d'improvisation française). Créée d'abord au Québec, elle se développe en France en 1981, et consiste à embarquer les comédiens et le public dans une expérience théâtrale qui pousse à la créativité et à la spontanéité. Formés à cette école, ils expliquent le fonctionnement de cette pièce qui exige beaucoup d'agilité et la participation du public dans un exercice d'imagination très important, un exercice qui fait la force du spectacle. Chaque spectateur pourra ainsi créer son propre personnage, soit en l'habillant d'une robe rouge avec un ruban dans les cheveux, ou d'une jupe à fleurs avec un chapeau de paille. Un changement de position, une intonation de voix, une démarche, suffiront à faire comprendre au public le passage d'un caractère à un autre. Les codes sont mis en place au début de la pièce et le spectateur ne tarde pas à retrouver les marques de son enfance, et cette faculté ludique de s'inventer un univers propre.

Plaisir rédempteur
Dans une performance réglée comme du papier à musique, les deux comédiens avouent partager une connivence du jeu, et la maîtrise du terrain du rien. Éric Métayer reconnaît se plaire dans ce style théâtral, et confie que c'est un genre que le cinéma ne battra jamais, parce que ses images restent figées sans laisser de place au rêve.
Les deux comédiens sont touchants à la manière de deux clowns, surprenants dans la confiance totale que chacun porte à l'autre. Elrik Thomas avoue: «Ensemble ou rien. » Éric Métayer ne craint, pour sa part, aucune fausse note. Les deux se rattrapent à la manière de deux plongeurs qui se passent le détendeur sans jamais céder à la panique. Pour eux, c'est un bonheur partagé, mais éprouvant, qui exige une forme physique et une détermination à aller jusqu'au bout, là où la complicité est porteuse de plaisir rédempteur.
Vivre sans jamais abandonner ses rêves et ces valeurs propres, un message porté sur scène par deux comédiens remarquables de drôlerie et d'humanisme.

*Des cailloux plein les poches, au Théâtre Monnot, les 23, 24, 25 et 26 juin. Persona Productions. Billets en vente dans toutes les branches de la Librairie Antoine.

 

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