J'avais 17 ans le jour où on m'a demandé de descendre du taxi. C'était le 12 mars 1985. J'avais quitté ma maison à Zghorta pour me rendre à Beyrouth. À ce moment-là, je ne savais pas que je ne la reverrai plus.
Je n'étais plus à l'école. Mon père était mort et je cherchais un travail pour aider ma mère et mes deux sœurs. Ça ne me dérangeait pas d'aider. J'ai souvent pris des emplois d'été et j'avais l'habitude d'aider avec les tâches ménagères. On me disait que j'étais mature pour mon âge. Mon plan était de terminer mes papiers pour rejoindre l'armée.
J'aimais rendre visite à ma sœur aînée, Lina, qui était mariée. Elle vivait à Amchit, un endroit calme et agréable, loin des tensions de la guerre. On avait l'habitude de se promener pendant des heures. On partageait des moments de complicité que seuls un frère et une sœur peuvent avoir. Pendant ces moments de confidences, je lui parlais de la fille que j'aimais.
Ma famille a passé des années à essayer de me retrouver. Après maintes recherches, elle a trouvé deux personnes qui prétendaient m'avoir vu dans une prison en Syrie.
Certains jours, ma famille a beaucoup de mal à parler de moi, mais elle continue à espérer qu'un jour, elle saura ce qui m'est arrivé.
J'avais 17 ans le jour où j'ai été enlevé.
Mon nom est Saïd Khabbaz. Ne laissez pas mon histoire s'interrompre ici.
* « Fus'hat amal » est une plateforme numérique qui rassemble les histoires des personnes disparues au Liban. Le projet est financé par le Comité international de la Croix-Rouge, l'Union européenne, le National Endowment for Democracy et la Fondation Robert Bosch.
Des histoires d'autres personnes ayant disparu durant la guerre sont disponibles sur le site Web de Fus'hat amal à l'adresse: www.fushatamal.org
Si vous êtes un proche d'une personne disparue, vous pouvez partager son histoire sur le site du projet ou contacter Act for the Disappeared aux 01/443104, 76/933306.