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Lifestyle - Tous les chats sont gris

Pourquoi aimons-nous tant les nuits de janvier ?

Éloge des nuits de janvier qui chassent les mauvais souvenirs de 2015 à grands jets d'eau de pluie et qui nous soumettent, une fois de plus, à nos rituels nocturnes que, tout compte fait, nous aimons tant.

Photo GK

Ce texte qui parle des nuits de janvier a failli s'intituler «Voilà, c'est fini...». Mais si la symbolique est agréable, avec clin d'œil au morceau de Jean-Louis Aubert qui brasse un spleen rose poudré, le sens est déficient. Ce titre aurait laissé entendre, justement, que le premier mois de l'année sonne le glas de quelque chose et devient alors synonyme de mise en berne, de mise en bière. Or à part la mise en terre de l'an écoulé, janvier a le goût revendiqué des débuts et des promesses, lance des idées pour l'avenir et se réjouit à l'idée de noircir des premières pages. Bien sûr, l'hiver a les tristesses qui conviennent pour faire de la traversée d'année en année un voyage lent et aigre-doux. La fin des fêtes y fait le bruit d'un tas de confettis craquant sous la botte et les mélancolies enfouies des départs se retournent comme des parapluies quand les jupes, elles, ne se troussent plus depuis bien longtemps.

Se la couler douce
Cela dit, les nuits de ce début de 2016 déblayent à grands jets de pluie grêlée les mauvais souvenirs de motos slalomeuses et de voitures péteuses. Tout comme la vacuité marchande du shopping nocturne qui prospère autant qu'il désespère, le consumérisme fatal qui nous tatoue des codes-barres sur le front et la fièvre acheteuse qui a le bon d'achat très Influenza. Tout ça, oui, est heureusement fini. À présent, les nuits de janvier seront le moment choisi pour se sevrer de cette compulsion d'achat, pour soigner les poches trouées ; pour recomposer la famille perdue de vue, exercer les corps fatigués et les cœurs marrons glacés; pour faire flamber la sociabilité abîmée par un trop-plein d'événements, dégrafer sa ceinture et s'avachir sur le canapé ; pour enfin exhumer tout ce que décembre a coulé par le fond. Mieux, ces soirs-là seront le temps de la réhabilitation du rêve sans objet, de l'ennui pluvieux, de la paresse pensive.

Délicieuse grippe
Et tant pis si la licorne virale, avec ses ailes rognées et son groin fouisseur, décide de célébrer la nouvelle année sur le dance floor de nos cellules, d'ailleurs comme celles de toute la population libanaise. Plus besoin de feindre les matins paupières en panne, réveils en rade. Il suffira de mettre le grappin sur cette angoisse qui monte en chantilly dans une société hypocondriaque, et en profiter. Oui, se vautrer dans le cocon douillet d'un peignoir avec une tisane détox entre les mains pommadées de liquide antibactérien, puis s'emparer de sa télécommande et passer la soirée à rattraper les épisodes manqués de nos séries préférées. Découvrir les miracles de Netflix pour les dévoreurs de films et choper ce soir le documentaire sur les cent visages de Bowie, entre deux poussées de fièvre et deux plongées dans un bouillon livré de chez maman. Dégringoler dans la douce déliquescence de l'enfance lorsque cette dernière fera une visite surprise à la fin de la nuit pour s'assurer que le frigo est plein, que tout est sous contrôle, accablée de médicaments et de compresses au vinaigre, agent secret prêt à faire crever celle qui nous fout la crève. Dormir, beaucoup dormir, retrouver des nuits complètes. Des choses simples que nous n'avions pas faites depuis des lustres faute de vouloir faire plaisir à la terre entière de passage à Beyrouth entre le 15 décembre et le 6 janvier.

Retrouver ses repères
Et puis il y a les autres. Les rescapés qui, dès ce soir, vont à nouveau s'asseoir dans ces bars et restaurants colorés et bigarrés, agités et chaloupés, et qui sont ce que nous avons de meilleur. Ils se surprendront à enlacer le bonheur simplet de retrouver des places dans leurs endroits fétiches, de pouvoir se blottir sous les chaufferettes des terrasses en tirant sur sa cigarette (électronique) et en fulminant en toute mauvaise foi, sans que le verre de Chianti ne mette toute la nuit à débarquer. Et voilà la nightlife en train de reconquérir ses piliers, entre biches à la bouche triplement piquée et barbiches soignées de hipsters pseudo-débraillés. Que tout le monde se retrouvera sous les néons brillants, se claquant des bises extatiques, des mots volleyés et de rires époumonés. Comme au lendemain des «grandes vacances» de notre enfance.

 

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