Lorsqu'en janvier 2015, le Hezbollah avait décidé de répondre au raid israélien à Quneitra qui avait fait 5 victimes parmi les siens (dont Jihad Imad Moghniyé), en plus d'un général iranien, il voulait essentiellement montrer aux Israéliens qu'ils ne peuvent plus lancer des attaques lorsqu'ils le jugent bon sans s'attendre à une riposte qui fasse mal. À cette époque-là, le Hezbollah avait donc choisi le lieu, la zone très surveillée des fermes de Chebaa, un territoire libanais occupé par les Israéliens et qui est aussi à proximité de la zone de contrôle de la Finul. L'opération minutieusement préparée avait fait 5 morts chez les soldats israéliens dont un officier, exactement le même nombre que les martyrs du Hezbollah, pour bien montrer que ce parti veut traiter les Israéliens d'égal à égal. Par le biais de cette riposte, le Hezbollah croyait avoir établi de nouvelles règles dissuasives. Mais l'assassinat de Samir el-Kantar dans une attaque contre son domicile à Jaramana, qui a aussi fait de nombreuses autres victimes parmi les habitants de l'immeuble et les compagnons de Kantar, a montré que les Israéliens ne respectent pas ces nouvelles règles et se croient libres d'attaquer lorsqu'ils le peuvent pour éliminer leurs ennemis potentiels.
Face à cette nouvelle donne, le Hezbollah ne pouvait donc que décider de riposter. Le secrétaire général du parti, sayyed Hassan Nasrallah, a donc choisi de prononcer deux discours à une semaine d'intervalle pour faire parvenir un message clair aux Israéliens : « Notre riposte est certaine. » Elle devrait même cette fois être encore plus précise que celle de janvier 2015, car le Hezbollah souhaite mettre un terme aux actions ciblées israéliennes. S'il ne ripostait pas efficacement à l'assassinat de Samir el-Kantar, les Israéliens pourraient continuer à cibler les chefs militaires lorsqu'ils en ont l'occasion (comme ils l'avaient aussi fait dans la banlieue sud contre un des chefs du mouvement, Ghaleb Awali) sans se sentir menacés. Or, c'est justement cette équation que le Hezbollah veut désormais changer.
Dans son dernier discours, Nasrallah a donc été très clair sur plusieurs points. Il a ainsi commencé par annoncer l'imminence de la riposte. Il a ensuite précisé que le Hezbollah se considère désormais libéré de toutes les lignes rouges tacitement établies. Ce qui signifie que sa réponse pourrait se produire dans un lieu inédit, jusque-là considéré comme faisant partie des régions mises à l'abri de la confrontation qui se poursuit depuis des années à la frontières libanaise. Il a ainsi laissé entendre qu'il n'y avait plus de contrainte géographique pour l'action du Hezbollah, comme cela avait été le cas en janvier 2015, lorsqu'il avait soigneusement choisi un territoire libanais occupé pour ne pas provoquer ensuite un tollé interne et international. Cette fois, du moins dans le second discours de Nasrallah, le Hezbollah a voulu montrer qu'il ne craint plus les condamnations et les critiques qui pleuvront forcément sur lui, tout comme il ne cède ni aux pressions ni aux menaces. Il vengera donc Samir el-Kantar dans une opération qui sera à la mesure de l'importance de ce dernier pour le mouvement, en tant que symbole de la résistance et en tant que chef sur le terrain.
À travers ces explications, Nasrallah a voulu montrer que cette fois, la riposte du Hezbollah devait faire encore plus mal aux Israéliens que celle de janvier 2015. Son objectif serait donc de dissuader effectivement les Israéliens de procéder à des assassinats ciblés des chefs de la résistance. Mais en même temps, le Hezbollah ne souhaite pas provoquer une nouvelle guerre israélo-libanaise, d'une part parce que, dans la tourmente actuelle, la région ne le supporterait pas, d'autre part parce que sa priorité aujourd'hui est à la lutte contre le terrorisme de Daech et de ses semblables. Un équilibre difficile à trouver, mais s'il faut en croire les propos de Nasrallah, l'opération a déjà été décidée et elle n'attend plus que le bon timing pour être exécutée. En effet, dans son dernier discours, Nasrallah a déclaré que la riposte est désormais entre « les mains de ceux qui sont responsables de la vie et du sang de leurs compagnons ».
Certaines sources qui se veulent bien informées évoquent une opération en Palestine occupée, par loyauté à la mémoire de Samir el-Kantar qui avait dédié sa vie à la lutte pour la libération de la Palestine. Mais il est clair qu'il ne faut pas s'attendre à la moindre confirmation de la part du Hezbollah. Ce dernier préfère maintenir le suspense, surtout qu'il considère que la guerre psychologique fait partie de la guerre tout court et en est même un élément important. Ce qui est sûr, c'est qu'à travers ses deux derniers discours, Nasrallah a remis la libération de la Palestine à l'ordre du jour, remettant au premier plan cette cause qui, au siècle dernier, rassemblait les Arabes. Il a ainsi réaffirmé que la confrontation principale reste avec l'ennemi israélien, la guerre contre Daech n'étant « qu'un affrontement annexe ». En même temps, Nasrallah a clairement déclaré qu'il n'est pas question de renoncer au projet de lancer un mouvement de résistance dans le Golan occupé, qui était la principale mission confiée à Samir el-Kantar. Les premiers résultats concrets de ce projet devraient commencer à se faire sentir au cours des prochains mois.
Pour mémoire
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commentaires (13)
JOHN WAYNE TIENT LA CARABINE DE LA VENGEANCE... BASS.. BIL MA2LOUB !
LA LIBRE EXPRESSION
14 h 39, le 02 janvier 2016