Rechercher
Rechercher

Économie - Focus

Le Japon au milieu du gué après trois ans sous la férule de Shinzo Abe

Même s'il parcourt le monde pour vanter les bienfaits de sa stratégie « abenomics », le Premier ministre japonais doit se rendre à l'évidence : l'archipel ne peut se targuer d'une croissance économique florissante cette année.

Le Premier ministre japonais Shinzo Abe peine à relever le pays de la triple catastrophe de mars 2011 – séisme, tsunami et accident nucléaire – dans laquelle il s’est retrouvé plongé. Toru Hanai/Reuters

La promesse était belle : restaurer la puissance économique et la fierté écornées du Japon. Trois ans après son retour au pouvoir, le Premier ministre Shinzo Abe est confronté à l'immensité de ses ambitions, et le temps presse.
Remis d'un éphémère et peu concluant passage à la tête de l'archipel en 2006-2007, M. Abe, 60 ans, est revenu aux commandes le 26 décembre 2012, combatif et ultradynamique. Cette fois, il brandit une recette censée insuffler une énergie nouvelle dans un pays affaibli par de longues années de déflation et un lent déclin de son rang international.
Le Japon évolue désormais dans l'ombre de la Chine, qui lui a ravi le titre de deuxième économie mondiale et dont l'emprise grandit en Asie. Il doit aussi se relever de la triple catastrophe de mars 2011 – séisme, tsunami et accident nucléaire.
Présent sur tous les fronts, le politicien nationaliste parcourt le monde, vantant les mérites de sa stratégie « abenomics ». « Je suis de retour, et le Japon aussi », lance-t-il aux États-Unis.
Les commentaires sont enthousiastes, tant en son pays qu'à l'étranger. La formule proposée combine de massifs plans de soutien, une politique monétaire ultra-accommodante de la Banque du Japon et des réformes structurelles.
Les débuts sont encourageants : la croissance revient, une année plus tard le dollar repasse au-dessus de 120 yens pour la première fois en plus de sept ans. Les firmes exportatrices, dont les profits atteignent des records, applaudissent, idem à la Bourse de Tokyo où l'indice vedette Nikkei a doublé de valeur en deux ans et demi pour franchir le seuil symbolique des 20 000 points.
Mais alors que Shinzo Abe a fêté ce week-end son troisième anniversaire au pouvoir – une durée exceptionnelle au Japon qui a connu sept Premiers ministres différents entre 2006 et 2012 –, la tâche qui lui reste à accomplir apparaît dans toute son ampleur.
Après une récession en 2014, dans la foulée d'une traumatisante hausse de TVA pour les ménages nippons, le Japon ne peut se targuer d'une croissance florissante cette année.
La déflation n'a pas été définitivement vaincue, et surtout les audacieux chamboulements promis pour lever les blocages structurels en sont restés à leurs prémices.

Abe ou rien
« La première phase du gouvernement Abe s'est traduite par des progrès, mais la seconde n'a pas été aussi radieuse », juge Satoshi Osanai, économiste à l'institut de recherche Daiwa.
Pourtant, l'intéressé peut encore se prévaloir d'une confortable cote de popularité, autour de 50 %, à l'aube des élections sénatoriales de l'été prochain. Ce score étonne, d'autant qu'à l'essoufflement des « abenomics » vient s'ajouter l'impopularité de certaines mesures.
Pour la première fois depuis des décennies, des dizaines de milliers de manifestants sont descendus à plusieurs reprises dans les rues cette année pour s'opposer à une extension des prérogatives de l'armée japonaise, brèche dans la Constitution pacifiste du pays.
Sous son égide, ont aussi été relancés les premiers réacteurs nucléaires en dépit du scepticisme d'une majorité des Japonais. L'ensemble des installations avaient été éteintes progressivement après le drame de Fukushima.
« Shinzo Abe bénéficie du fait que les électeurs pensent qu'il n'y a pas d'alternative », analyse Robert Dujarric, spécialiste de l'Asie contemporaine à l'université Temple de Tokyo. Le Premier ministre n'a en effet guère à craindre de l'opposition de centre-gauche, laminée. Déjà majoritaire à la Chambre des députés, il devrait garder une solide avance lors du renouvellement partiel du Sénat en 2016, avec l'aide du parti centriste allié Nouveau Komeito.
Reste que le Japon n'a pas de temps à perdre, préviennent les observateurs.
« Une fois les élections de l'été passées, souligne Hideo Kumano, de l'institut de recherche Dai-ichi Life. M. Abe aura une formidable fenêtre pour conduire des réformes douloureuses, c'est le moment ou jamais. »
Et les analystes de citer les combats à mener : vaincre les inégalités du marché du travail (notamment par des réformes au profit des femmes), inverser le déclin de la courbe des naissances, résorber la dette colossale (près de 250 % du PIB) et relancer une consommation désespérément atone alors que les entreprises tardent à convertir leurs profits en hausses salariales, malgré les appels insistants du gouvernement et de la Banque du Japon (BoJ).
Hiroshi HIYAMA/AFP

La promesse était belle : restaurer la puissance économique et la fierté écornées du Japon. Trois ans après son retour au pouvoir, le Premier ministre Shinzo Abe est confronté à l'immensité de ses ambitions, et le temps presse.Remis d'un éphémère et peu concluant passage à la tête de l'archipel en 2006-2007, M. Abe, 60 ans, est revenu aux commandes le 26 décembre 2012,...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut