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À La Une - Attentats

En France, le gouvernement veut renforcer l'arme critiquée de l'état d'urgence

Le contenu du projet de révision de la Constitution, intitulé "loi constitutionnelle de protection de la Nation", concrétise un durcissement de l'appareil répressif.

Un soldat français patrouillant dans l'aéroport Charles De Gaulle, en région parisienne, le 3 décembre 2015. AFP/ KENZO TRIBOUILLARD

Face à la menace de nouveaux attentats en France, le gouvernement veut renforcer en l'inscrivant dans la Constitution l'arme de l'état d'urgence instauré à la suite des attaques meurtrières de 13 novembre à Paris, et dont l'application commence à susciter des critiques.

Le contenu du projet de révision de la Constitution, intitulé "loi constitutionnelle de protection de la Nation", transmis pour avis au Conseil d'Etat avant son examen par le gouvernement et dont l'AFP a pris connaissance jeudi, concrétise un durcissement de l'appareil répressif. Ce texte, qui devra être voté par les deux-tiers du Parlement pour entrer en vigueur, inscrit dans la loi fondamentale de la France ce qui était jusqu'à présent prévu par une simple loi: état d'urgence décrété en Conseil des ministres "en cas de péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public", prolongation au delà de 12 jours par le Parlement qui en fixe la durée.

Les mesures d'exception prises pendant cette période, par exemple les assignations à résidence, pourront selon ce texte être prolongées "pendant une durée maximale de six mois" après la fin de l'état d'urgence, lorsque "demeure un risque d'acte terroriste". Par ailleurs, la Constitution prévoira qu'un Français qui a également une autre nationalité pourra être déchu de la nationalité française lorsqu'il est définitivement condamné pour des actes "constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou pour un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme".

L'état d'urgence a été décrété par le président François Hollande quelques heures après les attentats de Paris (130 morts), et prolongé de trois mois par le Parlement quasi-unanime, jusqu'au 26 février. Mais son application est critiquée par des défenseurs des Droits de l'Homme et des élus qui s'inquiètent de dérapages et d'atteintes aux libertés.

Le Conseil national des barreaux (CNB) qui représente l'ensemble des avocats, relève que l'état d'urgence "autorise les perquisitions administratives en tous lieux, de jour et de nuit, y compris au domicile d'un avocat, d'un journaliste, d'un parlementaire et d'un magistrat", et invite à signaler les abus constatés.
Des députés de tous bords, parfois saisis de cas précis dans leurs circonscriptions, ont demandé un contrôle renforcé de l'état d'urgence, poussant l'Assemblée nationale à mettre en place un dispositif de veille.


Vers une prolongation?
Le Premier ministre Manuel Valls a déclaré mardi qu'il ne fallait "pas écarter" la possibilité de prolonger l'application de l'état d'urgence au delà du 26 février, "en fonction de la menace".
L'ancien Premier ministre de droite Dominique de Villepin a mis en garde mercredi contre "la tentation" d'une "dérive autoritaire et sécuritaire", appelant à limiter l'état d'urgence dans le temps.

Plus de 2.000 perquisitions ont été opérées sans l'aval d'un juge, plus de 300 assignations à résidence prononcées, et trois mosquées ont été fermées pour cause de radicalisation, une mesure sans précédent en France. Certaines personnes visées par ces mesures ont déposé des recours en justice.

Manuel Valls s'est aussi employé à répondre aux critiques qui montent sur une utilisation abusive de ce statut d'exception. Les mesures prises "sont décidées au vu de renseignements recueillis par les services spécialisés, au vu d'un comportement, ou d'une activité qui peuvent laisser penser qu'il y a une menace", a -t-il déclaré.

La semaine dernière, Emmanuelle Cosse, du parti écologiste EELV, s'était insurgée contre l'assignation à résidence de "militants de l'écologie" avant la COP21, la conférence de l'ONU sur le climat. Le ministre de l'Intérieur a répliqué mardi que "26 assignations à résidence" avaient été prises "non pas contre des militants écologistes, mais des casseurs".

L'état d'urgence a permis au préfet de la région Ile de France (Paris et ses environs) d'interdire toute manifestation jusqu'au 30 novembre, jour du sommet des chefs d'Etat et de gouvernement au Bourget, près de Paris. Mais une chaîne humaine a malgré tout été organisée dimanche à Paris, à l'issue de laquelle des incidents ont éclaté entre des petits groupes de manifestants et les forces de l'ordre place de la République, devenu un lieu de recueillement après les attentats jihadistes dans l'est parisien en janvier et novembre.
L'interdiction de manifester a été prolongée jusqu'à la fin de la COP21 dans le secteur du Bourget ainsi que sur l'avenue des Champs-Elysées et ses environs.

 

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