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Culture - Beirut Art Fair

Une façade vide sur la mer, « comme l’image d’un migrant »

Parmi les artistes à suivre lors de cette édition 2015 du BAF, Mehdi Meddaci, qui avait effectué une résidence à Beyrouth.

Les vagues s’écrasent contre la jetée, fouettant la muraille sculpturale... Capture d’écran d’une vidéo de Mehdi Meddaci

Habiter l'espace
Des blocs de béton bouchent partiellement la vue sur la mer. On aperçoit les vagues s'écraser contre la jetée, fouettant cette muraille sculpturale. Des figures passent, une par une, comme un défilé chorégraphique. Plan fixe, mouvements répétitifs, point de vue sur un espace d'entre-deux, un décor chargé de sens, celui de la mer Méditerranée. Bienvenue dans l'univers poétique et politique de Mehdi Meddaci. Cet artiste français a été diplômé du prestigieux Fresnoy, Studio national des arts contemporains et de l'École nationale supérieure de photographie d'Arles. Son travail s'articule entre photographie et vidéo, deux supports qu'il entremêle. Ses séries Murs, Tenir les murs, Lancer une pierre, Corps traversés et plus récemment Les yeux tournent autour du soleil font entrer en correspondance les différents écrans, filmiques et photographiques, qui les composent. Ce sont des récits elliptiques, des fragments de narration que le spectateur est invité à assembler, immergé dans un réseau d'œuvres qui entrent en échos. L'espace du spectateur, où cohabitent son et image, est traversé, habité, il prend consistance.

Penser l'exil
À l'occasion de la Beirut Art Fair, la galerie Odile Ouizeman organise un solo show de l'artiste. « Mehdi avait été en résidence à Beyrouth, une étape essentielle pour laisser résonner des souvenirs qui ne lui appartiennent pas, mais qu'il va transcender. Nous avons mis en avant le fait que Beyrouth est un axe fort de la Méditerranée, un point de départ. La diaspora libanaise est étendue, ce sont de grands voyageurs qui portent leur culture, au-delà de la Méditerranée, cette mer entre deux terres qui est au centre de l'œuvre de Mehdi », explique la galeriste parisienne. Cette perspective thématique nourrit les questions politiques contemporaines concernant l'émigration, de manière métaphorique. À travers le travail poétique et plastique de Mehdi Meddaci, le spectateur est incité à penser à la fois l'exil et le voyage. «Une photographie comme Alger montre une façade vide sur la mer. Je vois cela comme l'image d'un migrant, il y a eu déconstruction, brisure, rupture, mais il y a également l'infini face à cette mer, tous les possibles », souligne Odile Ouizeman.

Confronter décor et corps
Les lieux que l'artiste choisit de capturer sont symptomatiques, ancrés à un contexte géographique précis, le pourtour méditerranéen. La mise en scène est alors dictée par un espace limité, une frontière, une localisation périphérique, un entre-deux imprécis. Entre Alger, Damas, Beyrouth, Marseille, Mehdi Meddaci s'approprie les passés, les brisures, les errances d'une histoire de l'immigration qu'il n'a pas connue, mais dont il porte l'héritage.
En arpentant ces territoires, son regard se pose sur ce « mur liquide qu'incarne la Méditerranée », dixit l'artiste. Le cadrage est simple, facial, mais il sublime les ruines, les friches, les êtres égarés qui y déambulent. Sur ce plateau scénique, entre réalité et fiction, les corps sont sculpturaux. Leur théâtralité rappelle l'esthétique du maître de l'art vidéo, Bill Viola. Leurs mouvements, dérisoires, sont décomposés au ralenti, étirant les membres dans un effet de flottement étrange. Cette dilatation diffuse une intensité dramatique dans le ballet de l'attente, du déplacement, de l'inertie.
Au-delà d'une ouverture vers un questionnement sociopolitique, il s'agit de souligner que le travail de Mehdi Meddaci est avant tout plastique. Dans ses images, le temps et l'espace entrent en collision, dans le rapport qui fait coexister photographie et vidéo. La galeriste insiste sur cette malléabilité du support : « Il y a un étirement de l'image, un étirement du temps, dans la coprésence du ralenti dans la vidéo et de l'arrêt sur image dans la photo. » En sont témoins les décompositions de mouvement de mer, réminiscence rythmique de la chronophotographie.

Solo show Mehdi Meddaci, galerie Odile Ouizeman, Biel, jusq'au 20 septembre 2015, de 15h30 à 21h30.

 

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