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Économie - Splendeurs et misères économiques

Pour un revenu minimum universel

(*) Né à Beyrouth, Michel Santi est un macroéconomiste franco-suisse qui conseille des banques centrales et des fonds souverains. Il est notamment l’auteur de «  L’Europe, chroniques d’un fiasco économique et politique  » et de «  Misère et opulence  ».

Un débat fait actuellement rage sur la stagnation séculaire de nos économies. Pourtant, si stagnation séculaire il y a, celle-ci est due à l'extraordinaire productivité du capitalisme. Les taux d'intérêt nuls ou négatifs sont tout bonnement la conséquence de la très efficiente productivité du capital. Quant au chômage, il est lui-même le reflet de l'incroyable productivité du travail. En d'autres termes, le travail et le capital sont très faiblement rémunérés, car notre économie a besoin de moins en moins de travail et de moins en moins de capital pour livrer ses biens et pour assurer ses services. Le corollaire est donc que nous produisons bien plus que ce que nous pouvons acheter et consommer.
La stagnation de nos économies provient donc d'une demande et d'une consommation anémiques, et non d'une offre déficiente. Situation qui ira en s'aggravant davantage année après année, car les progrès conduiront la société et les entreprises à créer et à produire encore et toujours plus avec toujours moins de capitaux et toujours moins de salariés. Un travailleur produit 350 tonnes d'acier en une heure aujourd'hui, alors qu'il n'en produisait qu'une seule tonne par année dans les années 20 !
Pour autant, l'abondance ne bénéficie qu'à une infime minorité. Ces gains de productivité massifs finiront donc par détruire l'économie et le capitalisme, car ils n'ont aucune retombée favorable sur la consommation. Il ne sert en effet à rien au capitalisme de produire avec toujours moins de travailleurs et de salariés s'il y a de moins en moins de consommateurs qui peuvent se permettre d'acheter ses produits et services. Quant aux politiques des banques centrales dites de « quantitative easing », elles n'ont fait qu'enrichir le grand capitalisme à travers le gonflement vertigineux des réserves bancaires et l'ascension des marchés boursiers.
Si les capitalistes ont, pour le moment, largement neutralisé les effets potentiellement désastreux d'une consommation déclinante par des profits faramineux engrangés grâce aux envolées boursières tout aussi indécentes que schizophrènes, la stagnation séculaire finit aujourd'hui par les rattraper et exige désormais de relancer la consommation.
Voilà pourquoi un des remèdes les plus aisés à mettre en place aujourd'hui – qui permettrait à la fois de soulager l'immense masse des citoyens tout en confortant les entreprises – serait le revenu minimum universel. Qui, consistant à distribuer mensuellement une somme forfaitaire à tout citoyen, assisterait les plus démunis, réduirait les inégalités et trouverait des débouchés pour la surproduction se trouvant être un des maux les plus flagrants du capitalisme. Ce capitalisme, qui a formidablement réussi à produire et à multiplier ses richesses, voit aujourd'hui sa prospérité menacée par une demande agrégée ne parvenant plus à suivre le rythme effréné de ses gains en productivité. Il ne pourra pas indéfiniment faire son beurre grâce au tiroir caisse de bourses qui commencent elles aussi à être infectées par le monde réel, celui de l'« armée de réserve des travailleurs » (Karl Marx) qui doit toujours lutter et souvent souffrir pour subsister.
En l'absence de mesures fiscales appropriées, donner de l'argent à chaque citoyen relancera donc la consommation, stimulera l'économie, insufflera un minimum d'équité au sein de nos sociétés, tout en ayant un impact favorable sur l'emploi. Aujourd'hui, il est dans l'intérêt du capitalisme d'instaurer ce revenu minimum universel : qu'il le fasse au moins pour ça...

Un débat fait actuellement rage sur la stagnation séculaire de nos économies. Pourtant, si stagnation séculaire il y a, celle-ci est due à l'extraordinaire productivité du capitalisme. Les taux d'intérêt nuls ou négatifs sont tout bonnement la conséquence de la très efficiente productivité du capital. Quant au chômage, il est lui-même le reflet de l'incroyable productivité du...

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