Le Parlement grec devait voter, dans la nuit de jeudi à vendredi, sur le nouvel accord de prêt avec les créanciers du pays, le troisième depuis 2010, qui expose le Premier ministre Alexis Tsipras à la défiance tant de l'Allemagne, réservée sur le texte, que de son propre parti politique, profondément divisé.
En prévision d'un Eurogroupe décisif aujourd'hui – réunion des ministres des Finances de la zone euro –, Alexis Tsipras devait convaincre que le projet de loi de 400 pages rédigé durant deux semaines sous la houlette des représentants des créanciers du pays remplit toutes les conditions pour que la Grèce puisse toucher rapidement un premier versement sur les quelque 85 milliards d'aide prévus.
Athènes compte sur une première tranche de 20 à 25 milliards d'euros pour rembourser 3,4 milliards à la Banque centrale européenne (BCE) jeudi prochain et injecter immédiatement 10 milliards d'euros aux banques du pays, mises à mal par les massifs retraits d'épargne de Grecs inquiets, et le contrôle du crédit instauré fin juin, qui ralentit l'économie, même s'il les protège d'une panique accrue des épargnants.
À la Vouli, les travaux en commission ont commencé hier en matinée et se poursuivaient à l'heure de mettre sous presse, augurant d'une séance plénière tardive et d'un vote aux petites heures de l'aube, formule récurrente depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement d'Alexis Tsipras en janvier. Il semblait y avoir peu de suspense sur l'adoption du texte, une feuille de route jusqu'à 2018 mêlant mesures budgétaires et réformes structurelles. Trois grands partis d'opposition (Nouvelle Démocratie, conservateur, Pasok, socialiste, et Potami, centre-gauche) devraient en effet apporter leurs 106 voix (sur 300).
Mais M. Tsipras allait être de nouveau confronté à la fracture que crée ce nouveau programme d'austérité dans son propre parti, avec, comme lors des votes du mois de juillet sur de premiers volets de mesures, de nombreuses défections à prévoir parmi les 149 députés Syriza. La perspective d'une scission de ce parti, arrivé au pouvoir pour la première fois en janvier, n'est plus un tabou et les frondeurs semblent avoir débuté une campagne en vue de constituer leur propre formation pour des législatives anticipées qui pourraient avoir lieu à l'automne.
Les questions de l'Allemagne
Ce nouveau programme sur lequel la Vouli se prononçait ne convainc pas beaucoup analystes sur sa capacité à relancer l'économie du pays. Alors que les prévisions européennes tablent un recul de 2,3 % du PIB pour 2015, la Grèce a fait cependant mieux qu'attendu au 2e trimestre avec un PIB en hausse de 0,8 % par rapport au premier, alors que les économistes attendaient un net recul. Par ailleurs, le pays n'est finalement pas retombé en récession en début d'année, selon l'agence des statistiques grecques (Elstat). Mais le contrôle des capitaux pèsera à coup sévèrement sur les performances du deuxième semestre.
L'Allemagne reste plus que circonspecte sur le nouveau programme, et a d'ores et déjà annoncé qu'elle soulèverait « des questions », lors de l'Eurogroupe. Peut-être Berlin voudra-t-elle insister vendredi en faveur d'un prêt-relais à Athènes, donnant le temps d'obtenir des réponses à ses questions, tout en permettant à la Grèce de payer à temps la BCE. Pour sa part, le président du Bundestag, Norbert Lammert, ne semble pas s'attendre à un blocage complet par son pays puisqu'il a indiqué aux députés allemands que si la Vouli, le Parlement grec, donnait son feu vert jeudi, il les convoquerait pour une session extraordinaire mardi ou mercredi afin de voter à leur tour.
(L'OLJ avec AFP)
Bruxelles table sur une forte hausse de la dette grecque
La Commission européenne s'attend à ce que la dette de la Grèce progresse fortement en 2015 et 2016, fait savoir hier le quotidien allemand Die Welt, affirmant après avoir eu accès à la dernière analyse de Bruxelles sur la dette. Lestée par la dégradation de l'économie grecque et le troisième plan d'aide international en faveur d'Athènes, la dette du pays devrait grimper à 196 % du produit intérieur brut (PIB) cette année et à 201 % l'an prochain selon le scénario de base envisagé par cette étude, précise le journal. Pour l'heure, la dette grecque atteint quelque 320 milliards d'euros, soit 170 % du PIB. Elle devrait ensuite redescendre à 175 % du PIB à l'horizon 2020 et à 122,2 % d'ici à 2030, soit un niveau encore supérieur aux 120 % considérés par le Fonds monétaire international (FMI) comme la limite de soutenabilité de la dette, poursuit Die Welt.