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Économie - Splendeurs et misères économiques

Adapter le travail à nos économies modernes

Né à Beyrouth, Michel Santi est un macroéconomiste franco-suisse qui conseille des Banques centrales et des fonds souverains. Il est notamment l’auteur de « L’Europe, chroniques d’un fiasco économique et politique » et de « Misère et opulence ».

L'époque où Voltaire affirmait dans Zadig que « le travail éloigne de nous trois grands maux : l'ennui, le vice et le besoin » est désormais révolue. Aujourd'hui, il est contreproductif de se mettre coûte que coûte au travail. Dit autrement, travailler moins autorise l'amélioration de nos conditions de vie car moins de travail améliore indiscutablement la manière dont on travaille. Surannée est donc devenue la croyance selon laquelle la discipline ne saurait être acquise que par le travail, et ringard est devenu le dogme de la vertu par le travail. Bref, le travail ne constitue plus, dans nos sociétés postmodernes de 2015, la condition sine qua non de l'épanouissement personnel.
Tout d'abord, que l'on nous épargne l'argumentation fallacieuse selon laquelle la réduction du temps de travail augmente le chômage du fait de l'alourdissement des charges des entreprises. Les percées technologiques fulgurantes actuelles combinées à la robotisation de notre économie plaident au contraire pour une diminution radicale du temps de travail qui permettra aux salariés de pouvoir exprimer leur créativité et leur inventivité. Une certitude : il n'est plus nécessaire aujourd'hui de travailler de longues heures pour être productif. Tout le contraire même, car le raccourcissement des heures de travail agira favorablement tant sur la motivation des salariés que sur leur enthousiasme, avec évidemment des retombées positives sur leur productivité. Sachant que la robotisation et que les technologies permettront de maintenir le niveau de vie des salariés tout en leur permettant de travailler moins.
Pour autant, la problématique fondamentale n'est pas tant celle de la productivité que celle qui consiste à s'interroger si, d'un point de vue moral, nos sociétés modernes peuvent encore s'accommoder d'une situation où certains travaillent de longues heures pendant que d'autres sont purement et simplement privés de tout emploi. Anomalie qui peut être résolue par un partage équitable du travail à travers la courroie de transmission de la réduction du temps qui y est consacré. Je suis, pour ma part, certain que les jeunes générations ne valorisent plus leur existence à l'aune de ce qu'ils produisent. Excellent augure pour notre avenir proche, pour notre qualité de vie et pour notre épanouissement affectif et intellectuel que les jeunes d'aujourd'hui (et que de plus en plus de moins jeunes) se soient affranchis de ce culte de la productivité.
Ce rêve du salarié chargé de moins d'heures de travail n'est pas récent. Keynes préconisait la semaine de travail de quinze heures (dont il voyait l'avènement pour 2030), solution pour parvenir au plein emploi et clé pour atteindre à cette « bonne société » qu'il appelait de ses vœux. La réduction drastique du temps de travail était également une composante essentielle de la future société communiste décrite par Marx. John Stuart Mill lui même plaida de manière répétitive pour une société qui laisserait davantage de place aux loisirs, afin de s'éloigner de l'« Évangile du travail ». Tous ces penseurs, en leur époque respective, rêvaient donc déjà d'une société qui travaillerait moins grâce aux techniques modernes, et qui parviendrait ainsi à l'harmonie et au bonheur.
Nous en avons aujourd'hui les moyens technologiques. C'est donc un monde différent et des promesses nouvelles qui se profilent à l'horizon car la réduction du temps de travail permettra à chacun de saisir des opportunités, de laisser exprimer sa créativité, tout en étant incontestablement plus efficace au travail. Aujourd'hui en 2015, il est indispensable de travailler moins pour travailler mieux.

L'époque où Voltaire affirmait dans Zadig que « le travail éloigne de nous trois grands maux : l'ennui, le vice et le besoin » est désormais révolue. Aujourd'hui, il est contreproductif de se mettre coûte que coûte au travail. Dit autrement, travailler moins autorise l'amélioration de nos conditions de vie car moins de travail améliore indiscutablement la manière dont on travaille....
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