Rechercher
Rechercher

Culture - Portrait

« Un ténor, aujourd’hui, n’est pas un patapouf : il lui faut des muscles »

À 31 ans, Béchara Mouffarej a tissé la toile de ses relations entre Aïn Saadé et Pise, où il réside, à cheval entre deux avions. Vie de scène entre rêve de bohème et graine de star.

Béchara Moufarrej, bohême et graine de star. Photos Michel Sayegh

Une voix verdienne qui aime la course à pied, le squash, la chasse (et les chiens: il en a 11), la cuisine et les voyages. Béchara Mouffarej place le chant au premier plan de sa traversée humaine comme un incontournable objectif d'épanouissement. Fraîchement rentré d'une audition à l'Atelier lyrique de la Bastille à Paris où il a emballé l'auditoire, il y a emporté dans la foulée une proposition de contrat. Sans parler du prestigieux concours de Voci Verdiane* à Busetto où il a été invité sans vouloir y participer. C'est que ce jeune homme qui a du tempérament aime choisir ses projets et s'y attelle, méthodique, avec application et discernement. Carnet de travail déjà surchargé pour la saison prochaine entre Livourne, Lucques, Pise, Novare et Le Caire.

Une bouille sympa entre séducteur rusé et copain familier à la débrouille. Cheveux noirs gominés, traits fins et réguliers, chemise à carreaux colorée, jeans bleu ciel slim et gourmette en fils tressés rehaussée d'une croix en points de crochets. Un garçon parfaitement dans le vent, non fumeur (c'est bon pour les basses et les barytons!), qui dort tôt, aime le vin et le cognac (sans glaçons, précise-t-il), et n'abuse pas des friandises et du chocolat...

L'aventure de chanter ne commence pas seulement sous la douche très tôt le matin, où il fait des vocalises, mais dès la prime enfance au cœur d'un chœur. À 17 ans, un double coup de hasard et de chance à Santa Maria Majore à Rome : un choriste soliste est absent. Il est alors sollicité et sa prestation de l'Ave Maria de Schubert envoûte. À tel point qu'il est «adopté» pour trois ans par le couple musicien Lidia et Giuliano Mercati.
Le chant en tête (et dans le gosier et le diaphragme), exit les études de comptabilité à La Sagesse où la beauté de son chant l'emporte même pour une inscription en MBA pour la science des calculs. Dès lors, les masters class se succèdent sous l'égide de Simone Alaïmo, La Philharmonia Romana, Sylvano Carrero, Michaella Miguenes, Elizabeth Norberg Schulz, etc.

« Même pas YouTube »
Formé à bonne école, Moufarrej dit ne pas pouvoir chanter ni Carmen ni Madame Butterfly. Son ombrelle vocale est davantage pour Mozart, Verdi et Massenet (Werther). Il rêve grand : la Scala de Milan où il sera le Rodolpho de La Bohème de Puccini ou le Duc de Rigoletto de Verdi. Pour le moment il sera le libertin de Mantoue au Caire sous la direction de David Criscenci.
«Un ténor, aujourd'hui, n'est pas un patapouf : il lui faut la tablette des six packs de musculation abdominale pour le Comte d'Almaviva », confie-t-il en rigolant, tout en soulignant que chanter, pour lui, c'est se mettre à l'aise... Et de raconter cette anecdote suivie de quelques rires amusés : « Lorsque j'étais petit, ma mère a été inquiète de ma persistance à garder la pastille du walkman collée à l'oreille et de mon constant fredonnement. Emmené en auscultation chez le médecin, ce dernier lui annonce que je suis très bien, mais que c'est elle qui a besoin d'être auscultée... ».

Révélé depuis 2011 à Beyrouth par Les Noces de figaro de Mozart, Le barbier de Séville de Rossini et Cosi fan tutte de Mozart par l'ampleur de sa voix et l'aspect pétillant de son jeu, le voilà coqueluche montante des scènes à l'étranger. « Quand je pense aux difficultés rencontrées, dit-il pensif, je réalise ma passion dévorante pour le chant. On doit être de mille coudées mieux que les étrangers pour emporter un rôle. En partant de rien, on a fait de l'opéra, ici. Ce n'est pas notre culture, et pourtant... À mes débuts je n'avais même pas YouTube pour me renseigner sur une mélodie, une cadence ou une prononciation (il faut préciser que son français est impeccable, et, dit-il, son italien meilleur : belle revanche pour les Libanais polyglottes). Toutes les portes se sont ouvertes à Palerme... »

Ce jeune homme qui n'a pas le quart de ton oriental, qui aime les mezzos et non les sopranes, qui a pour idole Pavarotti, Jerry Headley et Florez, qui prend presque régulièrement l'avion le mercredi de l'aéroport de Beyrouth pour y revenir le dimanche, sera en novembre prochain dans la production de La Traviata au théâtre Goldoni à Livourne. Pour aller encore plus loin, donner conférence et concert à Hangzhou, à quatre heures de Shanghai. De toute évidence une voix qui porte.


Lire aussi
Le Liban au cœur du monde Verdi

 

Pour mémoire
Béchara Moufarrej brille sur les planches de l'opéra italien

Une voix verdienne qui aime la course à pied, le squash, la chasse (et les chiens: il en a 11), la cuisine et les voyages. Béchara Mouffarej place le chant au premier plan de sa traversée humaine comme un incontournable objectif d'épanouissement. Fraîchement rentré d'une audition à l'Atelier lyrique de la Bastille à Paris où il a emballé l'auditoire, il y a emporté dans la foulée une...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut