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Liban - Tuerie de Qalb Lozé

Joumblatt : Non à l’agitation, oui à la stabilité

Le Conseil de la communauté druze, réuni hier autour de Walid Joumblatt. Photo Marwan Assaf

Le chef du Parti socialiste progressiste (PSP), Walid Joumblatt, a lancé hier un appel à l'apaisement et à l'unité nationale pour désamorcer tout dérapage éventuel au surlendemain de la tuerie mercredi, par des membres du Front al-Nosra, d'une vingtaine de villageois druzes dans le village de Qalb Lozé, dans la province d'Idleb (Nord), en Syrie.
M. Joumblatt, qui s'exprimait à l'issue d'une réunion à son domicile du Conseil de la communauté druze, en présence notamment du cheikh Akl Naïm Hassan, a condamné l'incident, qu'il a qualifié « d'isolé », en dépit de son caractère « tragique » et « douloureux ».
« Je condamne l'incident qui s'est produit à Qalb Lozé et qui a fait entre 20 et 30 victimes. Je condamne de même les bombardements effectués par le régime syrien qui tuent 150 à 200 personnes par jour à travers la Syrie. Il ne faut pas oublier la tragédie que vit le peuple syrien au quotidien. Jusqu'à ce jour, il y a plus de 350 000 tués en Syrie à cause du régime. Parallèlement, il y a plus de 7 millions de déplacés à l'intérieur du pays et trois millions de déplacés hors de Syrie, entre le Liban, la Jordanie et la Turquie », a-t-il indiqué.

« Voir l'image globale »
« Nous devons voir l'image globale, sans tomber dans le piège de la perspective étroite. Il s'agit d'un incident isolé. Je le réglerai politiquement, à travers mes contacts locaux et régionaux. Le drame est important, c'est vrai, mais toute agitation ou effervescence de la part de qui que soit, ici ou en Syrie, expose inutilement les druzes de Syrie au danger. Réglons la question calmement. La solution politique nécessite des contacts avec des forces régionales voisines, et c'est ce que je vais faire concernant le nord de la Syrie », a souligné le leader druze.
« Concernant le sud du pays et après quatre ans de crise, il est clair que Bachar (el-Assad) se moque de la Syrie ou de toute autre chose ; il ne se soucie même plus de la communauté à laquelle il appartient. Il a emmené les alaouites au bord de l'abîme. Il y a plus de 100 000 tués civils et militaires parmi la communauté alaouite. Tout montre que le régime recule dans plusieurs régions parce qu'il est exténué, et son armée avec lui », a noté Walid Joumblatt.
« Que voulons-nous ? Je fais partie des premiers qui ont prôné une solution politique en Syrie sur base d'un consensus international et régional, c'est-à-dire entre les États-Unis, la Russie, la Turquie, l'Iran et l'Arabie saoudite, afin de sortir définitivement Bachar el-Assad du pouvoir et préserver les institutions », a-t-il poursuivi. « Il ne peut y avoir de solution politique en Syrie en présence de Bachar el-Assad. La solution est ailleurs, dans un cabinet de transition, avec une formule politique préservant les institutions. Ce qui nous importe, c'est de maintenir les institutions, à commencer par l'armée syrienne. Le régime est en train de mener le pays à la destruction totale, au morcellement et à la partition », a ajouté le chef du PSP.


(Lire aussi : Le massacre de Qalb Lozé réveille la convivialité endormie ; Kahwagi mise sur la transparence)

 

Conjonction Tel-Aviv-Damas
« L'avenir des Arabes et des druzes est dans la réconciliation et l'harmonie avec les habitants du Hauran. Telle est la vieille relation historique. C'est de là qu'est partie la révolution de Jabal el-Arab conduite à l'époque par Sultan pacha el-Atrache. Il n'y a pas d'alternative à la réconciliation avec les habitants du Hauran et avec la majorité du peuple syrien. Toute idée d'un projet étroit serait un suicide. Nous pouvons nous passer des voix suspectes qui sortent de l'administration israélienne ou de ses agents et qui veulent diviser les druzes de Syrie », a noté le leader druze. « Nous savons que le régime syrien et le régime sioniste se retrouvent sur les projets de morcellement. Ils utilisent tout, sans souci d'un éventuel chaos en Syrie ou ailleurs. Nous, les Arabes, étions toujours aux côtés de la cause arabe et palestinienne », a-t-il encore dit.
M. Joumblatt a mis l'accent en outre sur l'importance de préserver la liberté d'expression et la stabilité au Liban, et de rester attaché à la légalité libanaise, à l'État, à l'armée et aux forces de sécurité. « Nous menons une bataille pour défendre le Liban et sa stabilité. Nous respectons les points de vue, mais l'effervescence ne mène à rien, seulement à plus d'agitation. Nous sommes avec la stabilité », a-t-il martelé. « J'ai reçu des appels de Fouad Siniora, Nabih Berry et du mufti Deriane. Nous parlons une même langue : la préservation de la stabilité et de l'État. Nous avons réussi envers et contre tout », a-t-il encore dit.
« 75 % du peuple syrien sont des musulmans sunnites. (...) Le terrorisme de ce régime a conduit les sunnites à rejoindre le Front al-Nosra. Cela fait quatre ans que le conflit perdure, il y a des dizaines de milliers de tués, de disparus, de prisonniers et de torturés, sans perspective de solution politique à l'horizon. Où est-ce que le citoyen syrien peut aller ? » s'est interrogé le chef du Rassemblement démocratique.
À un participant qui lui reprochait de tenir des propos conciliants à l'égard d'al-Nosra, M. Joumblatt a répondu : « Je n'ai pas dit que les druzes sont avec al-Nosra, mais qu'ils sont avec la majorité du peuple syrien. »

 

(Pour mémoire : Joumblatt exhorte les druzes de Syrie à s’éloigner d’Assad)

 

Naïm Hassan
Pour sa part, le cheikh Akl druze Naïm Hassan a exprimé sa solidarité avec les familles des victimes, dénonçant le sang versé à Qalb Lozé. « Il faut exercer une pression ferme sur la plaie pour arrêter l'hémorragie », a-t-il dit, appelant les druzes à « rester fidèles à l'unité de la Syrie, et à maintenir un climat de fraternité et de réconciliation avec les fils de leur patrie ». « Nous appelons toutes les forces syriennes actives à assumer leurs responsabilités historiques dans la préservation de l'unité du peuple syrien et la protection du tissu social syrien. (...) C'est Israël qui est le premier à profiter du morcellement de la région et de sa partition en entités sectaires en conflit les unes avec les autres », a-t-il ajouté.
Suivant la même volonté d'apaisement, le PSP et la Jamaa islamiya dans l'Iqlim el-Kharroub ont lancé un appel commun à l'unité nationale et au rejet du sectarisme.

Vague d'indignation
La tuerie de Qalb Lozé a provoqué une vague d'indignation dans les milieux politiques libanais. Le président des Forces libanaises (FL) Samir Geagea a ainsi rendu visite jeudi soir, à Clemenceau, à Walid Joumblatt pour lui exprimer sa solidarité. L'occasion pour les deux hommes – qui ont dîné ensemble en présence de leurs familles respectives – d'exprimer « leur rejet du terrorisme et leur attachement au vivre-ensemble et à la stabilité au Liban et en Syrie ».
« Ce crime sert clairement la politique et les objectifs du régime sécuritaire syrien », a pour sa part indiqué le chef du bloc du Futur, Fouad Siniora, dans un communiqué. « Ce régime a œuvré, depuis le début de la révolution syrienne, à susciter la discorde sectaire au plan interne pour essayer de prétendre qu'il n'y a pas de révolution en Syrie ou de revendications justes de la part de citoyens syriens, juste des groupes extrémistes et terroristes », a-t-il indiqué. Le secrétariat général du 14 Mars, le Parti national libéral et la Gauche démocratique ont également condamné le crime, selon la même optique.

 

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Sultan Bacha el-Atrache, héros de la révolte du Djebel Druze en 1925 contre les Français. Il est l'auteur de cette phrase célèbre : La religion est à Dieu et la patrie est à tous. La raison de la révolte druze en 1925 avait pour raison le refus du général Maurice Sarrail, Haut-Commissaire de France au Levant, de recevoir la délégation druze, à sa tête Sultan Bacha el-Atrache, à la Résidence des Pins, sous prétexte qu'elle s'était présentée sans rendez-vous. C'était ridicule de la part du Haut-Commissaire.

Un Libanais

12 h 33, le 13 juin 2015

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Commentaires (2)

  • Sultan Bacha el-Atrache, héros de la révolte du Djebel Druze en 1925 contre les Français. Il est l'auteur de cette phrase célèbre : La religion est à Dieu et la patrie est à tous. La raison de la révolte druze en 1925 avait pour raison le refus du général Maurice Sarrail, Haut-Commissaire de France au Levant, de recevoir la délégation druze, à sa tête Sultan Bacha el-Atrache, à la Résidence des Pins, sous prétexte qu'elle s'était présentée sans rendez-vous. C'était ridicule de la part du Haut-Commissaire.

    Un Libanais

    12 h 33, le 13 juin 2015

  • C'est le temps de la sagesse pour le député et leader druze Walid Joumblatt. Il faut dire que lui n'a aucun besoin de faire du populisme et de la démagogie.

    Halim Abou Chacra

    06 h 21, le 13 juin 2015

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