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Liban - Michel GOURD

L’Europe en mode autodestruction

Qui mène la stratégie internationale européenne ? Les banques semblent avoir relégué les politiciens au second rang, derrière leurs investisseurs. Où est passé le projet qui donnait le droit à chaque peuple de choisir son destin avec l'aide d'une Union européenne secourable ?
Il serait temps que la Grèce ait son prêt et que les médias européens changent de sujet. Cela donnerait moins de munitions à la droite européenne qui se déchaîne contre Athènes depuis l'arrivée au pouvoir de Syriza. Les attaques incessantes du quotidien allemand Bild risquent d'attiser la haine et de détruire l'Europe. La surenchère du ministre des Finances allemand, Wolfgang Schäuble, qui semble être pressé de voir la Grèce faire faillite, n'aide pas non plus. Il devrait se rappeler que lors de la conférence de Londres en 1953 son pays a vu sa dette être effacée. La question qu'il faut se poser est si cette diatribe belliqueuse des banquiers européens ne vient pas de leur mauvaise conscience. Le ministre de l'Économie et vice-chancelier allemand Sigmar Gabriel ne peut pas tirer un trait sur le passé nazi de son pays et doit rester conscient des dommages causés à l'étranger. L'Allemagne pourrait utiliser une partie de la dette d'au moins 13 milliards d'euros qu'elle a contractée auprès de la Banque nationale grecque en 1942 pour la soulager en ces temps difficiles.

Un véritable chantage
En retenant le versement de la dernière tranche de 7,2 milliards des prêts du deuxième plan d'aide de 2012, les ministres des Finances des pays de la zone euro exercent un véritable chantage sur la Grèce qui est pourtant sur la bonne voie. Son président promet de réduire les privilèges de la petite clique des dirigeants grecs qui a dilapidé les fonds publics. Le clientélisme, les pratiques anticoncurrentielles et l'évasion fiscale du passé n'ont pas été faits par la population pauvre de ce pays. La priorité du ministre des Finances de la Grèce, Yanis Varoufakis, est de créer la croissance économique en restructurant les finances du pays. Sept années de politique de déflation et d'austérité ont fait fondre l'investissement privé et public. Une partie de l'argent qui est actuellement réclamé à la Grèce n'est plus dans ce pays. Elle a été rapatriée en tant que profit dans beaucoup d'entreprises et banques européennes. Une autre partie est dans des comptes de banque de millionnaires qui ont exploité les faiblesses de ce pays. Seule la volonté politique peut conduire à la conclusion d'un accord entre Athènes et ses créanciers. Ceux qui ont retardé ce versement depuis septembre 2014 pour faire pression sur le gouvernement grec jouent avec le feu.

Le bluff européen
Les créanciers de la Grèce montent actuellement un bluff si gros qu'il est surprenant que personne ne rit d'eux publiquement. L'Europe veut mettre la Grèce en faillite ? Chiche ! Toutes les actions entreprises contre ce pays occasionneront des dommages beaucoup plus sévères pour les créanciers que pour les Grecs. Pour arriver à résoudre le problème de la dette grecque, il faut s'assurer que toutes les parties prenantes à qui elle appartient sont incluses dans la solution. La Grèce fait actuellement face à l'arbitraire qui règne dans le monde de la finance internationale ou la géopolitique prend le pas sur les bilans et les États des résultats des entreprises. Le meilleur exemple de cette situation est que l'Union européenne, qui rechigne à dépanner la Grèce, n'a pas hésité à prêter 11 milliards d'euros à l'Ukraine qui a encore moins de chance de rembourser cet argent et n'est même pas un pays membre. Les partenaires européens de la Grèce l'asphyxient financièrement pour l'obliger à reconduire la politique d'austérité qui l'enfonce dans la misère. La BCE a largement dépassé son mandat pour faire de la politique de droite. Les élus européens apprendront à leurs dépens que l'argent n'a pas de pays. Après les îles grecques, ce seront leurs citoyens qui seront passés à la casserole et dégustés dans les paradis fiscaux par les magnats de la finance.

Grexit vers les BRICS ?
L'arrivée de la nouvelle banque des BRICS et l'actuelle guerre que se mène le vieux monde et celui en émergence amènent à un changement de paradigme au niveau du paiement des dettes publiques. Le rapport de force d'un pays peut s'établir autant avec l'argent qu'il doit qu'avec celui qu'il a prêté. Plus la dette grecque sera dangereuse pour l'Europe, plus elle pourra servir d'arme pour protéger sa population. Poutine verrait d'un bon œil les Grecs décider de ne plus payer leurs débiteurs européens et changer de camps en laissant les amis de l'Ukraine dans la dèche. Pendant que l'Europe tergiverse sur son implication, l'approche gagnante prônée par les BRICS s'est traduite par des dizaines d'accords de coopération. Ce type de partenariat a sorti l'Argentine des griffes des fonds vautours en 2013 et pourrait faire de la Grèce un nouveau pays dans la zone d'influence de ces pays émergents. Si un accord est très proche et doit être conclu prochainement, qu'il se réalise rapidement. Pour ne pas finir dans la tombe, l'Europe devrait s'entendre avec la Grèce que ce soit debout ou à genou.

Michel GOURD

Qui mène la stratégie internationale européenne ? Les banques semblent avoir relégué les politiciens au second rang, derrière leurs investisseurs. Où est passé le projet qui donnait le droit à chaque peuple de choisir son destin avec l'aide d'une Union européenne secourable ?Il serait temps que la Grèce ait son prêt et que les médias européens changent de sujet. Cela...

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