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Liban - Assassinat Hariri

Moustapha Nasser livre, pour la troisième fois, un témoignage déroutant au TSL

Le « conseiller » de Saad Hariri lui réclame des compensations devant la cour.

C'est une audience particulièrement agitée qui s'est déroulée hier à La Haye devant la chambre de première instance du Tribunal spécial pour le Liban chargé de juger les assassins de Rafic Hariri. Et pour cause : le témoignage de Moustapha Nasser, invité à la barre par l'accusation, a semé la confusion, suscitant crispations, doutes et objections de part et d'autre.
Ayant rempli pendant plusieurs années le rôle de médiateur entre l'ancien Premier ministre Rafic Hariri et le Hezbollah, dont cinq membres figurent sur la liste des accusés, Moustapha Nasser a été interrogé hier aussi bien par la défense que par l'accusation, qui a demandé à vérifier certaines réponses formulées par le témoin lors d'une audience précédente.
L'intervention corsée de l'accusation à l'égard de son propre témoin n'a pas manqué de susciter le courroux de plusieurs représentants de la défense qui ont objecté à tour de rôle « la façon de faire de l'accusation », invitant celle-ci à déclarer franchement s'il s'agit d'un témoin « non coopérant ».
Le 9 avril dernier, Moustapha Nasser s'était présenté à la cour en sa qualité de conseiller auprès du chef du courant du Futur, Saad Hariri, soulignant qu'il continuait de remplir cette fonction quand bien même les rapports s'étaient refroidis entre eux. Le lendemain, Saad Hariri a annoncé publiquement que M. Nasser n'est plus à son service depuis 2010.
Interrogé hier par le conseil de Moustapha Badreddine, Antoine Korkmaz, puis par les juges, le témoin maintient sa version, soulignant qu'il se considère toujours en fonction tant qu'il n'a pas été notifié du contraire et tant qu'il n'a pas perçu les émoluments et compensations que M. Hariri lui doit toujours. Il affirme à ce propos que lors de sa dernière rencontre avec Nader Hariri, le chef de cabinet de Saad Hariri, soit quelques jours avant sa comparution devant le TSL, Nader lui avait dit ne pas avoir de réponse en ce qui concerne la poursuite de ses services auprès du chef du courant du Futur. « Depuis 2010, avez-vous fourni une consultation quelconque à M. Hariri ? » lui demande alors la juge Janet Nosworthy. « Non, aucune. Aucun contact n'a eu lieu non plus avec M. Hariri », répond le témoin.


M. Nasser est revenu dans son témoignage sur la description de la relation qu'entretenait Rafic Hariri avec le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, soulignant que le rapprochement entre les deux hommes avait pour objectif de consolider la stabilité dans le pays, notamment au moment où la discorde sunnito-chiite commençait à pointer à l'horizon avec l'exacerbation de la guerre en Irak.
Le témoin est ensuite interrogé par la défense au sujet d'une bande vidéo que le conseiller de M. Nasrallah, Hussein Khalil, avait diffusée devant l'ancien chef de la sécurité de Rafic Hariri, Wissam Hassan, en présence du témoin. Ce dernier a affirmé qu'il s'agissait d'une vidéo à caractère « technique » portant sur la scène du crime (du 14 février 2005), et produite par les services de sécurité du Hezbollah. « C'était, dit-il, une tentative de la part du Hezbollah d'aider l'enquête. »
La piste islamique est de nouveau évoquée par la défense dont les questions s'orientent tantôt vers Jund el-Cham, tantôt vers el-Qaëda. À ce sujet, le témoin n'a pas été particulièrement généreux en réponses, assurant ne pas être versé dans les questions sécuritaires.
Guénaël Mettraux, le conseil de défense d'Assad Hassan Sabra, enchaîne en interrogeant le témoin sur la question de savoir « si le rapprochement entre Hassan Nasrallah et Rafic Hariri, d'une part, et entre ce dernier et Bachar el-Assad, d'autre part, avait abouti et qui pouvait en être lésé selon lui ». « Je ne sais pas, dit M. Nasser. Je sais simplement que cela aurait constitué un gain commun à Hariri et à M. Nasrallah ».
Le conseil de Hassan Habib Merhi, Dorothée Le Fraper du Hellen, revient sur la période qui a précédé l'assassinat de l'ancien Premier ministre, évoquant l'alliance électorale entre le Hezbollah et Rafic Hariri et les victoires escomptées en faveur des deux parties. Et de demander au témoin : « Le Hezbollah avait-il donc intérêt à se débarrasser de Rafic Hariri ? » « Je ne vois aucun intérêt parce que l'alliance accordait au Hezbollah ce dont il avait besoin et à Rafic Hariri la même chose. »

 

L'accusation riposte
Le représentant du bureau du procureur, Graeme Cameron, s'engage alors dans un interrogatoire serré, disséquant systématiquement les réponses préalablement formulées par le témoin, dans ce qui est apparu comme une sorte de remise en cause de sa crédibilité. Il revient ainsi sur la réponse présumée du secrétaire général du Hezbollah au sujet de « l'acceptation » du président syrien Bachar el-Assad d'un tribunal arabe et dont il ressort qu'aucun document officiel qui puisse attester le fait n'a été rédigé. L'on apprendra également que M. Nasser n'était pas particulièrement proche du cercle d'amis de l'ancien Premier ministre : Fouad Siniora, Ghazi Youssef, Ghaleb Chamaa, Ghattas Khoury, etc... Une réponse que l'accusation recueille avant de relancer une autre question. Elle demande au témoin s'il n'a jamais entendu de la bouche de Rafic Hariri qu'il se savait menacé par le Hezbollah. Une manière implicite pour le représentant du procureur de laisser entendre que M. Nasser, ne faisant pas partie du cercle de Rafic Hariri, n'était pas la personnalité privilégiée pour ce genre de confidences.


M. Mettraux objecte aussitôt, affirmant qu'il s'agit là d'un contre-interrogatoire en bonne et due forme. « L'accusation doit tout simplement annoncer que le témoin n'est pas coopérant », se plaint le conseil. Le juge Re intervient pour dire que l'accusation cherche simplement à « clarifier » les réponses recueillies préalablement par la défense auprès du témoin. Il mettra toutefois fin aux ardeurs de l'accusation qui continuait à matraquer le témoin de questions déjà formulées.


M. Graeme revient néanmoins sur les propos du témoin qui avait affirmé, au cours d'une audience précédente, que Rafic Hariri ne partageait pas les avis des membres du rassemblement du Bristol, espérant clarifier ce point. Moustapha Nasser – visiblement irrité – s'embarque alors dans une longue et fougueuse explication sur les affinités idéologiques de Hariri – « un nationaliste arabe » – qui, selon lui, divergent de celles que partagent les membres du rassemblement. « C'est un groupe de droite radicalement opposé à la Syrie, alors que Rafic Hariri a toujours laissé les canaux ouverts avec Damas », dit-il. « Rafic Hariri avait la main tendue en direction de toutes les parties. En tant que Premier ministre, il voulait rester au-dessus de la mêlée », conclut le témoin.

 

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C'est une audience particulièrement agitée qui s'est déroulée hier à La Haye devant la chambre de première instance du Tribunal spécial pour le Liban chargé de juger les assassins de Rafic Hariri. Et pour cause : le témoignage de Moustapha Nasser, invité à la barre par l'accusation, a semé la confusion, suscitant crispations, doutes et objections de part et d'autre.Ayant rempli...

commentaires (3)

IL SE CONSIDÈRE TOUJOURS EN FONCTION ET RÉCLAME DES ARRIÉRÉS... TÉMOIN... CHANTEUR... OU POLICHINNELLE ???

LA LIBRE EXPRESSION

09 h 31, le 16 avril 2015

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Commentaires (3)

  • IL SE CONSIDÈRE TOUJOURS EN FONCTION ET RÉCLAME DES ARRIÉRÉS... TÉMOIN... CHANTEUR... OU POLICHINNELLE ???

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 31, le 16 avril 2015

  • D'ailleurs, parfois le meilleur conseiller est celui qui en cinq ans ne donne aucun conseil.

    Halim Abou Chacra

    06 h 03, le 16 avril 2015

  • Manchette : CHANTAGE DEVANT LE TSL ?

    Halim Abou Chacra

    04 h 52, le 16 avril 2015

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