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Liban - Portrait

Jenan Moussa, reporter à vie

Les champs de guerre, la journaliste les connaît bien : devant l'assemblée réunie à l'hôtel Phoenicia, elle s'exprime sur la place des femmes dans les zones de combat. Un métier risqué, raconté avec passion.

« Le journalisme, avant tout, c’est raconter une histoire », confie la jeune reporter.

Superbe dans sa longue robe noire qui lui arrive jusqu'aux chevilles, Jenan Moussa a troqué « ses bottes pour des talons hauts », comme elle s'amuse à le dire sur son compte Twitter, à l'occasion de la troisième conférence annuelle des « Femmes sur les lignes de front ». Chaleureuse et souriante, naturelle et élégante, on peine à imaginer la jeune Libanaise sur les champs de bataille. Et pourtant, du haut de ses trente ans, Jenan accumule les couvertures médiatiques des zones de conflit. Libye, Égypte, Mali, Syrie et aujourd'hui Irak, c'est avec la même passion et la même détermination que la jeune femme parle de ses expériences professionnelles.
Tout a commencé au Liban, son pays, dont elle a été témoin des événements de 2006. « Vous savez, dit-elle dans un anglais impeccable, quand on grandit au Liban, on s'habitue aux horreurs de la guerre. On en sort renforcé. » En marge de ses études de journalisme radio et télévision à l'AUST de Beyrouth, Jenan s'initiait déjà aux reportages, mais « dans l'ombre », précise-t-elle, puisqu'elle ne les signait pas. Aujourd'hui, c'est à Dubaï qu'elle travaille pour la chaîne de télévision al-Aan. De journaliste de bureau, elle devient grand reporter : un travail qui, selon son supérieur, est fait pour elle.
Devant une audience déjà conquise, elle raconte avec amusement qu'elle a obtenu son travail sept jours avant le printemps tunisien, comme si l'histoire était venue à elle. Car le journalisme, avant tout, « c'est raconter une histoire ». Et malheureusement, aujourd'hui, « les meilleures histoires sont liées à la guerre ». Si le fait d'être une femme reporter, ou femme combattante – à l'image des combattantes kurdes devenues les icônes des réseaux sociaux – peut faire l'objet de « fantasmes », selon ses mots, « cela ne devra plus être le cas ». « Ce qui importe, c'est le métier. Sur le terrain, je ne pense pas au fait d'être une femme, je suis journaliste », dit-elle. En aparté, elle confie que son journal lui permet d'exercer ce métier comme elle le souhaite : « Mon patron ne m'a jamais empêchée d'aller quelque part récupérer une histoire parce que je suis une femme. » C'est même un atout considérable qui n'est pas sans déplaire à la jeune reporter. « Les hommes, poursuit-elle en souriant, veulent nous parler, voire nous impressionner. Donc, il nous arrive d'avoir de meilleures histoires ! Les femmes, elles, vous font confiance et se livrent totalement à vous. Surtout qu'il est difficile, dans une région aussi conservatrice, de les aborder librement. » Jenan avoue même penser avoir un avantage sur les journalistes qui n'ont pas la culture arabe, qui ne connaissent pas ses codes. « Quand j'entre dans une pièce, en Syrie, qu'il n'y a que des hommes en face de moi, je ne vais pas aller leur serrer la main », explique-t-elle. Quant aux risques, elle les connaît. L'expérience de la place Tahrir, en 2011, lui a suffi. « Jamais je ne me suis sentie aussi harcelée, et, sincèrement, j'y réfléchirai à deux fois avant d'y retourner », confie-t-elle. Le risque du métier ? « Chacun est responsable de ses choix, et, de mon côté, je prends toujours mes précautions. Après, on ne peut pas tout prévoir. »
Et la jeune femme aux yeux charbonneux sait de quoi elle parle, même si elle avoue avoir toujours eu de la chance. S'il est inconcevable, « pour beaucoup de femmes arabes », de mettre sa vie familiale de côté, Jenan assume ses choix. « Je n'ai pas d'enfant, cela me facilite la tâche. Mais quoi qu'il arrive, rien ne m'empêchera d'exercer ce métier. J'ai ça dans le sang ! » s'enthousiasme-t-elle. Alors qu'elle s'imagine à soixante ans, un casque sur la tête, une veste militaire sur le dos, la journaliste prend congé. De sa chambre d'hôtel, elle revient métamorphosée pour sortir avec ses collègues. En quelques minutes, elle a troqué robe et talons hauts contre un jean, une veste et des baskets. Rapide et efficace, elle est prête à repartir.

Superbe dans sa longue robe noire qui lui arrive jusqu'aux chevilles, Jenan Moussa a troqué « ses bottes pour des talons hauts », comme elle s'amuse à le dire sur son compte Twitter, à l'occasion de la troisième conférence annuelle des « Femmes sur les lignes de front ». Chaleureuse et souriante, naturelle et élégante, on peine à imaginer la jeune Libanaise sur les champs de...

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