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Moyen Orient et Monde - Témoignages

« Quand ils voyaient la croix tatouée sur notre poignet, ils nous frappaient et volaient notre argent »

Douleur et soif de vengeance pour les proches des chrétiens décapités.

Dans l’église sans toit d’un village pauvre du sud de l’Égypte s’élèvent les prières funèbres des familles de treize cousins chrétiens coptes décapités en Libye par les jihadistes de l’État islamique (EI). Mohammad el-Shahed/AFP

Dans l'église sans toit d'un village pauvre du sud de l'Égypte s'élèvent les prières funèbres des familles de treize cousins chrétiens coptes décapités en Libye par les jihadistes de l'État islamique (EI). Les proches laissent éclater leur douleur et leur soif de vengeance durant la messe organisée quelques heures après le choc provoqué par la vidéo de l'EI montrant la décapitation de 21 chrétiens coptes kidnappés en janvier en Libye. Treize d'entre eux venaient du village d'al-Our, dont Kirollos Boshra, mort à 22 ans. « Mon fils a rejoint la Libye il y a 40 jours, après avoir fini son service militaire, pour gagner de l'argent et préparer son mariage », se lamente son père Boshra Fawzi. « Il est parti pour épouser le ciel, il va avoir la chance de rencontrer le Christ », ajoute ce fonctionnaire d'une cinquantaine d'années. Comme lui, d'autres hommes, vêtus de la traditionnelle djellabah du sud de l'Égypte, laissent libre cours à leurs sanglots dans l'église.

 

(Lire aussi : L’Égypte bombarde l’EI en Libye pour venger les coptes décapités)


Des lamentations de femmes, habillées en noir et les cheveux couverts d'un voile, s'échappent aussi d'une maison où elles se sont réunies, au milieu des rues étroites et poussiéreuses du village, bordées de petites bâtisses en terre ou en brique rouge. Dans cette province de Minya, la minorité copte, qui représente moins de 10 % de la population égyptienne, est très présente et parfois victime d'attaques ou de vexations. Comme des centaines de milliers de leurs compatriotes travaillant en Libye dans le secteur de la construction ou des services, les treize chrétiens d'al-Our avaient immigré dans l'espoir d'une vie meilleure. Kirollos Boshra gagnait ainsi près de 22 euros par jour, soit cinq fois plus que ce qu'il pouvait espérer dans sa province natale. Tous cousins, ces hommes habitaient ensemble en Libye avant que les jihadistes de l'EI ne prennent d'assaut leur domicile et ordonnent au propriétaire de leur livrer « les chrétiens », rapportent leurs proches.

 

(Lire aussi : Copenhague : un suspect d'origine palestinienne au lourd passé de délinquant)

 

« Venger la mort de nos fils »
De nombreux villageois, revenus sains et saufs de Libye, dénoncent les exactions dont ils ont été victimes en raison de leur religion, dans un pays où les autorités n'arrivent pas à contrôler les dizaines de milices armées qui font la loi. « Des Libyens nous faisaient descendre de nos voitures sous prétexte de vérifier nos passeports, et quand ils voyaient la croix tatouée sur notre poignet, ils nous frappaient et volaient notre argent », se souvient Emad Khalaf, 35 ans, rentré de Benghazi depuis près de 8 mois.
La violence de la vidéo diffusée par l'EI a semé la panique parmi les familles ayant toujours un proche coincé en Libye. « Mon frère est plombier à Misrata depuis un an et demi, sa femme et ses enfants sont avec lui », raconte, angoissé, Daoud Aziz. « Il m'a appelé aujourd'hui, il veut rentrer immédiatement, mais le premier avion qu'il a trouvé est dans deux semaines. » Pour les familles des victimes, le seul espoir reste maintenant de pouvoir récupérer les corps pour organiser un enterrement. Mais la soif de vengeance est bien présente. « Il faudrait que le président Abdel Fattah al-Sissi nous laisse nous enrôler dans l'armée, et nous envoie là-bas afin que nous puissions venger la mort de nos fils », assène M. Fawzi.
Dans l'immédiat, les autorités ont notamment promis plus de 22 000 euros de compensations aux familles des victimes, la moitié de cette somme ayant été offerte par une entreprise privée.
Mais pour Isis, qui a perdu ses deux fils Samuel, 26 ans, et Bishoï, 23 ans, « rien ne peut remplacer vos enfants ».

 

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