Rechercher
Rechercher

Économie - Bilan 2014 - Trois questions à Riad Saadé

« La qualité agricole s’est améliorée, mais pas les ventes »

Avec un PIB stagnant au niveau de celui des années 1970, l'agriculture libanaise se porte très mal. Pourtant, dans ce contexte morose, 2014 était plutôt une bonne année : qualité et quantités se sont améliorées, mais la commercialisation des produits agricoles reste obsolète et plombe toujours les résultats.

Riad Saadé, président du Creal, dresse un bilan accablant de l’état de l’agriculture libanaise. Photo Vincent Sannier

Quel bilan dressez-vous de l'agriculture en 2014 ?
L'agriculture libanaise est à l'agonie. Avec un PIB stagnant au même niveau depuis les années 1970, le secteur compte pour 4 à 5 % du PIB national. Ce constat s'explique par la destruction des structures qui organisaient le secteur avant la guerre de 1975 et qui n'ont jamais été remplacées. Il est aussi le fait du désintérêt de l'État pour un secteur laissé totalement à l'abandon depuis 40 ans. Mais des catastrophes naturelles ont aussi joué un rôle en 2014. Citons la sécheresse, qui sévit depuis novembre 2013. Elle a affecté les rendements, de l'ordre de 25 à 30 % pour la pomme de terre ; de 15 à 20 % pour le blé. Le Liban a aussi connu plusieurs périodes de gel l'an passé, dont une pendant la floraison des fruits à noyaux, qui a détruit la récolte des pêches et d'abricots. Sans bien sûr qu'aucune indemnisation publique n'ait été envisagée.

En 2012-2013, l'agriculture avait bénéficié de l'absence de la concurrence syrienne pour trouver de nouveaux débouchés, en particulier à l'exportation. Est-on revenu en arrière ?
2014 est globalement une assez bonne année en termes de quantité et de qualité. Mais cela ne suffit pas. Encore faut-il avoir une distribution fiable. Or, la commercialisation reste primitive, marquée par des fraudes et des malversations. Le secteur est gangréné par des mafias, dont le trafic se fait aux dépens des agriculteurs, qui ne touchent pas le « juste prix » de leur production, et des consommateurs, qui ne sont pas satisfaits des produits achetés. Aujourd'hui, les stocks sont en train de s'accumuler : 200 000 tonnes de pommes de terre sont toujours dans les frigos. Ce qui représente près de 45 % de la récolte ! On recense encore 63 000 tonnes d'oignons invendues. De facto, cette situation tire les prix vers le bas : entre 300 et 500 livres libanaises le kilo de pommes de terre ; entre 200 et 325 livres libanaises pour le kilo d'oignons. La raison de cette crise ? À cause de la guerre, les camions ne peuvent plus emprunter les routes syriennes, voies de transit « naturelles » de presque 80 % des exportations agricoles. Il faut, en plus, ajouter la montée en puissance de l'État islamique, qui a fermé le marché irakien. L'État a bien tenté en 2012 d'assurer une solution de rechange avec la mise en place d'une desserte maritime vers Aqaba et le Golfe. Mais cette alternative onéreuse ne s'est pas maintenue, laissant producteurs et commerçants sans solution de repli.

Que pensez-vous du plan gouvernemental de 300 millions de dollars pour l'agriculture libanaise ?
L'État a annoncé ce plan afin d'augmenter la production intérieure brute agricole de 2,3 à 3 milliards de dollars. Il s'inscrit dans le cadre d'un programme de l'Union européenne en place depuis 2011. Subira-t-il le même sort que les précédents plans européens, dont l'impact sur le terrain a été au mieux insignifiant ? L'expérience passée contraint au pessimisme. Mais je ne veux pas finir sur cette note d'amertume. Malgré tout, l'agriculture présente d'indéniables succès. Avec une leçon à en tirer : à chaque fois, il s'agit de projets qui contrôlent toute la chaîne de valeur, depuis la production jusqu'à la commercialisation du produit fini. C'est le seul moyen pour l'agriculteur de gagner de l'argent en faisant son métier.

Président du centre de recherche et d'études agricoles libanais (Creal)

Quel bilan dressez-vous de l'agriculture en 2014 ?L'agriculture libanaise est à l'agonie. Avec un PIB stagnant au même niveau depuis les années 1970, le secteur compte pour 4 à 5 % du PIB national. Ce constat s'explique par la destruction des structures qui organisaient le secteur avant la guerre de 1975 et qui n'ont jamais été remplacées. Il est aussi le fait du désintérêt...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut