Rechercher
Rechercher

Campus

Quand l’ISSPA élit un président

Le Parlement ayant décidé de proroger son mandat jusqu'en 2017, les étudiants de l'Institut supérieur des sciences politiques et administratives (ISSPA) de l'Usek ont choisi de simuler l'élection présidentielle. En costard cravate ou en jupes et vestes noires, les jeunes « députés » de l'ISSPA ont élu leur président le 13 novembre.

Les étudiants de l’ISSPA avec leur professeure, May Maalouf Monneau.

L'idée de simuler une présidentielle en attribuant à chaque étudiant un rôle, chef du Parlement, député, conseiller, etc., n'est pas nouvelle à l'Usek. Depuis mai dernier, date du blocage de l'échéance présidentielle, le Dr May Maalouf Monneau, professeure de sciences politiques et relations internationales à l'ISSPA, mijote à feu doux le projet. «La conjoncture politique actuelle laisse à désirer et, depuis la création du Grand Liban en 1920, notre histoire est celle d'un divorce entre l'État et sa société. Cette brisure s'est accentuée en 1958, au moment où le pays a connu sa première crise interne. Notre initiative aujourd'hui s'inscrit dans le sillage de la réconciliation de l'État avec sa société, avec les jeunes plus précisément», explique le Dr Maalouf Monneau.
L'événement, qui a eu lieu à la salle de conférences de l'université, visait à débarrasser les étudiants de tout bagage politisé. «Les quatre candidats qui se sont présentés à l'élection ont proposé des programmes électoraux bien étudiés et applicables à long terme. D'ailleurs, aucun d'eux ne s'est rangé dans un camp précis ; que ça soit celui du 14 Mars ou du 8 Mars», poursuit May Maalouf Monneau. Le Dr Georges Yahchouchi, directeur de l'ISSPA et prorecteur à l'assurance qualité et à l'enseignement, a écarté l'idée de motivations d'une telle initiative: «L'élection simulée est un passage obligé pour nos étudiants afin qu'ils se sentent engagés dans le processus politique au Liban. Ce n'est pas une activité notée. Les étudiants se sont portés volontaires pour mettre en place tous les préparatifs de cet événement.» Et de
poursuivre: «Les "candidats" à la présidentielle simulée ont eu des discours différents et ont présenté une large palette de projets réformateurs, dont le développement du secteur agricole, la présentation d'un projet de loi protégeant la femme de la violence domestique, etc. Cela n'est pas nouveau à l'Usek, vu que l'an dernier, des simulations du Parlement européen ainsi que du Conseil de sécurité s'y sont déroulées.»

Le vote
Les 23 étudiants en sciences politiques sont tous réunis. Pas besoin de quorum, la salle de conférences est pleine. Les tergiversations, les manœuvres politiques et les intentions mégalomaniaques n'ont pas de place dans cette assemblée. Un rappel de l'article 49 de la Constitution libanaise est effectué par l'étudiant Freddy Abi Khalil. Pamela Hnein ouvre la session parlementaire et introduit les quatre candidats à la présidentielle : Sarah Gebrayel, Tony Antoury, Wakim Abboud et Rawane Adem. La candidate Sarah Gebrayel évoque dans son programme électoral l'urgence de la neutralité du Liban face aux conflits régionaux. «Le peuple est désespéré, la précarité met en péril le système politico-social et l'élection d'un président de la République devrait être inscrite au haut de l'échelle des priorités», déclare-t-elle. Le candidat Tony Antoury exhorte les jeunes à rester dans leur pays pour y investir leur savoir et leurs compétences. Le Liban, pour lui, devrait reposer sur trois piliers fondamentaux: le vivre-ensemble, des lois équitables et la laïcité. «Il est temps que l'élection présidentielle se fasse au suffrage universel. Ainsi, le peuple jouira-t-il de la manière la plus égalitaire de son droit démocratique», propose-t-il. Il suggère également la formation d'un Sénat pour que toutes les tranches de la mosaïque libanaise confessionnelle soient représentées, y compris les minorités. Rawane Adem précise que la fatalité n'existe pas et que le pouvoir de changement est entre les mains des jeunes. Dans son allocution, elle signale que la question de la protection de la femme contre la violence domestique ainsi que l'amendement de la loi sur les statuts personnels est d'actualité. «Il faut œuvrer pour la réforme du pays à tous les niveaux», clôture-t-elle. L'étudiant Wakim Abboud se penche dans son programme sur les droits des enfants libanais à jouir d'une éducation digne si l'on veut qu'ils ne versent pas dans la mendicité et la délinquance. Pour lui, le chômage dans la société libanaise constitue un fléau qu'il faut éradiquer à tout prix.
Le vote s'effectue sur deux tours. Au premier tour, les candidats Wakim Abboud et Rawane Adem sont écartés avec un et deux votes respectifs. Au deuxième tour, c'est le candidat Tony Antoury qui est élu président par ses camarades. Sarah Abou Tacca, étudiante en deuxième année de relations internationales, aurait aimé qu'une telle présidentielle se soit déroulée au Parlement. «Ça nous aurait épargné le vide institutionnel dans lequel se trouve plongé notre pays», s'indigne-t-elle.
Une simulation? Et pourquoi pas une vraie élection qui inciterait au changement? Dans un pays au bord du gouffre, les étudiants de l'ISSPA de l'Usek ont prouvé que l'esprit démocratique n'a pas complètement disparu.

L'idée de simuler une présidentielle en attribuant à chaque étudiant un rôle, chef du Parlement, député, conseiller, etc., n'est pas nouvelle à l'Usek. Depuis mai dernier, date du blocage de l'échéance présidentielle, le Dr May Maalouf Monneau, professeure de sciences politiques et relations internationales à l'ISSPA, mijote à feu doux le projet. «La conjoncture politique actuelle...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut