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Lifestyle - Pendant ce temps, ailleurs... - Disparition

Mike Nichols a fait ses derniers adieux à Mrs. Robinson...

Dustin Hoffman et Anne Bancroft dans « The Graduate ».

Il possédait ce don inouï de pouvoir ressortir toute la grandeur, toute la démesure, toute la rage sédimentée au plus profond de ses acteurs, dans le cadre de ce drame absolu et permanent qu'est la vie quotidienne. Dans l'espace théâtral de ses mises en scène à l'écran, il donnait ainsi en pâture aux spectateurs le déchirement de personnalités exaltées et torturées, bestiales même, exhibant jusqu'à l'indécence, parfois jusqu'à l'obscénité, les recoins les plus sombres, les plus nus et les plus tortueux de l'âme et des relations humaines.


Le réalisateur Mike Nichols, né Mikhaïl Igor Perschkowsky, est décédé hier à l'âge de 83 ans d'une défaillance cardiaque, selon les médias américains. Né en Allemagne en 1931, de père russe et de mère allemande, sa famille avait fui, en 1938, le régime nazi pour New York.

 

 

 


En soixante ans de carrière, Nichols a obtenu toutes les distinctions, notamment un oscar, un Emmy, un Grammy et neuf Tony Award, preuve éclatante de l'étendue de son talent. En 2010, il avait obtenu le Life Achievement Award de l'American Film Institute pour l'ensemble de son œuvre. Et quelle œuvre !
S'il est vrai que le cinéma, sous son aspect industriel, accorde aujourd'hui une nette prépondérance aux effets visuels sur tout le reste, Nichols, lui, avait surtout un talent fou pour diriger ses acteurs. Ce n'est pas pour rien qu'il a été à l'origine de 17 nominations aux oscars pour les acteurs qu'il a dirigés comme Elizabeth Taylor, Richard Burton, Meryl Streep, Jack Nicholson, Anne Bancroft, Dustin Hoffman, Katharine Ross, George Segal, Cher, Sigourney Weaver, Melanie Griffith, Kathy Bates et, plus récemment, Natalie Portman, Clive Owen ou Philip Seymour Hoffman.

 

 


Son premier film était d'ailleurs un véritable coup de maestria : en 1966, le sublime et fascinant Who's Afraid of Virginia Woolf ? , un huis clos relationnel entre deux couples d'une violence morale et verbale rare, surtout pour l'époque, avait ainsi été le premier long-métrage en salle à être interdit aux moins de 18 ans aux États-Unis. Elizabeth Taylor avait pris trente kilos, dans une transformation physique saisissante, presque monstrueuse, pour y affronter Richard Burton à coups de répliques fielleuses, corrosives, terrifiantes de hainamoration.


Mais le summum de son art, Nichols devait l'atteindre l'année suivante, en 1967, avec The Graduate, faisant voler une fois de plus en éclats des tabous d'une Amérique de moins en moins puritaine. Dustin Hoffman, en jeune diplômé gauche, candide et primesautier, s'y laissait ainsi séduire par Mrs. Robinson, une Anne Bancroft transfigurée en femme mûre (c'était Jeanne Moreau qui avait été pressentie à l'origine pour le rôle), avant de tomber amoureux de sa fille, interprétée par Katharine Ross. Près de cinquante ans plus tard, The Graduate, mélange unique et délirant de tous les genres au rythme des ballades de Simon and Garfunkel, n'a rien perdu de sa fraîcheur. Il est devenu l'icône de toute une génération et figure sans doute au panthéon des plus grandes œuvres du cinéma contemporain.

 

 

 


Et puis il y a tout le reste, notamment Carnal Knowledge (1971), dans la foulée du cinéma enfonçant encore plus de tabous sociaux, les drames Silkwood (1983), Heartburn (1986) ou Postcards from the Edge (1990), avec l'excellente Meryl Streep, les comédies, dont il ne faut retenir que Working Girl (1988) avec Harrison Ford et Melanie Griffith, ou encore le mythe du loup-garou récupéré pour revisiter le drame social et psychosexuel, avec le Wolf (1994) de Jack Nicholson.
Étrangement, son dernier grand opus venimeux, érotique et jouissif, Closer (2004, suivi il est vrai de Charlie Wilson's War), paraît boucler la boucle. Une sorte de retour aux origines, à un Virginia Woolf évidemment plus moderne, plus trash, plus explicite encore verbalement et visuellement, mais néanmoins nettement moins percutant.


Mais s'il faut retenir, in fine, une image de l'œuvre du maestro Mike Nichols, c'est bien celle, en clôture de The Graduate, du couple
Hoffman-Ross, après l'élan passionnel et tragi-comique qui les a de nouveau réunis. Deux personnages abasourdis, aux figures déjantées, presque interloqués par leurs actes et perdues dans la grande absurdité des rapports humains et de l'humanité en général, infiniment petits devant l'immensité de la vie, ses improbabilités et son chaos.

Il possédait ce don inouï de pouvoir ressortir toute la grandeur, toute la démesure, toute la rage sédimentée au plus profond de ses acteurs, dans le cadre de ce drame absolu et permanent qu'est la vie quotidienne. Dans l'espace théâtral de ses mises en scène à l'écran, il donnait ainsi en pâture aux spectateurs le déchirement de personnalités exaltées et torturées, bestiales...

commentaires (2)

Film culte , mais pourquoi c'est Mike Nichols qui passe l'arme a gauche et on ne voit que la photo de Dustin Hoffman ???

FRIK-A-FRAK

11 h 14, le 21 novembre 2014

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Commentaires (2)

  • Film culte , mais pourquoi c'est Mike Nichols qui passe l'arme a gauche et on ne voit que la photo de Dustin Hoffman ???

    FRIK-A-FRAK

    11 h 14, le 21 novembre 2014

  • La scène la plus attachante du "Graduate", c'est quand Dustin Hoffman à l’intérieur de l'église, crie son nom de derrière une vitre épaisse à Katarine Ross afin de la dissuader de dire oui à son "mariage" qui était en train d'être célébré ! É m o u v a n t !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    05 h 23, le 21 novembre 2014

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