Selon le 14 Mars, c’est l’Iran qui bloque la présidentielle libanaise

Comme il l'avait fait avec la proposition de Saad Hariri et avec celle de Samir Geagea, le 8 Mars a une fois de plus rejeté sans la moindre explication l'initiative du 14 Mars lors de la onzième séance parlementaire pour l'élection d'un nouveau président de la République. La question qui se pose désormais est la suivante : pourquoi le 8 Mars refuse-t-il systématiquement toutes ces propositions ?
Les milieux proches du chef du CPL, le général Michel Aoun, affirment que ce dernier a présenté à plusieurs reprises des propositions pour aboutir à un déblocage politique, et elles ont toutes été rejetées par le 14 Mars. La dernière en date était la proposition d'élire le président au suffrage universel en deux temps, d'abord au sein de la communauté chrétienne et ensuite au niveau national, dans le but de renforcer la présidence en lui donnant une légitimité populaire et en améliorant la représentation chrétienne à la tête de l'État. Les sources proches de Aoun rappellent que le 14 Mars s'était contenté de dire que cette proposition n'arrive pas au bon moment et l'a rejetée sans autre forme de discussion ou d'explication.
Au sujet de la dernière proposition du 14 Mars, les sources proches de Aoun précisent qu'elle n'apporte rien de nouveau. Elle s'inscrit dans le cadre de la surenchère et de la manœuvre. Selon ces sources, si le 14 Mars était réellement sérieux dans sa volonté d'aboutir à un déblocage, Saad Hariri serait revenu au Liban et participerait aux séances parlementaires consacrées à l'élection d'un président.
Bien entendu, le 14 Mars n'est pas de cet avis. Tout en refusant d'ouvrir de nouvelles polémiques, ce camp est convaincu que c'est le général Aoun qui bloque le dossier présidentiel et se cache derrière sa proposition pour ne pas avoir à participer aux séances parlementaires. Selon un ancien député membre du 14 Mars, le boycott des séances parlementaires est un manquement aux responsabilités constitutionnelles des députés et il n'y a aucune jurisprudence ni aucun exemple dans le monde qui justifient une telle attitude.
Reste à savoir pourquoi le 8 Mars tient-il tellement à boycotter les séances parlementaires et à maintenir la vacance à la tête de l'État, dans une période aussi sensible ? Une source du 14 Mars affirme à cet égard que le Hezbollah ne fait en réalité qu'obéir à une injonction iranienne qui exige le maintien de la vacance en attendant des développements qui seraient plus favorables à un déblocage. La source du 14 Mars rappelle que c'est exactement ce qui s'est passé lors de la formation du gouvernement de Tammam Salam qui a été bloqué pendant plus de dix mois avant de connaître soudain un heureux épilogue à travers la renonciation par le 8 Mars d'exiger le tiers de blocage ou la formule 9-9-6. Selon la source du 14 Mars, l'Iran continue pour l'instant de lier le dossier libanais au dossier syrien. Elle ne cherche pas à faciliter un accord au Liban tant que l'Occident, et en particulier la France, continuera de refuser une participation du régime de Bachar el-Assad au front de lutte contre le terrorisme de Daech. Le président français a en effet souligné récemment que le régime syrien et Daech sont les deux faces d'une même monnaie.
Selon une source diplomatique européenne, l'Iran ne peut pas accepter aussi facilement de renoncer d'un coup au Premier ministre irakien Nouri al-Maliki, au président syrien Bachar el-Assad et d'assurer l'élection d'un président qui ne soit pas acquis à sa cause au Liban. Mais cette source est convaincue que tout comme l'Iran a accepté de partager la décision en Irak, après l'avoir détenue toute seule pendant des années, elle finira par accepter de renoncer à Assad au profit d'une personnalité sunnite ou d'un conseil de commandement et à accepter l'élection d'un président au Liban.
D'ailleurs, selon cette source diplomatique européenne, il ne faut pas lier le Liban aux dossiers régionaux. Car la situation dans ce pays ne peut pas attendre des mois, voire des années. La solution devient de plus en plus pressante. Malgré cela, un ministre informé estime que les Iraniens bloquent l'élection présidentielle, car ils veulent donner au régime syrien un droit de veto sur les candidats. Dans ces conditions, il est clair que l'élection d'un président de la République devra attendre encore quelque temps, précise ce ministre qui ne pense pas qu'il y aura un déblocage avant 2016, du moment que le dossier libanais n'est pas une priorité ni pour les Iraniens, ni pour les Saoudiens, ni encore pour la communauté internationale.
D'autres informations penchent au contraire pour un règlement rapide de la question présidentielle libanaise, dans le cadre des contacts internationaux qui se déroulent actuellement, à cause notamment de l'instabilité grandissante qui devient une menace sérieuse pour le Liban.