Pensez-vous que l'une des raisons de la dernière guerre de Gaza soit le désir d'Israël de briser la réconciliation interpalestinienne ?
Plusieurs raisons expliquent la dernière offensive israélienne contre le Hamas à Gaza. D'abord, il est dans l'habitude de l'État hébreu de frapper le Hamas pour affirmer sa force de dissuasion. En effet, les renseignements israéliens avaient des informations bien établies concernant les tunnels creusés à partir de Gaza vers Israël, menaçant ainsi la sécurité nationale. Les frappes israéliennes visent en outre à détruire régulièrement le stock de missiles en possession des groupes armés palestiniens ainsi que les usines de fabrication de roquettes.
Ensuite, l'attaque israélienne contre le Hamas peut être comprise comme un acte de représailles suite à l'enlèvement et à l'assassinat de trois jeunes Israéliens, imputés par les autorités israéliennes au Hamas.
Enfin, il est évident que la réconciliation palestinienne et le gouvernement d'union nationale entre le Fateh et le Hamas ont mis Israël en rage. Il suffit de voir comment le gouvernement de Netanyahu a violemment réagi en suspendant tout contact avec les Palestiniens et en coupant les fonds destinés à l'Autorité palestinienne. Saboter le cabinet palestinien en semant la discorde entre les deux parties serait évidemment à l'ordre du jour des autorités israéliennes.
Toutefois, les calculs israéliens ont mal tourné, surtout que les renseignements de l'État hébreu ont échoué à mesurer la force de frappe et de menace des groupes palestiniens à Gaza.
Certains observateurs estiment que le Hamas, en perte de vitesse, de plus en plus isolé surtout avec la perte de soutiens de poids comme les Frères musulmans en Égypte et le régime syrien, a essayé de se remettre en selle en incitant à la confrontation avec Israël. Qu'en pensez-vous ?
Il est très difficile d'affirmer que le Hamas est derrière la confrontation avec Israël. Je dirais plutôt que l'Iran est indirectement derrière la tension entre les deux parties. Plusieurs informations, qui ne peuvent malheureusement pas être prouvées, estiment que Téhéran a encouragé certains membres du Hamas qui lui sont proches ainsi que des activistes d'autres groupes armés à Gaza à la confrontation avec Israël.
Le rôle de l'Iran est d'autant plus important pour le Hamas que ce dernier a perdu son pari d'un Moyen-Orient islamiste, allant de la Tunisie à la Turquie, surtout après la déroute des partis fondamentalistes en Tunisie, en Libye et en Égypte.
En tout cas, même si les causes du début du conflit ne sont pas perceptibles, il est évident que le Hamas a profité de la guerre pour redorer son blason. Ce succès est palpable concernant les discussions qui ont lieu actuellement en Égypte, où le Hamas négocie sur deux fronts. D'une part avec Israël pour briser le blocus de Gaza, et d'autre part avec Le Caire pour reprendre la coopération politique et sécuritaire avec ce pays voisin et ouvrir le point de passage de Rafah.
Néanmoins, on peut noter que la position ferme du Hamas concernant ses négociations avec Israël se concentrent uniquement sur des sujets d'ordre humanitaire, comme la fin du blocus, un cessez-le-feu, l'importation de matières de première nécessité, etc. De ce point de vue, les demandes du Hamas sont plutôt modestes.
La guerre de Gaza aura-t-elle des conséquences sur les relations entre le Fateh et le Hamas ?
Parallèlement aux négociations entre le Hamas d'une part et Israël et l'Égypte d'autre part, le mouvement islamiste devra renégocier ses conditions avec le Fateh, surtout si les résultats de ses discussions avec l'État hébreu lui sont favorables.
En position de force, le Hamas devra surtout négocier qui gouvernera la bande de Gaza, que faire des 41 000 fonctionnaires embauchés par le mouvement islamiste, etc. Avec le Fateh, les demandes de Hamas seront plus radicales.
Si les négociations actuelles échouent – à savoir si le Hamas ne pourra pas avoir une levée du blocus –, Mahmoud Abbas, qui a toujours critiqué la résistance armée, fourbira ses armes pour montrer que la guerre n'a apporté que mort et désolation pour les Palestiniens, sans aucune contrepartie. Sans oublier qu'en cas de concession de la part du Hamas, d'autres groupes radicaux à Gaza pourraient hausser le ton contre le mouvement de Khaled Mechaal et lui demander des comptes.
Dans les deux cas, les relations entre le Fateh et le Hamas devraient se détériorer avec la fin du conflit armé à Gaza.
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07 h 50, le 13 août 2014