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Moyen Orient et Monde - Le point

Qui a gagné, qui a perdu ?

Les guerres, c'est souvent des images. Ou plutôt une seule image qui, la paix revenue, reste longtemps imprimée sur la rétine. La folie vietnamienne demeure incarnée, quarante-deux ans après, par la photo d'une fillette, Kim Phuc, courant nue sur la route pour échapper au napalm déversé sur le village de Tran Bang. À Robert Doisneau – dont Prévert disait que « c'est toujours à l'imparfait de l'objectif qu'il conjugue le verbe photographier » –, on doit le baiser de l'Hôtel de Ville marquant la libération de Paris et le commencement de la fin de la boucherie de 39-45. Au deuxième jour de l'intifada de septembre 2000, le comble de l'horreur, le monde le découvre grâce aux quelques secondes, filmées par un cameraman de la chaîne France-2, Talal Abou-Rahma, où l'on voit le père de Mohammad el-Dourra appelant vainement au secours, son enfant agonisant dans ses bras, non loin de la colonie de Netzarim.


Dominant les premiers bilans de cet été meurtrier, basés sur le nombre de victimes, l'étendue et le montant des destructions, les milliards que nécessitera la reconstruction, il y aura toujours ces quelques secondes où l'on voit quatre enfants jouant, insouciants, sur la plage de l'enclave avant d'être fauchés par la mitraille de leurs bourreaux. Contre cela, toutes les « Bordures protectrices » ne peuvent rien, pas plus que les misérables tentatives de la propagande israélienne ou les « enquêtes » qui resteront, soyons-en assurés, sans lendemain. Commentateurs et analystes s'évertuent depuis quelques jours, suivant en cela les normes en usage depuis des siècles, à identifier le vainqueur et le vaincu, pour aboutir à la conclusion que l'entreprise est ardue et, en tout cas, pour le moins prématurée. Les plus audacieux se hasardent à dire qu'Israël a gagné sur le plan tactique mais perdu sur le plan stratégique, ou encore qu'il a vaincu militairement mais pas politiquement.


Le fait même que le débat se trouve engagé alors même que l'on en est encore à discuter au Caire des modalités d'un cessez-le-feu, forcément limité dans le temps, ainsi que des moyens d'en étayer les bases, signifie que l'on en est encore aux premières conclusions, discutables parce que fragmentaires et dominées déjà par la conclusion (il ne faut pas se lasser de la rappeler) que Henry Kissinger tirait dès 1969 de l'engagement US au Vietnam : « Nous avons mené une guerre militaire, nos adversaires ont mené une guerre politique (...). Nous avons oublié la maxime fondamentale de la guérilla : celle-ci gagne si elle ne perd pas, alors qu'une armée conventionnelle perd si elle ne gagne pas. »
Les Israéliens viennent d'effectuer, « mission accomplie », leur quatrième retrait de la décennie, tunnels détruits, puissance de feu du Hamas réduite à 80 pour cent, infrastructures anéanties, veut-on nous faire croire. Voire.


Au plan militaire, les effectifs des Brigades Ezzedine el-Kassam, 25 000 hommes, sont intactes, n'ayant pas engagé directement avec l'ennemi, exception faite de rares opérations, via les fameux tunnels, qui se sont avérées payantes pour eux comme le prouve le bilan de 64 soldats israéliens tués, soit cinq fois plus que lors des confrontations précédentes. Tout comme en 2006 au Liban, les services de sécurité n'ont pas « vu » les tunnels et l'unité d'hommes-grenouilles, pas plus que les mesures destinées à neutraliser – de manière limitée, il est vrai – les capacités de leur espionnage informatique.


Au plan politique, le Hamas fait figure de vainqueur, ayant récupéré la rue arabe, gagné une partie de l'opinion publique internationale et rétabli une forme de légitimité qui paraissait lui échapper. D'après un sondage de l'institut Awrad, établi sur la rive occidentale du Jourdain, l'organisation islamique du tandem Mechaal-Haniyeh jouit d'une cote de popularité de 58 pour cent. La proportion est de 85 pour cent quand il s'agit d'évaluer sa performance durant la guerre, contre 7 pour cent à l'État hébreu. Cette étude devrait inquiéter au plus haut point un Mahmoud Abbas donné pour grand perdant.


Au plan économique, les destructions infligées à la bande de Gaza sont certes énormes, estimées à 6-8 milliards de dollars, contre près de deux milliards pour Israël, en comptant les arrêts de travail, les pertes du secteur du tourisme, le coût de chaque missile tiré dans le cadre du « Dôme d'acier », etc. Pour les Gazaouis, les milliards viendront du Qatar et de divers groupes radicaux.
Plus grave, la nouvelle génération de Palestiniens se révèle être plus dure que son aînée, convaincue que le temps travaille pour elle, sous l'égide de ses chefs, autrement plus charismatiques que les « mous » de Ramallah conduits par Mahmoud Abbas.
Où l'on voit qu'en définitive, ce n'est pas uniquement sur le terrain que la confrontation est asymétrique.

 

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commentaires (2)

Lol ! Cette question est une perche tendue aux imbéciles heureux. Et ils répondent !

Robert Malek

19 h 36, le 13 août 2014

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Commentaires (2)

  • Lol ! Cette question est une perche tendue aux imbéciles heureux. Et ils répondent !

    Robert Malek

    19 h 36, le 13 août 2014

  • 70 ans de guerre faite a un peuple qui a été le moins holocaustique des années 39/45 , 97 ans que le plan Balfour donnait à partir d'angleterre le droit de s'établir en Palestine à des juifs athés , je dis athés parce que les juifs de cette époque était plus communistes ou socialistes que sionistes , 522 ans que les juifs chassés d'Espagne par Isabelle la catholique vivaient protégés parmi les musulmans d'Afrique du nord et du Moyen Orient , et 30 jours de guerre en 2014 entre un état sur armé et au dessus des lois de la communauté internationale et une organisation de résistance qui tient debout en ayant infligé aux usurpateurs de leur terre une raclée magistrale , comme l'avait fait le hezb en 2006 , je dis il n' y a pas photo , la victoire est du côté des résistants , tant que ceux ci ont encore le moindre souffle pour supporter la puanteur de leur envahisseur . Celui qui cherche une trêve en ce moment au Caire chez son larbin ,n'est pas celui qui a le plus souffert sur le terrain de la barbarie , c'est le barbare lui même empêtré dans sa puanteur criminelle .

    FRIK-A-FRAK

    12 h 57, le 12 août 2014

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