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Moyen Orient et Monde - Irak

L’ayatollah Ali Sistani revient dans le jeu politique après des années de silence

Le grand ayatollah Ali Sistani. Photo AFP

La ville de Najaf est loin des palais de Bagdad et des champs de bataille du nord de l'Irak. C'est pourtant là, à l'ombre du dôme doré de la mosquée de l'imam Ali, que se décide en partie le sort incertain du pays.
Reclus dans un bureau austère au fond d'une ruelle gardée par des hommes en armes, le grand ayatollah Ali Sistani, plus haut dignitaire chiite d'Irak, est longtemps resté à l'écart des turbulences que traverse la région. Après l'intervention américaine en 2003 et la chute de Saddam Hussein, il avait plaidé pour la tenue d'élections avant de revenir à la discrétion sur les questions de politique intérieure.

 

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Mais, devant l'offensive des jihadistes sunnites de Daech (État islamique en Irak et au Levant – EIIL), il est soudain sorti de son silence et a prononcé, trois vendredis de suite, des sermons aux accents très politiques. En effet, l'ayatollah de 83 ans, qui exerce un puissant magistère moral et religieux sur les millions de chiites du pays, a exhorté les Irakiens à prendre les armes contre l'insurrection en cours, la première fatwa du genre depuis des décennies. Preuve de son influence, des dizaines de milliers d'hommes ont répondu à l'appel, un renfort précieux pour une armée qui a parfois donné l'impression de se trouver au bord de l'implosion. Ali Sistani a également appelé à la formation d'un gouvernement plus large qui réunisse non seulement les chiites, mais aussi les sunnites et les Kurdes, les deux autres grandes composantes de la société irakienne. Certains, jusque dans les rangs des partisans de l'actuel Premier ministre, Nouri al-Maliki, y ont vu un coup de semonce adressé au chef du gouvernement, voire une invitation au départ. « La porte s'est refermée sur Maliki », résume ainsi un parlementaire chiite.

 

(Dossier : Vers la fin des frontières de Sykes-Picot ?)

 

« Il ne va pas faire machine arrière »
Un membre de l'alliance du Premier ministre reconnaît d'ailleurs que les déclarations de Ali Sistani visent directement Nouri al-Maliki, mais, croit-il savoir, le grand ayatollah ne le pousse pas forcément vers la sortie. « Sistani ne veut pas intervenir dans le choix du Premier ministre, mais il doit y avoir des progrès », témoigne-t-il. Mais voilà : vendredi dernier, Ali Sistani a appelé les différentes composantes du paysage politique à choisir un Premier ministre, un président de la République et un président du Parlement le 1er juillet. « Aujourd'hui, la feuille de route est claire et il y a un calendrier. C'est comme si Sistani avait réussi à acculer tout le monde », juge le parlementaire chiite.
Toutefois, les fatwas lancées par l'ayatollah ne sont pas sans risques politiques : les chefs de file sunnites lui ont déjà reproché d'avoir envenimé le conflit. Et, à plus long terme, ses initiatives posent à nouveau la question du rôle des dignitaires de Najaf, traditionnellement détachés des contingences politiques. « Il a prononcé une fatwa inédite depuis 90 ans, voire plus. Il ne va pas faire machine arrière, il veut jouer un rôle », selon un diplomate occidental qui a une bonne connaissance des arcanes religieuses. Le parlementaire chiite cité plus haut résume ainsi la situation : « Sistani est désormais aux manettes. »

 

 

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