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Lifestyle - Portrait

L’homme qui dompte la gueule du bois

Joy Khoury réalise, seul, tout ce qui est possible et imaginable avec ce matériau originel, et expose ses œuvres à Baabdate.

Au commencement, il y avait la chair. Celle, tendre, du bois. La chair, et le silence.
Quand il coupe le bois ; quand il le travaille ; quand il lui (re)donne la vie ; quand il imagine le meuble ou l'élément ; quand il le conçoit et le (re)modèle ; quand il regarde pour la première fois l'objet de son désir naître au monde et quand il imagine le regard des autres, clients ou juste simples amoureux du bois, se poser sur ce qu'il vient de créer, Joy Khoury est seul. Tout seul. Comme un peintre. « Pourquoi le bois ? Parce qu'il est noble, et qu'il ne salit pas. Comme moi. » Et il n'industrialisera jamais : il ne peut travailler que seul.
Si jamais l'artisan, ou l'artiste, est accompagné, le visiteur, instinctivement, se tait, fasciné par les mains et leur ballet. Des mains qui caressent le bois, y gravent leurs empreintes digitales, le maltraitent pour mieux le magnifier, lui chuchotent à l'oreille et puis l'engueulent; des mains qui se blessent, qui saignent, qui se fendent mais qui s'en foutent : elles sont en terra cognita, elles sont chez elles, ces mains : il y a carrément une fusion-acquisition entre la peau et le bois.


Ces mains ne sont pas seules. Il y a aussi le nez. Joy Khoury renifle constamment son bois : ainsi, aussi, il sait s'il est sain, s'il se porte bien, s'il va lui jouer des tours ou s'il se fera facilement apprivoiser. « Contrairement au fer, le toucher et l'odeur me plaisent, ils me sont pratiquement indispensables. » Parce que l'artisan restructure, aussi, le fer forgé...


Joy Khoury a un ADN particulier. Sur ses rubans désoxyribonucléiques, il y a, certes, les gènes paternels, un grand menuisier, mais il y a aussi, greffés, un mètre pliant, une équerre, un compas, des scies (égoïne, sauteuse, circulaire, peu importe...), un marteau, un maillet, une râpe, une tenaille, un ciseau, un rabot, etc. Il peut tout faire et il fait tout : des tables, des canapés, des fauteuils, des chaises, des bibliothèques, des armoires (à tomber d'amour), des meubles de cuisine, des murs, des escaliers (Stanley Kubrick aurait adoré), des mezzanines, des plafonds, des luminaires, des meubles de métier du XVIIIe siècle, des lits, tout.
« Le meuble me vient à l'esprit quand je vois le bois que j'ai récupéré, sa taille et sa forme initiale m'inspirent. » Joy Khoury n'est pas un théoricien, un réflexif : il est purement battoun, instinctif comme un animal devant sa proie, devant son amour : le bois. Avec lequel, il le dit, il n'aura jamais de mauvaise surprise. Que de la joie. Wood Of Joy.


Dans un monde de plus en plus (et de moins en moins bien) industrialisé, désincarné et désenchanté, cet artisanat forcené et stakhanoviste, cette vocation jusqu'au-boutiste d'une infinie générosité est une vraie résistance. Un acte éminemment politique, donc. Et la/le politique, Joy Khoury est tombé dedans à peine né. Il n'y a pas de hasard(s).

 

 

Au commencement, il y avait la chair. Celle, tendre, du bois. La chair, et le silence.Quand il coupe le bois ; quand il le travaille ; quand il lui (re)donne la vie ; quand il imagine le meuble ou l'élément ; quand il le conçoit et le (re)modèle ; quand il regarde pour la première fois l'objet de son désir naître au monde et quand il imagine le regard des autres, clients ou juste simples...
commentaires (1)

??????? étonnant !!!!

FRIK-A-FRAK

23 h 09, le 30 mai 2014

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Commentaires (1)

  • ??????? étonnant !!!!

    FRIK-A-FRAK

    23 h 09, le 30 mai 2014

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