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À La Une - Russie

Crimée : le conflit entre dans une "phase militaire", avertit Kiev

Poutine signe un accord rattachant la Crimée; l'Ukraine ne reconnaîtra jamais "l'annexion".

 

 

Des transports de troupes blindés ukrainiens, près du village de Salkovo, dans une région limitrophe de la Crimée, le 18 mars 2014, après la signature par Vladimir Poutine, d'un traité pour le rattachement de la Crimée à la Russie. REUTERS/Valentyn Ogirenko

Le Premier ministre ukrainien Arseni Iatseniouk a estimé mardi que le conflit avec la Russie en Crimée entrait dans une phase militaire, après des tirs sur des soldats ukrainiens et la signature par le président russe d'un traité historique pour le rattachement de la Crimée à la Russie.

"Le conflit passe de la phase politique à une phase militaire", a déclaré M. Iatseniouk. "Aujourd'hui les troupes russes ont commencé à tirer sur nos soldats. C'est un crime de guerre", a-t-il affirmé.

Un militaire ukrainien a été tué mardi lors d'une tentative d'assaut contre son unité militaire à Simpéropol, chef-lieu de la Crimée occupée par les troupes russes, a annoncé à l'AFP le porte-parole du ministère ukrainien de la Défense en Crimée. "Au cours de l'assaut contre une base militaire à Simféropol, un militaire ukrainien est décédé après avoir été blessé au cou. Un autre militaire a été blessé", a déclaré Vladislav Seleznev.

Le ministère de la Défense a par la suite annoncé dans un communiqué que les militaires ukrainiens en Crimée ont été autorisés mardi à utiliser leurs armes "pour protéger les vies de nos soldats".

M. Iatseniouk a demandé la convocation d'une réunion des ministres de la Défense ukrainien, russe, américain et britannique "pour éviter la poursuite de l'escalade". La Russie, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne se sont portés garants de l'intégrité territoriale de l'Ukraine après le renoncement par cette ex-république soviétique à son arsenal nucléaire en 1994.

 

La Crimée, partie intégrante de la Russie
Le président Vladimir Poutine a signé mardi un traité historique rattachant la Crimée à la Russie, faisant fi des sanctions occidentales contre Moscou et d'un retour aux pires heures de la Guerre froide.

Aussi bien Kiev que les Occidentaux ont aussitôt fermement condamné cet accord, signé à l'issue d'un discours sous les ors du palais du Kremlin chaudement applaudi par les deux chambres du parlement et les gouverneurs russes réunis pour l'occasion.

L'accord, conclu avec les nouveaux dirigeants pro-russes de Crimée et entérinant l'entrée de la péninsule dans la Fédération de Russie, entrait en vigueur dès mardi, même si le Parlement russe doit encore ratifier une loi en ce sens, une simple formalité.

 

Dans son discours, marqué par des élans de patriotisme et un ton très anti-occidental, M. Poutine a joué sur la fibre émotionnelle et assuré que la Russie ne voulait pas d'une scission de l'Ukraine, deux jours après un référendum en Crimée qui a plébiscité un rattachement à la Russie. "Dans le coeur et la conscience des gens, la Crimée était et reste une partie intégrante de la Russie", a-t-il lancé, affirmant que Moscou aurait "trahi" les habitants de la péninsule si elle n'avait pas répondu à leur appels à les protéger face à la contestation à Kiev qui a abouti à la destitution du président Viktor Ianoukovitch.

La Crimée, qui appartenait à la Russie au sein de l'URSS, avait été offerte en 1954 à l'Ukraine par le numéro un soviétique Nikita Khrouchtchev.

 

Vladimir Poutine, lors de son discours. REUTERS/Maxim Shemetov

 

"Ne croyez pas ceux qui vous font peur au sujet de la Russie, qui vous disent qu'après la Crimée, vont suivre d'autres régions", a déclaré M. Poutine à l'adresse de ceux qui s'inquiètent d'une éventuelle répétition du scénario criméen dans l'est russophone de l'Ukraine. "Nous ne voulons pas la scission de l'Ukraine, nous n'en avons pas besoin", a-t-il ajouté.

 

Le chef de l'Etat russe s'est aussi livré à une dénonciation en règle des Occidentaux qui ont décrété des sanctions contre Moscou, estimant qu'ils avaient "franchi la ligne rouge" et s'étaient comportés de "manière irresponsable" dans la crise ukrainienne. Il les a accusés de faire preuve de "cynisme" et d'agir selon "le droit du plus fort".

"Les sanctions introduites par les Etats-Unis et l'Union européenne sont absolument inacceptables et ne resteront pas sans conséquences", a de son côté déclaré le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov à son homologue américain John Kerry.

 

Ironie russe sur les sanctions
Un conseiller du Kremlin visé par les sanctions, Vladislav Sourkov, a ironisé et jugé que c'était une sorte d'+Oscar+ de la part de l'Amérique, dans la catégorie +meilleur second rôle masculin+". Plutôt symboliques, les sanctions annoncées lundi concernent un nombre limité de hauts responsables russes et ukrainiens pro-russes.

Onze personnes sont visées selon la Maison Blanche : sept Russes et quatre personnes accusées de collusion avec la Russie en Ukraine, dont le président déchu Viktor Ianoukovitch, un conseiller, et deux dirigeants séparatistes de Crimée, Serguiï Axionov et Volodymyr Konstantinov. Parmi les Russes, qui voient leurs éventuels avoirs gelés aux Etats-Unis, figurent le vice-Premier ministre Dmitri Rogozine, la présidente du Conseil de la Fédération (chambre haute du Parlement), Valentina Matvienko, deux proches conseillers de M. Poutine (Vladislav Sourkov et Sergueï Glaziev) et deux élus de la Douma.

Dans le même temps, les ministres européens des Affaires étrangères ont pris des sanctions -restrictions de visas et gels d'avoirs - contre 21 responsables ukrainiens et russes dont MM. Axionov et Konstantinov et des militaires russes actifs en Crimée. De telles sanctions sont inédites dans l'histoire des relations UE-Russie depuis l'effondrement de l'Union soviétique en 1991.

L'option militaire exclue, les Occidentaux comptent sur l'impact d'un isolement international croissant de la Russie. Les Etats-Unis et l'UE, qui comptent parmi les principaux partenaires de Moscou, se réservent la possibilité d'imposer des sanctions économiques et commerciales.

Le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, qui a annulé une visite prévue mardi à Moscou avec le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, a déclaré que Paris pourrait suspendre la vente de deux navires polyvalents Mistral à Moscou, aux termes d'un contrat signé en 2011. Il a toutefois indiqué que le président russe était toujours invité le 6 juin en France aux cérémonies du 70e anniversaire du Débarquement des forces alliées.

 

(Lire aussi : Les dirigeants occidentaux condamnent le rattachement de la Crimée à la Russie)

 

"Rupture immédiate"

A Kiev, le président par intérim Olexandre Tourtchinov a déclaré que l'Ukraine ne reconnaîtrait jamais l'"annexion" de la Crimée par la Russie. Il a accusé Vladimir Poutine de suivre l'exemple de l'Allemagne nazie en "annexant" la péninsule ukrainienne de Crimée.

"Les autorités russes ont lancé aujourd'hui un sale jeu pour annexer la Crimée. C'est avec l'annexion de territoires d'autres Etats par l'Allemagne nazie qu'a commencé la seconde guerre mondiale. Aujourd'hui Poutine suit l'exemple des fascistes du 20e siècle", a-t-il déclaré au cours d'un point de presse.

Le ministre de la Justice Pavlo Petrenko a dit, pour sa part, que l'Ukraine se réservait le droit de saisir les biens de la Russie si celle-ci approuvait la "nationalisation" des propriétés de l'Etat ukrainien en Crimée.

 

"Nous ne reconnaissons et ne reconnaîtrons jamais la soi-disant indépendance et le soi-disant accord sur le rattachement de la Crimée à la Russie", a également déclaré le porte-parole de la diplomatie de Kiev, Evguen Perebyïnis, cité par l'agence Interfax. Après le discours de Vladimir Poutine, le parti de Vitali Klitschko, ex-champion de boxe et candidat à la présidentielle ukrainienne du 25 mai a réclamé "une rupture immédiate" des relations diplomatiques avec la Russie.

Lundi, la diplomatie ukrainienne avait appelé la communauté internationale à ne pas reconnaître la "République de Crimée" proclamée par ses autorités séparatistes, ni son futur accord avec la Russie. Le Parlement ukrainien avait, en outre, approuvé une mobilisation partielle de ses forces armées pour faire face à "l'ingérence de la Russie dans les affaires intérieures de l'Ukraine", et l'octroi de près de 6,9 milliards de hrvynias supplémentaires (530 millions d'euros) pour assurer l'aptitude au combat des forces armées.

 

"Ne croyez pas ceux qui vous font peur au sujet de la Russie, qui vous disent qu'après la Crimée, vont suivre d'autres régions", a lancé M. Poutine aux Ukrainiens. REUTERS/Alexei Druzhinin/RIA Novosti/Kremlin

 

"Hourra!"

Quelque deux mille personnes rassemblées sur la place Nakhimov à Sébastopol, ont suivi le discours du président russe sur un écran géant, l'applaudissant et criant "Hourra!", a constaté un journaliste de l'AFP. "Poutine a raison. Il a raison!", a déclaré Anatoliï Bassov, un retraité de 75 ans, habitant de la ville qui est depuis 230 le port d'attache de la flotte russe de la mer Noire. "Je suis sûr que notre vie sera meilleure après le rattachement de la Crimée à la Russie. Les relations entre la Russie et l'Ukraine doivent être fraternelles", a-t-il affirmé.

Après le référendum de dimanche, les autorités séparatistes de Crimée ont brûlé les étapes pour rejoindre le giron russe, en annonçant tour à tour une proclamation d'indépendance, une demande de rattachement adressée à Moscou, la dissolution annoncée des unités militaires ukrainiennes, l'introduction du rouble et le passage le 30 mars au fuseau horaire de Moscou.

 

Poutine imperturbable

Le maître du Kremlin, sorti renforcé du référendum et dont la cote de popularité en Russie a battu un record depuis sa réélection à la présidence en mai 2012, a clairement montré qu'il restait imperturbable face aux menaces occidentales. Plus de 110.000 personnes se sont rassemblées mardi en fin de journée sur la place Rouge où un concert était organisé pour soutenir la politique du Kremlin, et où M. Poutine est apparu. "Nous sommes ensemble ! Gloire à la Russie", a-t-il lancé à l'assemblée avant que ne retentisse l'hymne russe.

 

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Le Premier ministre ukrainien Arseni Iatseniouk a estimé mardi que le conflit avec la Russie en Crimée entrait dans une phase militaire, après des tirs sur des soldats ukrainiens et la signature par le président russe d'un traité historique pour le rattachement de la Crimée à la Russie.
"Le conflit passe de la phase politique à une phase militaire", a déclaré M. Iatseniouk....
commentaires (5)

Ridicule le premier ministre ukrainien ...par intérim même pas élu...

M.V.

20 h 27, le 18 mars 2014

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Commentaires (5)

  • Ridicule le premier ministre ukrainien ...par intérim même pas élu...

    M.V.

    20 h 27, le 18 mars 2014

  • QUE L'UKRAINE, AVEC DE MAUVAIS CONSEILS, AGISSE MILITAIREMENT CONTRE LA CRIMÉE... POUR METTRE L'OURS DANS UNE MAUVAISE POSTURE S'IL INTERVIENNE ET MÊME S'IL N'INTERVIENNE PAS... LA PROBABILITÉ BIEN QUE TRÈS MINCE EXISTE. OBLIGER L'OURS AU MARCHANDAGE SEMBLE DIFFICILE À CE POINT, DONC LE GONFLEMENT DE LA CRISE, SOUS SES ASPECTS NON MILITAIRES EST ACTUELLMENT EN MARCHE. MAIS... SI DES MISSILES DE CROISIÈRE SONT INSTALLÉS EN POLOGNE.. LES CHOSES PEUVENT CHANGER DRAMATIQUEMENT. LES ESCALADES ABOUTIRAIENT AUX MARCHANDAGES INÉVITABLEMENT !

    LA LIBRE EXPRESSION

    20 h 19, le 18 mars 2014

  • Tout petit gain, pour un petit gnome et nain poutinien en débâcle continue.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    16 h 39, le 18 mars 2014

  • Qui sait comment sabrer le champagne ( rosé) à la Hussarde ? Félicitations à Poutine et à toute la Russie nouvelle puissance mondiale .

    FRIK-A-FRAK

    15 h 30, le 18 mars 2014

  • La Crimée a été considérée depuis toujours comme la terre ancestrale des Tatars.Catherine II annexa la Crimée et en 1884, Potemkine entreprend la construction du port et de la ville de Sebastopol. L'HISTOIRE se répète.

    Sabbagha Antoine

    15 h 15, le 18 mars 2014

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