Rechercher
Rechercher

Culture - Festival al-Bustan

De braises et d’étincelles

« All Beethoven », un récital magistral donné par le pianiste turc Fazil Say et la violoniste Patricia Kopatchinskaja qui a enchanté le public nombreux du festival. Une salle comble qui rendait hommage au compositeur et interprète turc.

Fazil Say et Patricia Kopatchinskaja, un tandem fusionnel.

Elle, c'est Patricia Kopatchinskaja. Elle est moldave, de parents musiciens et surtout elle a du sang tzigane qui coule dans ses veines. Lui, c'est Fazil Say, le pianiste de nationalité turque, Fazil le rebelle. Celui qui sort des sentiers battus, qui joue du Beethoven, du Mozart, du Ravel, du Haydn et, plus tard, du Say (car il est aussi compositeur) à sa manière. Une manière atypique, presque muette, introvertie tout en faisant des étincelles. Du feu incandescent. Lui penché sur son piano et elle pinçant son violon, fabriqué par Giovanni Francesco Pressenda et qui date de 1834, ont présenté au public du Bustan (une salle comble à laquelle on a même ajouté des sièges sur scène) un récital de toute beauté. À l'honneur, bien sûr, un répertoire du grand Ludwig, mais aussi des compositions de Fazil Say interprétées à la fin du spectacle et après plusieurs ovations.

Tout feu, tout flamme
Le pianiste qui était venu au Liban il y a dix ans s'était produit à Beiteddine. Il s'était alors confié à notre consœur Diala Gemayel en disant : « La musique classique n'est pas seulement celle que l'on croit. Il est important de rendre les racines musicales immortelles, surtout celles de notre région et par des temps difficiles comme ceux d'aujourd'hui. » C'était le 27/7/2004. Des paroles qui sont encore et toujours d'actualité. Ce soir devant son clavier, Fazil Say accompagné de Patricia Kopatchinskaja au violon entamaient un langage musical fusionnel. Un duo si compatible, comme s'il était les braises et elle les flammes, lui, le silence et elle la parole, lui l'austère, elle la malicieuse avec ses sourires, ses facéties. Lui la tempête avec ses mains qui quittent par instants le clavier pour esquisser des mouvements aériens. Lui, encore, ce vent qui souffle dans les cheveux de sa compagne. Et elle, à l'écoute, qui répond par un « body language » (langage de corps) incroyable en se tortillant, se contorsionnant, rendant la musique physique, organique, sensuelle. La violoniste qui joue régulièrement avec Fazil Say, Sol Gabetta, Mihaela Ursuleasa, ainsi qu'avec des membres de sa propre famille, est aussi fondatrice du Quartet-Lab, un quatuor à cordes. Elle est attachante, renversante. « Chaque être humain a un lieu où il se sent chez lui : un pays, une famille ou un style de musique. J'ai la chance de disposer d'une patrie de ce genre dans ces trois domaines », avait-elle dit un jour. Ce soir, la jeune musicienne était chez elle. Après avoir adopté Fazil Say, le public ce soir l'adoptait à elle.
Le programme est certes consacré à Beethoven, mais tellement loin du classicisme, du rabâché, du déjà entendu. D'abord la « Sonate pour violon et piano n° 5 en F majeur » baptisée Printemps, suivie, après la pause, par une composition au violon signée Fazil Say et interprétée par la violoniste toute seule, puis par la sonate à Kreutzer. Enfin les deux musiciens reprendront la partition Black Earth du pianiste. Un petit bijou ciselé dans un écrin d'or où l'on devine la signature musicale de Say. Ainsi le pianiste, en plaçant la main gauche sur les cordes du piano et la main droite frappant sur le clavier, donne l'impression de tambouriner l'instrument. Encore un chemin de travers qui, grâce à l'héritage musical des grands, l'aide à retrouver ses propres racines. Sensible et pudique Fazil Say.

Elle, c'est Patricia Kopatchinskaja. Elle est moldave, de parents musiciens et surtout elle a du sang tzigane qui coule dans ses veines. Lui, c'est Fazil Say, le pianiste de nationalité turque, Fazil le rebelle. Celui qui sort des sentiers battus, qui joue du Beethoven, du Mozart, du Ravel, du Haydn et, plus tard, du Say (car il est aussi compositeur) à sa manière. Une manière...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut