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Étrennes de généraux

Au terme d'une année scélérate, avare en cadeaux mais fertile par contre en crises politiques et sanglants attentats terroristes, ce sont de somptueuses étrennes que se voit offrir, pour 2014, l'armée libanaise.
Du jamais-vu en effet, que cette enveloppe de trois milliards de dollars consentie par le royaume d'Arabie saoudite au moment même où il accueillait le président François Hollande et qui doit servir à l'achat de matériel français. Outre la défense de ces frontières que s'accordent à violer allègrement nos deux remuants voisins, ces armements aideront l'armée, pilier essentiel de tout État, à préserver la paix civile et à combattre le terrorisme, soulignait dimanche le président Sleiman en annonçant la bonne nouvelle. Plus que jamais, c'est donc une dure et bien délicate tâche de police qui attend la grande muette.

Ce n'est pas plus mal, à vrai dire. Car c'est bien de l'intérieur qu'est en train de prendre feu la maison libanaise ; et ce sont les frontières dressées entre Libanais qu'il faut, en grande priorité, empêcher de se hérisser de barricades. D'aucuns, c'était prévisible, voient déjà dans le don saoudite un cadeau du diable. Gardons-nous, pour notre part, de faire la fine bouche. Et en cette orée de la nouvelle année, faisons un peu comme ces enfants littéralement recouverts de jouets et qui, pourtant, ne sont jamais satisfaits. Du chef d'une puissance amie comme la France, qui rentre de Riyad chargé de contrats ou promesses de contrats, est-ce trop attendre par exemple une rallonge gracieuse en nature sur la liste d'achats financée par l'Arabie ?

Le fait demeure néanmoins que si le Liban doit un jour se relever de l'abîme, ce ne sera pas seulement grâce à des bras secourables tendus du dehors, mais aussi et surtout par la volonté de ses fils. Davantage que d'armements, c'est d'officiers intègres, réservant leur entière loyauté à l'État plutôt qu'à leurs communautés, de généraux qui ne se voient pas déjà présidents, qu'a besoin l'armée. Mieux que les appareillages de détection électroniques les plus sophistiqués, c'est une coopération sans faille entre les divers services sécuritaires qui pourra mettre en échec le terrorisme. Et même si venaient à être démasqués les terroristes, il faudrait encore des cohortes de juges capables de résister à toutes les tentations, pressions et menaces.

C'est trop rêver ? Sans doute. D'autant que pour mériter tous ces dons du ciel il faudrait, pour commencer, des citoyens libanais prêts à se réaccoutumer, dans leur vie quotidienne, à la primauté de la loi. Acceptant de réapprendre la formule unique sur laquelle repose leur pays. Capables, à leur tour, de résister au vertige des passions sectaires. C'est par la base aussi que se gagne le salut.

Issa Goraieb

igor@lorient-lejour.com.lb

Au terme d'une année scélérate, avare en cadeaux mais fertile par contre en crises politiques et sanglants attentats terroristes, ce sont de somptueuses étrennes que se voit offrir, pour 2014, l'armée libanaise.Du jamais-vu en effet, que cette enveloppe de trois milliards de dollars consentie par le royaume d'Arabie saoudite au moment même où il accueillait le président François Hollande...