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Moyen Orient et Monde - Le point

Un adversaire à ménager

Le guide suprême, à n’en pas douter, a le sens du timing. Le jour même de la reprise à Genève du dialogue sur un accord intérimaire, il a jugé bon de rappeler la position de son pays, soit la consolidation de ses droits nucléaires. Au même moment, Benjamin Netanyahu rencontrait à Moscou Vladimir Poutine pour le dissuader de continuer à soutenir la République islamique dans sa recherche de l’arme absolue. La différence entre ces deux attitudes est que Ali Khamenei est capable de faire capoter les discussions. Il lui suffit pour cela de tirer le tapis sous les pieds de son homme lige, l’actuel président de la République, alors que « Bibi » sait bien qu’il lui est impossible de faire dévier d’un iota le maître du Kremlin. Tout comme, à Washington, les gasconnades de John McCain demeurent sans effet sur un Barack Obama déterminé à parvenir à une entente avec les mollahs en ne cédant rien toutefois sur l’essentiel.


Pour tenter de décrypter la pensée de l’hôte de la Maison-Blanche, il importe ces temps-ci de passer par la lecture des médias américains. Titre il y a quatre jours de l’éditorial du New York Times, qui donne le « la » à la plupart de ses confrères : « Ce n’est pas le moment de presser l’Iran » (« Not the time to squeeze Iran »). Et de faire parler le langage des chiffres pour amener à raison les esprits chagrins : les exportations de pétrole par Téhéran ont chuté de quelque 110-120 milliards de dollars annuellement à 40-50 milliards. Le président US se veut rassurant lorsqu’il affirme que les sanctions les plus « fortes » resteront en vigueur. Ce qu’il masque soigneusement, c’est sa crainte qu’un excès de mesures coercitives n’affaiblisse la position des émissaires de Rohani.
L’État hébreu pour sa part s’emploie à attiser la flamme anti-iranienne, qui n’est pas près de s’éteindre aux États-Unis, recourant à cet effet tantôt à la Fondation pour la défense des démocraties, un groupe de pression qui a déjà fait ses preuves par le passé, et tantôt encore à d’influents sénateurs menés par l’incontournable John McCain, pour qui John Kerry est « une masse humaine (“a human wrecking ball”), en allusion à l’outil qui sert à démolir des murs, en l’occurrence le régime des mollahs ».


Le Premier ministre israélien excelle dans la posture de l’homme qui ne cesse de crier au loup. C’est sans illusion qu’il s’est embarqué pour Moscou, ainsi que devait l’indiquer Zeev Elkin, le numéro deux de la diplomatie. À tout le moins, espère-t-il, il aura alerté les grands de ce monde et surtout rappelé que, si besoin est, Malbrough n’attendrait personne pour s’en aller-t-en guerre. Quarante-huit heures auparavant, il l’avait affirmé une fois de plus devant son hôte français, venu soutenir cette ligne de conduite mais aussi plaider la cause des Palestiniens, l’arrêt de la colonisation et la reconnaissance de Jérusalem comme capitale des deux parties en conflit, autant de mots qui n’ont jamais figuré dans le vocabulaire israélien. Il suffisait d’ailleurs de voir l’expression renfrognée affichée par « Bibi » et son ministre des Affaires étrangères Avigdor Lieberman pendant ce discours devant la Knesset pour comprendre l’impact d’une prise de position aussi courageuse. Que le chef de l’État français ait rejoint Tel-Aviv dans l’intransigeance dès lors qu’il s’agit du problème nucléaire de Téhéran peut se défendre à condition toutefois que l’on ne tire pas sur la corde au point de la casser.


Dans un dossier aussi lourd qu’épineux, on trouvera difficilement un partenaire laissant libre cours à la folle du logis, tant chacun est conscient de l’importance des enjeux. L’expression « toutes les options sont sur la table » est valable pour l’un autant que pour l’autre, étant entendu – la précision mérite d’être apportée – que chacun sait jusqu’où il peut aller trop loin, et Netanyahu plus qu’aucun autre. Même si, le secret a été révélé au Financial Times par Yaakov Amidror, un proche du chef du gouvernement, l’armée de l’air israélienne effectue depuis quelque temps des vols long-courriers pour expérimenter sa capacité à lancer des raids sur certaines cibles iraniennes.


Écoutons plutôt Chuck Hagel, secrétaire à la Défense : « Nous sommes engagés depuis 1979 avec l’Iran dans une guerre qui ne dit pas son nom. Que nul ne s’imagine que nous allons parlementer pendant une semaine pour aboutir à un mini-accord. Les pourparlers en cours vont se poursuivre longtemps. »
Une manière de dire, en paraphrasant l’adage : qui veut aller loin ménage l’adversaire.

Le guide suprême, à n’en pas douter, a le sens du timing. Le jour même de la reprise à Genève du dialogue sur un accord intérimaire, il a jugé bon de rappeler la position de son pays, soit la consolidation de ses droits nucléaires. Au même moment, Benjamin Netanyahu rencontrait à Moscou Vladimir Poutine pour le dissuader de...
commentaires (1)

Et voilà...tout est dit. Brillant.

GEDEON Christian

16 h 17, le 21 novembre 2013

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Commentaires (1)

  • Et voilà...tout est dit. Brillant.

    GEDEON Christian

    16 h 17, le 21 novembre 2013

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