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Culture - Rentrée littéraire

Le livre de la vie de Sylvie Germain

Plus de trente-cinq ouvrages, entre romans et essais, devancent son nom. Son dernier opus, « Petites scènes capitales » (Albin Michel, 252 pages), figure en cette rentrée sur la liste du Goncourt. Depuis « Le livre des nuits » en 1984, plébiscité par le public et la critique, Sylvie Germain a sa voix, sa présence et son style si particuliers et attachants dans le paysage littéraire actuel.

Une sorbonnarde qui a frayé avec la philosophie et qui eut comme professeur Emanuel Levinas. Une voyageuse née à Châteauroux, qui a enseigné (le français et la philosophie) à Prague et est retournée vivre entre La Rochelle et Paris. Ses livres, habités par un univers étrange et baroque, passionnés et oniriques, scintillants et sombres, ont tous un parfum de spiritualité et de poésie. Poésie à l’état presque nature, à la fois sauvage et lumineuse. Avec ce goût âpre et ardent pour la liberté.
Les prix accumulés en presque trente ans d’écriture (Prix Insolite, Passion, Goncourt des lycéens, Femina – pour Jours de colère en 1989 – et la liste est loin d’être exhaustive) jalonnent une carrière portée par le succès. Grâce à cette écriture ciselée, unique, aux flamboyances véhémentes, ténébreuses et solitaires.
«Écrire, c’est écouter la langue respirer là où elle se tait entre les mots», confie Sylvie Germain qui fut encouragée à ses débuts par Roger Grenier. Une œuvre riche et ramifiée dont la dernière pointe est ce roman de la solitude et de l’attente d’une tendresse. Celle d’une orpheline de mère qui voit son père s’éloigner graduellement d’elle... Comment des scènes dans une vie peuvent-elles être petites et capitales? Justement, c’est dans ce paradoxe de la densité du moment que l’être est révélé à lui-même...
Narration tortueuse qui conduit la jeune Lili à une famille recomposée après la mort de sa mère dès sa prime enfance. Remarié, son père n’est plus à elle seule. Voilà qu’une belle-mère (la belle Viviane!) et ses enfants débarquent dans une vie où elle n’avait que les oiseaux comme compagnons...
Des sœurs et un frère. Et le chahut s’installe pour un questionnement angoissant, obsédant, avec cette hantise terrible d’une enfant abandonnée, livrée à sa solitude quand les autres cherchent aussi frénétiquement une issue de sortie, un salut, un sens à leur propre vie.
Atmosphère de conflits et d’observations, où l’héroïne tente de retrouver sa place parmi les autres. Sa vie se construit de ce frottement avec un environnement mobile et fuyant, où les aspirations de chacun ont des incidences et des répercussions sur la formation de sa propre personnalité. Qui tend vers la vie et la liberté.
Un frère qui se voit moine, des sœurs qui fuient le foyer familial, un père épris d’une femme séduisante, la mort d’une mère qui hante les lieux et une nature omniprésente avec ses vols d’oiseaux, ses paysages mystérieux et changeants, ses ombres qui pénètrent jusqu’au cœur de ces pages frémissantes, sifflantes, murmurantes des clameurs et petits bruits des forêts. Aux présences à la fois inquiétantes et apaisantes. Comme une part indispensable et inaliénable au rythme de la vie.
Dans une langue d’une grande richesse lexicale, d’une musicalité maîtrisée, en vraie esthète et virtuose de la langue, l’auteure de Magnus entraîne le lecteur vers des zones d’évasions insoupçonnées. En conjuguant avec brio, mais aussi quelque excès, un chapelet de tragédies où se fondent les grandes agitations politiques, familiales et passionnelles, surtout celles du cœur...
Une exploration en teintes douces et violentes de l’âme humaine pour se retrouver. Pour retrouver, à travers le prisme de reflets que les autres jettent sur notre espace de vie, la paix en soi. La paix en soi après que les orages passent ou restent suspendus, comme une épée de Damoclès, sur nos têtes.
Avec Sylvie Germain, à part les thèmes évoqués, clefs indispensables pour un épanouissement et une harmonie intérieure, il y a constamment la beauté incantatoire d’un texte à la musicalité chargée d’une poésie torrentielle et colorée. Une lecture (comme pour les livres de Michel Tournier) dont on sort immanquablement revigoré, renouvelé. Pour mieux se réconcilier avec soi et les autres.
Une sorbonnarde qui a frayé avec la philosophie et qui eut comme professeur Emanuel Levinas. Une voyageuse née à Châteauroux, qui a enseigné (le français et la philosophie) à Prague et est retournée vivre entre La Rochelle et Paris. Ses livres, habités par un univers étrange et baroque, passionnés et oniriques, scintillants et sombres, ont tous un parfum de spiritualité et de poésie....
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