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À La Une - Liban-Campus

Les jeunes Libanais accros aux réseaux sociaux

Ils passent quotidiennement de longues heures à surfer sur le Web. Certains déclarent même ne pas pouvoir vivre sans Internet. Comment expliquer cette addiction ? Bribes de réponses.

Jack el-Masry et Scarlette Haykal.

«Je ne peux pas imaginer ma vie sans réseaux sociaux», confie Zeina Merhej, 19 ans, avant d’ajouter: «À tout moment de la journée, je partage sur Facebook, Instagram et Twitter mes activités, mes photos et mes pensées. Je reçois des “likes” et des commentaires. Et ainsi, je sens que je donne un sens à tout ce que je fais.»
Nour Hanna a 16 ans, Facebook est son réseau social favori. Elle y «va » au moins 5 fois par jour. «C’est un univers qui me permet de rester en contact avec mes amis et mes proches, de faire de nouvelles connaissances, d’apprendre plein de choses à travers les pages que j’aime et de me divertir », explique t-elle. Ziad Naamani, 4e année de droit, a des réserves sur Facebook : «Moi, je préfère Twitter et Instagram car ils m’offrent l’opportunité de communiquer avec les autres sans avoir à révéler des informations intimes telles celles qu’on partage sur Facebook. »
Pamela Nohra privilégie la fameuse application de messagerie WhatsApp aux autres moyens de communication car elle lui permet de « correspondre facilement avec mes amis tout en économisant temps et argent ». En effet, contre quelques dollars par mois – 2$ pour les 100 MB –, les jeunes restent « connectés » avec leurs amis nuit et jour. Parfois aux dépens de leur sécurité. Rawad Charbel, 22 ans, lui aussi accro à l’application WhatsApp, avait l’habitude de l’utiliser même derrière le volant. «Je ne le fais plus depuis que ma copine a fait un accident de voiture alors qu’elle discutait en ligne. Elle a survécu, mais elle a été déprimée pour de longues semaines.» M. Fadi Gebrane, fondateur de l’ONG Kunhadi, explique: «Si l’on roule à une vitesse de 50 km/h, on traverse 12 m chaque seconde. En se distrayant sur le portable durant une seconde, on risque alors de conduire 12 m “les yeux fermés” et donc de s’exposer à des accidents. Et plus la vitesse augmente, plus la menace s’accroît.»

Communication, partage et réseautage
«Les réseaux sociaux ne constituent pas uniquement un moyen de communication et de partage pour les jeunes, ils leur permettent également de tuer la solitude, de remplir le vide et de développer un sentiment d’appartenance lorsqu’ils adhèrent à des groupes», explique May Maroun, docteure en sociologie, avant d’ajouter : « Contrairement à la vie réelle, le Web social permet aux jeunes de se faire des amis, de trouver facilement et en peu de temps des personnes avec lesquelles ils partagent les mêmes intérêts. Ce qui compte le plus pour les jeunes aussi, ce sont les réactions qu’ils obtiennent sur ce qu’ils affichent. À noter que ces réseaux leur permettent parfois de dire ce qu’ils n’osent pas dire ni demander dans la vie réelle, et donc de développer leur identité. Une identité qui peut être, de même, influencée par des valeurs qui circulent sur la Toile et qui favorisent une ouverture socioculturelle et la création de causes communes comme dans le cas du printemps arabe. »
Par ailleurs, les téléphones intelligents ont transformé la vie des jeunes. Jack el-Masry, 21 ans, passionné du Web social, précise : « Avant les smartphones, pour se connecter aux réseaux en ligne, il fallait rester chez soi. Aujourd’hui, on peut sortir tout en restant “en ligne”. Moi, j’étudie, je travaille et je rencontre mes amis en étant connecté. Rester à jour de ce qui se passe sur la Toile est important pour moi.» Mais est-ce toujours possible? « Consulter les réseaux sociaux lorsqu’on est en famille ou en groupe, considéré auparavant comme irrespectueux, est devenu maintenant commun», répond Nadine Farhat. Pas du tout d’accord, Ziad Naamani confie « ne pas consulter mon portable lorsque je suis accompagné ». « En se distrayant en ligne, on perd notre interaction réelle au profit d’une communication virtuelle », dit-il.
Le Dr Maroun approuve: «Ces réseaux ne doivent pas remplacer les contacts sociaux de la vie réelle. Quand on est accro, on devient moins sociable. Le jeune ne participe plus aux activités physiques ni aux réunions familiales, et s’il le fait, il reste accroché à l’appareil. Et quand il examine les activités des autres en ligne, il se contente d’un “like” sans prendre la peine d’appeler la personne ou de la rencontrer. » Son jugement ? « Le Web social est un monde idéalisé, différent de la réalité. Les jeunes n’y montrent que leurs joies, sorties, fêtes, mais pas leurs déceptions. »

Source de tensions ?
«Se connecter tout le temps limite notre liberté. C’est comme si on autorisait les gens à nous surveiller», lance un étudiant en gestion qui tient à garder l’anonymat. Pour lui, les réseaux sociaux peuvent être utilisés pour harceler ou intimider d’autres utilisateurs. Il poursuit: «Après une dispute, le copain de ma cousine a téléchargé des photos de son profil et les a modifiées avant de les partager pour l’humilier et l’insulter. » Rim Matar, 22 ans, et bien qu’elle soit encore une grande utilisatrice de WhatsApp, a décidé de désactiver son compte Facebook. « J’ai choisi de sortir de Facebook car les photos et les commentaires publiés par mes amis allaient gâcher ma relation avec mon copain. »
Un autre impact négatif de cette addiction est le recul dans le rendement académique. Samer Khalil, 23 ans, étudiant en architecture, raconte : « Quand j’étais à l’école, je passais les après-midi devant l’ordinateur à discuter sur MSN au lieu d’étudier. Aujourd’hui, je le regrette. »
Le Dr May Maroun appelle à la sensibilisation des jeunes sur les problèmes engendrés par la mauvaise utilisation des réseaux sociaux. « Il doit y avoir un code éthique d’utilisation de la Toile de façon à établir des limites à ce qui est permis en ligne, comme par exemple l’interdiction de la diffusion de photos ou de commentaires sans le consentement des personnes concernées. » Elle conclut : « Les jeunes doivent toujours se demander quelle image ils veulent donner d’eux-mêmes avant de publier des informations privées, et ils doivent s’inquiéter des répercussions possibles à long terme de leurs publications sur les réseaux sociaux. »

Arzé NAKHLÉ


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