Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Le point

Un mollah chez le Grand Satan

... Le sage conseilla au pauvre hère, venu se plaindre de l’exiguïté de la masure dans laquelle il vivait avec sa nombreuse famille, d’installer également sa chèvre à l’intérieur. Le brave homme, s’étant exécuté, revint à la charge, cette fois pour dire qu’il suffoquait ainsi que les siens. « Sors le caprin », lui fut-il répondu. Ce qu’il fit et, dès lors, s’en trouva fort bien.
Hassan Rohani, après Ahmadinejad, c’est un peu ce fabliau : comparé à son prédécesseur, le voici paré de (presque) toutes les vertus, ce qui n’a pas eu l’heur de plaire à Benjamin Netanyahu et consorts, vexés de ne plus avoir en face d’eux leur ennemi préféré. Mais il n’y a pas que cela. Dès les premiers jours de la bataille pour la présidentielle, remportée au premier tour le 14 juin, l’homme s’en prenait, à la surprise générale, à Saïd Jalili, le candidat du guide suprême, un signe qu’il est loin d’être la marionnette du pouvoir, comme on veut le faire accroire. En prélude à son déplacement à New York, il s’est lancé dans une orgie de messages sur l’Internet, qualifiée aussitôt de « diplomatie du Twitter », une campagne incluant, le 4 septembre, des vœux pour le Rosh Hashana, le nouvel an juif, suivis de propos très remarqués sur l’Holocauste.
Dans une tribune publiée le 19 septembre par le Washington Post, le nouveau chef de l’État parlait d’un « constructive engagement », rappelait que sa campagne électorale avait été placée sous le double signe de la « prudence » et de l’« espoir », évoquait les multiples défis auxquels le monde doit faire face – « terrorisme, extrémisme, interventions armées étrangères, trafics de drogue, cybercrimes, atteintes à l’exception culturelle » – et insistait sur la nécessité de tenir compte non seulement de ses intérêts propres mais aussi de ceux de l’autre partie. Autant d’éléments, faisait-il valoir, qui appellent une approche diplomatique positive.
Il existe un autre maître mot qui revient souvent dans le langage du président iranien : respect, celui dû par l’Iran aux autres pays autant que celui qu’il attend de ceux-ci à son égard. Dès qu’il a été question de sa présence aux Nations unies, les pythies ont entrepris de pronostiquer une simple poignée de main, à défaut d’une rencontre, avec Barack Obama. La réponse des intéressés n’a pas tardé. Il existe encore, a jugé l’hôte de la Maison-Blanche, trop de rancœurs accumulées, trop de méfiance ; et d’ailleurs « cela s’est avéré, pour l’autre partie, quelque peu compliqué à l’heure actuelle ». Pas assez de temps pour organiser une telle entrevue, a confirmé Rohani, reconnaissant toutefois que « la glace commence à se rompre, essentiellement à cause de la volonté de notre peuple d’instaurer de nouvelles relations ».
Est-il possible aujourd’hui de parler d’une nouvelle page dans les rapports plutôt tumultueux, en particulier ces soixante dernières années ? Cela paraît difficile au vu de la constante dégradation des rapports entre les deux pays depuis le coup d’État du 18 août 1953 contre Mossadegh jusqu’à l’appui US à l’Irak dans la guerre de huit ans, en passant par la prise d’otages à l’ambassade américaine, le 4 novembre 1979, et, ces dernières années, le différend sur le programme nucléaire lancé par la République islamique.
Aujourd’hui, une Amérique en proie au doute après toutes les guerres déclenchées – et perdues – au lendemain de 1945 et un Iran saigné à blanc par les sanctions semblent s’être engagés, en toute lucidité, dans un pari pascalien : donner sa chance au dialogue plutôt que, pour le premier, faire entendre le cliquetis des armes, pour le second, s’obstiner dans une contre-productive politique du pire ; et pour les deux, continuer d’échanger invectives et vitupérations. D’où le dialogue à distance initié mardi du haut de la tribune onusienne, en attendant de le poursuivre dans les heures à venir, avec une délégation iranienne conduite par Mohammad Javad Zarif et le groupe P5+1 mené par John Kerry comprenant, outre les USA, la Russie, la Chine, la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne. Un premier pas qui, à condition que tout se passe comme on l’espère, devrait s’accompagner de gestes marquant la bonne volonté des deux camps, peut-être même de cette avancée sur le nucléaire dont on parle tant. Une « petite entente » mais un grand pas pour des ennemis dont la dernière rencontre – celle de Jimmy Carter, alors président, et du chah – remonte au... 31 décembre 1977. Encore restera-t-il, une fois concrétisée l’éventualité d’une avancée, à en voir les conséquences dans un Proche-Orient (Égypte, Syrie, Irak, Soudan, Yémen, Palestine) en proie à des secousses sismiques sans fin.
La conjoncture, pour les Israéliens, est claire : ils en sont toujours, eux, à la phase de la chèvre à l’intérieur de la hutte.
... Le sage conseilla au pauvre hère, venu se plaindre de l’exiguïté de la masure dans laquelle il vivait avec sa nombreuse famille, d’installer également sa chèvre à l’intérieur. Le brave homme, s’étant exécuté, revint à la charge, cette fois pour dire qu’il suffoquait ainsi que les siens. « Sors le caprin », lui fut-il répondu. Ce qu’il fit et, dès lors,...

commentaires (4)

IL INSPIRE CONFIANCE L'AYATOLLAH ROHANI. DU GRAND CHANGEMENT EN VUE. SUR L'ÉCHIQUIER INTERNATIONAL, COMME RÉGIONAL, LES PIONS VONT CHANGER DE PLACE...

SAKR LOUBNAN

14 h 31, le 26 septembre 2013

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • IL INSPIRE CONFIANCE L'AYATOLLAH ROHANI. DU GRAND CHANGEMENT EN VUE. SUR L'ÉCHIQUIER INTERNATIONAL, COMME RÉGIONAL, LES PIONS VONT CHANGER DE PLACE...

    SAKR LOUBNAN

    14 h 31, le 26 septembre 2013

  • "Sacrés" mollâhs Per(s)cés ! Et dire que malgré tout cet aboiement, ils avaient encore trouver le moyen d'acheter des armes à Israël par le truchement de l'Irangate....

    Antoine-Serge KARAMAOUN

    07 h 12, le 26 septembre 2013

  • DU BELZÉBULISME BICORNE !

    SAKR LOUBNAN

    06 h 16, le 26 septembre 2013

  • Il faut souhaiter un réel rapprochement entre l'Iran et l'Occident d'une part et l'Arabie saoudite d'autre part. Le réalisme dit que c'est seulement de là que pourra naître l'espoir de voir la République islamique iranienne freiner les dérives et les exactions du Hezbollah au Liban..

    Halim Abou Chacra

    05 h 02, le 26 septembre 2013

Retour en haut