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À La Une - Conférence

Impasse totale sur les droits de la femme dans les prisons libanaises

Le Rassemblement démocratique des femmes libanaises préconise la création d’une structure indépendante pour la gestion des prisons. Une initiative nécessaire pour le respect des droits des détenues sur base des standards internationaux.

Les intervenants, Rodolphe Gebrayel, le lieutenant-colonel Ghassan Osman, Me Élisabeth Sioufi et Me Mona Zeayter.Photo Michel Sayegh

Attirer l’attention sur les prisons de femmes au Liban et pousser les autorités à respecter les droits spécifiques des femmes en détention : tel est l’objectif de la table ronde organisée hier à la Maison de l’avocat par le Rassemblement démocratique des femmes libanaises, sur base du projet « Renforcer les politiques des droits de l’homme dans les prisons de femmes au Liban ». L’association part du principe que la crise locale et régionale ne doit pas être un prétexte pour occulter la réalité libanaise. Mais au contraire, une raison pour poser les fondements d’une politique de respect des droits de l’homme, « au nom de la dignité humaine ».
Sur une population carcérale de 6 000 individus environ, 224 femmes sont détenues dans 4 prisons à Zahlé, Beyrouth, Baabda et Tripoli. Sans parler des 600 femmes migrantes enfermées pour plusieurs mois parfois dans le centre de rétention de la Sûreté générale, à Adliyé, dans l’attente de leur rapatriement.
Les conditions de détention des femmes s’apparentent à celles des hommes. Si la promiscuité est un des problèmes majeurs dont souffrent les prisonnières, l’état déplorable des bâtiments, totalement inadaptés, est également à montrer du doigt. Elles souffrent aussi de l’extrême lenteur des procédures judiciaires, et de l’absence de structures de réhabilitation et de formation professionnelle.

Aucun dépistage de cancer ou de MST
Mais c’est aux niveaux sanitaire et médical que les violations des droits des détenues sont les plus flagrantes, « leurs besoins humanitaires de base n’étant même pas assurés », affirme l’avocate Mona Zeayter au nom de l’association, se basant sur une étude légale conduite par Maya Mansour et Rita Ghaoui. Elle précise que les détenues n’ont pas droit à des consultations gynécologiques, ni même aux dépistages de cancer ou aux traitements des maladies chroniques. « Et pourtant, les femmes sont sujettes à certaines maladies, comme les maladies sexuellement transmissibles », note l’avocate.
De même, aucune commodité n’est envisagée pour les femmes enceintes ou pour celles qui désirent allaiter leurs nouveau-nés. Me Zeayter dénonce aussi le manque de nourriture équilibrée et les importantes lacunes au niveau de l’hygiène personnelle. « Nous constatons une absence dramatique de produits de toilette, jusqu’aux serviettes hygiéniques », assure-t-elle à ce propos. L’avocate ne manque pas de condamner, par ailleurs, la discrimination contre des détenues étrangères et les prisonnières appartenant à la classe défavorisée. Elle tient à rappeler que le pays est signataire de la Convention contre la torture.
La mobilisation du Rassemblement démocratique des femmes libanaises ne se limite pas à faire la lumière sur les conditions de détention des femmes. L’association féministe veut pousser les autorités à créer une direction indépendante, chargée de gérer les prisons du pays dans le respect des standards internationaux. Elle collabore à cet effet avec l’Union européenne et l’Agence suédoise de coopération internationale au développement (ASDI) qui financent le projet, et avec les ONG Diakonia, Dar el-Amal et Caritas, pour son application. L’amélioration des conditions des détenues passerait notamment par la formation du personnel pénitentiaire, par le développement d’un système efficace d’aide judiciaire et par la mise en place de sessions de formation professionnelle des détenues.
C’est avec la participation de nombreux acteurs de la société civile et de représentants des autorités que s’est tenue cette table ronde. Parmi lesquels la présidente de l’Institut des droits de l’homme à l’ordre des avocats, Me Élisabeth Sioufi, le représentant de Diaconia, Rodolphe Gebrayel, le représentant des FSI, le lieutenant-colonel Ghassan Osman, le chef de la cellule des droits de l’homme au sein des FSI, le lieutenant-colonel Ziyad Qaëd Bey, ainsi que des représentants des ministères de la Santé et des Affaires sociales.
Le débat a été tel qu’il a par moments tourné à la confrontation entre les représentants d’ONG et le lieutenant-
colonel Osman, les deux parties se lançant mutuellement des accusations sur l’amère réalité des femmes détenues et sur les dérives observées dans certaines prisons.

 

 

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