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Moyen Orient et Monde - Diplomatie

La Russie tente de reprendre la main sur la Syrie

Moscou propose à Damas, qui accepte, de placer son arsenal chimique sous contrôle international.

Des Syro-Américains, en faveur d’une frappe contre le régime Assad, manifestent devant le Capitole à Washington. Jonathan Ernst/Reuters

Poursuivant les efforts diplomatiques pour éviter une intervention militaire étrangère en Syrie, la Russie a tenté de reprendre la main sur ce dossier hier. Assurant que Damas était toujours prêt à des négociations de paix, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a annoncé avoir proposé aux Syriens de placer leur stock d’armes chimiques sous contrôle international et de le détruire. « Nous appelons les dirigeants syriens à non seulement accepter de placer sous contrôle international leur stock d’armes chimiques et ensuite à le détruire, mais aussi à rejoindre pleinement l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques », a ainsi déclaré M. Lavrov. La Syrie a immédiatement « accueilli favorablement » cette proposition par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Walid Moallem, sans être plus spécifique. M. Moallem, qui se trouvait hier à Moscou, a aussi salué « la sagesse des dirigeants russes qui essaient d’empêcher une agression américaine contre notre peuple ».


Dans la foulée, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a appelé à la création de zones supervisées par les Nations unies en Syrie, où les armes chimiques du pays pourraient être détruites. M. Ban pourrait proposer au Conseil de sécurité la création de ces zones si les enquêteurs onusiens confirmaient l’utilisation d’armes prohibées, afin de surmonter « l’embarrassante paralysie » du Conseil. Les États-Unis, eux, ont accueilli favorablement mais avec prudence la proposition russe, tout en faisant part de leur scepticisme sur les intentions du régime de Bachar el-Assad. Peu après avoir rencontré le président Barack Obama à la Maison-Blanche, l’ancienne secrétaire d’État Hillary Clinton a estimé que « si le régime (de Damas) mettait immédiatement ses stocks sous contrôle international (...) ce serait une étape importante. Mais cela ne peut pas être une nouvelle excuse pour un délai ou une obstruction ». Mme Clinton a prévenu que « la Russie doit soutenir sincèrement les efforts de la communauté internationale ou rendre des comptes ». Peu avant Mme Clinton, Tony Blinken, conseiller adjoint de M. Obama à la Sécurité nationale, a déclaré que son pays voulait « examiner de près » la proposition de Moscou. Son collègue Ben Rhodes, également conseiller adjoint à la Sécurité nationale, a toutefois prévenu sur la chaîne MSNBC que Washington ne relâcherait pas pour autant la pression sur Damas et se méfiait d’une tactique destinée à retarder l’échéance de frappes contre le régime d’Assad. « Je pense qu’il va nous falloir rester en contact avec eux (les Russes) et d’autres pays pour évaluer le sérieux de cette proposition », a ajouté M. Rhodes.


En soirée, le département d’État US a annoncé que le secrétaire d’État, John Kerry, et M. Lavrov ont eu un entretien téléphonique au sujet des armes chimiques syriennes.

 


Trois conditions...
À Londres, le Premier ministre David Cameron a jugé « particulièrement bienvenu » l’appel adressé par la Russie à la Syrie, estimant qu’une telle démarche de Damas serait « un grand pas en avant ». Il a ajouté cependant qu’il fallait s’assurer « qu’il ne s’agit pas d’une manœuvre de diversion ». Selon Paris, la proposition russe « mérite un examen précis ». Elle serait « recevable à au moins trois conditions » et nécessite « des engagements précis, rapides et vérifiables » de la part de Damas. « Cette opération doit se faire sur la base d’une résolution contraignante du Conseil de sécurité, avec un calendrier court et des conséquences fermes si (Damas) ne respectait pas ses engagements. » Le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, a ainsi réclamé que M. Assad « s’engage sans délai à mettre sous contrôle international et à laisser détruire l’ensemble de son arsenal chimique », et demandé une saisine de la Cour pénale internationale pour que soient jugés les auteurs de l’attaque chimique du 21 août. Pour sa part, l’Élysée n’a pas encore réagi.


De son côté, le chef des rebelles syriens a accusé le régime Assad et son allié russe de mentir. « Nous appelons à des frappes et nous avertissons la communauté internationale que le régime (d’Assad) dit des mensonges et que le menteur Poutine est son professeur », a déclaré le chef d’état-major de l’Armée syrienne libre, Sélim Idriss, dans un entretien à la chaîne al-Jazira. « Le régime (syrien) veut gagner du temps pour se protéger » d’une éventuelle frappe, a-t-il affirmé.

Vote incertain au Congrès US
Entre-temps, dans l’incertitude complète sur l’issue du vote final du Congrès US sur des frappes en Syrie, qui pourrait ne pas intervenir avant la semaine prochaine, le président Barack Obama doit faire face à une opinion publique hostile à une intervention militaire. Six Américains sur dix y sont opposés, selon un sondage publié hier. Conscient de jouer à la fois la crédibilité des États-Unis et sa propre présidence, M. Obama devait lancer une offensive tous azimuts pour convaincre les élus républicains et démocrates. Il devait enregistrer pas moins de six interviews avec des chaînes de télévision pour diffusion à compter d’hier dans la nuit, avant de s’adresser aujourd’hui soir aux Américains. Au Sénat, le débat sur la résolution autorisant l’usage de la force, déjà adoptée en commission, ne commencera formellement qu’aujourd’hui. Un premier vote important pourrait intervenir dès demain.


Auparavant à Londres, M. Kerry avait affirmé que « la fin du conflit en Syrie requérait une solution politique », estimant « qu’il n’y a pas de solution militaire ». Mais « le risque de l’inaction est plus grave que le risque découlant d’une action », a-t-il assuré. Interrogé sur ce que le régime syrien pourrait faire pour éviter des frappes, il a répondu : « Bien entendu, il (M. Assad) pourrait restituer l’intégralité de son arsenal chimique à la communauté internationale dans la semaine à venir, tout rendre, tout sans délai (...) Mais il n’est pas prêt de le faire, et il ne le peut pas. » Son porte-parole a précisé peu après que cette remarque purement « rhétorique » ne constituait pas une offre de négociation faite à Damas. Toutefois, plusieurs élus américains ont critiqué M. Kerry, qui a évoqué la possibilité d’une intervention en Syrie « incroyablement petite ». De son côté, le chef de la diplomatie britannique, William Hague, a assuré son homologue américain du « soutien diplomatique total du Royaume-Uni ». Il a toutefois rappelé que son gouvernement « respecterait » le non du Parlement à une participation britannique à d’éventuelles frappes.

Damas dédouané ?
Par ailleurs, Carla del Ponte, membre de la commission d’enquête de l’ONU sur les violations des droits de l’homme en Syrie, a fait part de son hostilité à une intervention militaire. En outre, le Belge Pierre Piccinin, enlevé en Syrie et libéré dimanche avec le journaliste italien Domenico Quirico, a affirmé que le régime Assad n’avait pas fait usage d’armes chimiques. « C’est un devoir moral de le dire. Ce n’est pas le gouvernement Assad qui a utilisé le gaz sarin ou autre gaz de combat dans la banlieue de Damas. Nous en sommes certains suite à une conversation que nous avons surprise », a-t-il dit hier sur la télévision belge RTL-TVI. Il a précisé que la conversation impliquait « le général de l’ASL qui nous séquestrait et un officier d’al-Farouk », un groupe de rebelles.


D’autre part, la Maison-Blanche a affirmé que 14 pays supplémentaires s’étaient joints à la déclaration publiée vendredi en marge du G20 par 11 capitales et appelant à une « réponse internationale forte » en Syrie. Enfin, les ministres des Affaires étrangères des six monarchies du Golfe, qui appuient une intervention internationale, tiendront une réunion aujourd’hui en Arabie saoudite, a indiqué une source diplomatique du Golfe.

 

 

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L'OURS BLANC EST RESPONSABLE EN PREMIER LIEU DES CRIMES COMMIS EN SYRIE !

SAKR LOUBNAN

13 h 45, le 11 septembre 2013

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Commentaires (5)

  • L'OURS BLANC EST RESPONSABLE EN PREMIER LIEU DES CRIMES COMMIS EN SYRIE !

    SAKR LOUBNAN

    13 h 45, le 11 septembre 2013

  • La Russie c'est la clé de toute solution, elle a le dossier sous le coude , et il n'en sera que ce qu'elle décidera de faire , elle a gagné cette manche et gagnera toutes les autres à venir, remember " 2 semaines " , pour les obtus obstinés hors jeu !

    Jaber Kamel

    16 h 17, le 10 septembre 2013

  • Il y a les négociations sur le nucléaire iranien et maintenant il y aura les négociations sur le chimique syrien....à la différence que les iraniens n ont pas encore utilisé le nucléaire... Le tout est de savoir qui décide en Syrie de détruire les armes chimiques? Vous connaissez des criminels qui acceptent de livrer leurs armes....avant de prendre un coup! Il est clair que la Russie a eu vent des premiers résultats des enquêteurs de l ONU... IL LUI FALLAIT UNE PORTE DE SORTIE... Autrement dit les russes ne participeront pas à la défense du régime maintenant...ils se placent pour plus tard... Les frappes auront probablement lieu le lendemain du 11 sept...avec riposte adaptée en cas de débordement...

    CBG

    14 h 14, le 10 septembre 2013

  • J'AURAIS AIMÉ LE TITRE : LA RUSSIE TENTE DE SE REPRENDRE EN SYRIE !

    SAKR LOUBNAN

    08 h 14, le 10 septembre 2013

  • La proposition-combine Lavrov-Moallem de placer l'arsenal chimique syrien sous contrôle international et de le détruire constitue la plus claire et la plus expressive preuve que le régime nazi de Damas a bien eu recours aux armes chimiques le 21 août à la Ghouta de Damas, exterminant plus de 1400 hiommes, femmes et enfants. Aussi bien Lavrov que Walid el-Moallem et surtout ledit régime criminel sont démasqués de la manière la plus spectaculaire.

    Halim Abou Chacra

    04 h 25, le 10 septembre 2013

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