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Syrie: Fadia a résisté jusqu'au bout avant de se résoudre à l'exil

Epouse et mère de deux combattants rebelles, Fadia ne voulait pas quitter la Syrie en dépit des violences. Elle a fini par s'y résoudre devant l'insistance de son fils qui craignait pour sa famille en cas de frappe américaine.

"Pars, je reste ici", a ordonné le jeune combattant à sa mère qui a pris une semaine pour négocier avec les rebelles de Barzé --quartier nord de Damas dévasté par les combats-- une dernière rencontre avec son fils avant de prendre la route.

Mercredi, cette mère de famille est venue gonfler, avec ses deux cadets, la cohorte de réfugiés syriens au Liban, pays qui supporte parmi les voisins de la Syrie le plus lourd fardeau de ce désastre humanitaire.

Les Nations unies ont annoncé mardi que le nombre de réfugiés syriens avait dépassé le seuil des deux millions, soit huit fois de plus qu'il y a un an.

A la fin août, les Syriens enregistrés comme réfugiés ou en attente de l'être étaient 110.000 en Egypte, 168.000 en Irak, 515.000 en Jordanie, 716.000 au Liban et 460.000 en Turquie, a détaillé le Haut commissariat de l'ONU aux réfugiés (HCR).

Au Liban, où les Syriens représentent désormais près de 20% de la population, les autorités refusent pourtant d'établir des camps par crainte que les réfugiés ne s'installent définitivement.

Assise dans le centre d'accueil d'une association libanaise au poste frontalier de Masnaa, à une quarantaine de kilomètres de Damas, Fadia Yassine Maklabi raconte sa dernière rencontre avec son ainé les larmes au yeux.

"Je me suis accroché à lui, je ne voulais plus le lâcher", se rappelle Fadia.

A leur arrivée à Masnaa, la grande majorité des migrants passent ce minuscule local adossé à une station-service, à quelques dizaines de mètres du poste frontalier, explique son directeur, Omar Mohammed al-Louays. Parmi eux, Fadia est la seule mercredi à accepter de parler avec des journalistes de l'AFP.

"Je ne crains que Dieu", proclame cette femme de 36 ans, le visage cerné par un foulard noir, bien noué sur la tête, et portant une ample veste de la même couleur.

A côté d'elle, ses deux cadets, Nagham, 11 ans et Mohammed, 10 ans, s'accrochent à ses vêtements, le regard perdu.

Mariée à 14 ans et mère de quatre enfants, dont l'aîné, Tarek, s'est enrôlé dans le groupe rebelle Ahrar al-Cham, Fadia a vu son mari prendre les armes le premier. Blessé à la jambe, il a été transféré clandestinement au Liban où il se remet lentement.

Les autres réfugiés qui viennent chercher, dans le centre d'accueil un panier de produits de base, de quoi tenir quelques jours, se referment systématiquement dès qu'ils sont abordés par les journalistes.

"Ils ont peur car le régime syrien a ses filières au Liban et craignent aussi pour leurs familles restées au pays", commente un travailleur humanitaire sous le couvert de l'anonymat.

Fadia explique avoir résisté pendant plus de deux ans à la guerre, ses destructions, sa cohorte de morts et de privations pour ne pas quitter sa famille.

"Mais c'est devenu intolérable surtout pour mes deux cadets", déclare résignée Fadia qui laisse derrière elle son père et surtout une fille de 18 ans qui a deux petits garçons.

"On viole les femmes, on massacre les innocents. Les relents putrides des corps en décomposition nous faisaient même étouffer", affirme Fadia en assurant que son quartier, véritable champ de bataille entre soldats et rebelles, a été déserté par la quasi-totalité des habitants.

M. Louays, qui dirige le centre d'accueil de l'association caritative financée par des bienfaiteurs du Qatar, a indiqué que son équipe recevait avant le 21 août --date de l'attaque présumée aux armes chimiques-- entre quarante et soixante familles syriennes par jour, en moyenne.

"Depuis, ce nombre oscille entre 80 à 120 familles par jour", indique-t-il.

L'éventualité d'une frappe américaine visant à "punir" le régime syrien pour cette attaque présumée, est ce que Fadia identifie comme le déclencheur de son départ. "Ça a été une raison supplémentaire de quitter le pays, en plus de la faim, de la peur et des privations".
Epouse et mère de deux combattants rebelles, Fadia ne voulait pas quitter la Syrie en dépit des violences. Elle a fini par s'y résoudre devant l'insistance de son fils qui craignait pour sa famille en cas de frappe américaine."Pars, je reste ici", a ordonné le jeune combattant à sa mère qui a pris une semaine pour négocier avec les rebelles de Barzé --quartier nord de Damas dévasté par...