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À La Une - L'impression de Fifi ABOU DIB

Jaune

Il y a quelques jours est paru, dans l’édition française du magazine « Elle », un article qui a fait très plaisir à Beyrouth. Le titre, sur la version digitale, annonçait justement : « Un été à Beyrouth, la fête, pas la guerre. » La suite est une variation agréable sur un cliché qui nous est très cher depuis 1975, le déni comme un des beaux-arts. Le truc en plumes pour conjurer la mort, le bronzage en guise de pare-balles, l’ami Johnny Walker contre l’adversité, la pulsation des basses pour couvrir les mauvaises nouvelles, ainsi de suite. Aussi rapides que l’autruche pour fuir en avant mais plus inventifs quant à enfouir nos têtes dans le sable, nous ne sommes pas peu fiers d’appartenir à une espèce intéressante qui certes sait subir les guerres avec panache et affronter les bombes avec un pied de nez, mais s’obstine à rester exposée au pire, à ne pas trouver de solution pour s’en prémunir, à vivre dans un pays qui refuse d’exister.


Pour en revenir au site du magazine cité plus haut, parmi les articles proposés dans la même catégorie, plus précisément dans la colonne « Sur le même thème », on trouve curieusement une information titrée : « Ils abandonnent leur bébé à l’aéroport et partent en vacances. » Même thème en effet, et qui laisse rêveur. Pendant ce temps, le bébé...


Et oui, nous dansons alors que tout flambe, nous dansons jusqu’à la transe, jusqu’à l’inconscience. Une bombe en banlieue emporte une trentaine de compatriotes, mais pour beaucoup, la banlieue est en pays étranger. Hier, l’horreur a atteint son comble avec l’attaque au sarin d’une autre banlieue, celle de Damas, à un jet de pierre de la frontière libanaise. Ghouta, une région dont le nom signifie « oasis », irriguée par la rivière Barada qui prend sa source dans l’Anti-Liban. Naguère le poumon de la ville, ce dernier bouclier de verdure avant la steppe syrienne est planté d’amandiers, de noisetiers, de noyers, d’arbres fruitiers et de coton. Sa population est composée pour l’essentiel de paysans et d’agriculteurs attachés à la terre, des gens qui ne partent jamais, trop enracinés pour déserter, dusse le ciel leur tomber sur la tête. Hier, au petit matin, l’inimaginable est pourtant arrivé. Alors que l’équipe d’enquêteurs de l’ONU attendait on ne sait quoi pour procéder aux investigations sur un éventuel usage précédent d’armes chimiques, un nuage de sarin a pris les habitants dans leur sommeil. Des femmes surtout, et des centaines d’enfants, dit-on.


Le régime accuse les islamistes, les islamistes accusent le régime. Les enquêteurs vont donc devoir enquêter sur l’enquête et se tâter pour vérifier leur propre innocence dans cette horrible histoire. Sur les réseaux sociaux sont apparus des sigles, d’abord le réacteur stylisé, noir sur fond jaune, qui signale le danger nucléaire, très vite remplacé par le schéma de réaction, également sur fond jaune, du danger chimique. Le même code couleur signale l’armement du Hezbollah. C’est sûr, cher « Elle », la fête va durer.

Il y a quelques jours est paru, dans l’édition française du magazine « Elle », un article qui a fait très plaisir à Beyrouth. Le titre, sur la version digitale, annonçait justement : « Un été à Beyrouth, la fête, pas la guerre. » La suite est une variation agréable sur un cliché qui nous est très cher depuis 1975, le déni comme un des beaux-arts. Le truc en plumes pour...
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